"Il n'y que des gagnants", a déclaré mercredi devant la presse à
Berne Jean-Luc Nordmann, qui a orchestré la médiation du conflit
depuis la mi-novembre. Il aura fallu durant ce temps sept rondes de
négociations en plénum et de nombreux entretiens individuels pour
arracher un compromis dans la nuit de lundi à mardi.
Fuites dans la presse
Andreas Rieger, co-président d'Unia, Kurt Regotz, président de
Syna, et Werner Messmer, président de la Société suisse des
entrepreneurs (SSE), se sont déclarés satisfaits de la solution
trouvée, qui met un terme à des mois de bataille en réglant les
points de tension majeurs: flexibilisation du travail et hausses
salariales.
Des fuites dans la presse alémanique avaient déjà largement
rapporté la teneur de l'accord. En particulier, la flexibilité des
horaires de travail ne se traduira pas par des heures négatives,
comme le souhaitait ardemment la SSE et auxquelles les syndicats
étaient farouchement opposés.
Le nombre total d'heures reste inchangé à 2112 par année. En
échange, la nouvelle règlementation intègre le jugement du tribunal
arbitral d'août 2006, qui permet de moduler le calendrier de la
durée du travail en fonction des intempéries, du manque de travail
ou de pannes techniques.
En cas de mauvais temps, les entreprises pourront ainsi suspendre
le travail pour le reprendre lorsque les conditions météo
s'amélioreront. Cependant, les travailleurs devront être au
préalable consultés, même si la décision finale revient aux
employeurs.
Hausses salariales
En ce qui concerne les hausses salariales pour 2008 (valables
dès février à partir de l'entrée en vigueur prévue de la
convention), l'augmentation totale atteindra 2,35%, soit 100 francs
par mois de plus pour tous les employés, ce à quoi s'ajoute une
hausse individuelle de 0,5%. Les salaires minimums seront les plus
gros bénéficiaires, avec une hausse de 3%.
Les syndicats et le patronat se sont aussi déjà mis d'accord pour
les hausses en 2009 afin d'éviter d'avoir à renégocier
prochainement: +2%, dont les trois quarts sous forme de hausse
générale. Si l'inflation dépasse les 2%, les partenaires sociaux
devront toutefois renégocier. Les salaires minimums seront relevés
de 2,5%.
Chaque travailleur recevra encore un montant forfaitaire de 600
francs lorsque la nouvelle CN aura force obligatoire, une mesure
décidée par le Secrétariat d'Etat à l'économie (Seco). La chose est
planifiée pour le 1er juillet 2008. Ainsi, les salaires minimums
obligatoires seront en vigueur pour toutes les entreprises de
Suisse ainsi que pour tous les travailleurs temporaires ou
détachés. La mesure permet d'éviter le dumping salarial.
swisstxt/agences/boi/kot
Un long conflit
Cet accord met fin à un long désaccord entre le patronat et les syndicats, qui avait débuté fin septembre.
A cette époque, la convention collective de travail en vigueur dans le secteur principal de la construction était arrivée à échéance et n'avait pas pu être reconduite.
Aucune entente n'avait pu être trouvée depuis lors.
Des manifestations ont été organisées régulièrement depuis fin septembre, rassemblant des milliers de personnes.
Les plus importantes ont eu lieu à Zurich fin septembre, à Genève, Neuchâtel, Berne et au Gothard mi-octobre, ainsi qu'à Zurich et Bâle au début du mois de novembre.
La Convention nationale règle les rapports de travail entre employés et employeurs de quelque 80'000 personnes en Suisse.
Accord à approuver
La nouvelle convention nationale (CN) doit toutefois encore être approuvée par les délégués de la Société suisse des entrepreneurs le 24 janvier et par les assemblées des syndicats Unia et Syna deux jours plus tard.
Si les bases donnent leur feu vert, elle entrera en vigueur en février prochain et sera valable près de trois ans, soit jusqu'au 31 décembre 2010.
Ce n'est pas encore chose faite: "Je suis heureux d'avoir quelques semaines pour pouvoir convaincre les délégués", a ainsi commenté Walter Messmer.
Le texte mettra un terme au vide conventionnel dans lequel se trouvent les quelque 80'000 employés du secteur principal de la construction depuis le 1er octobre, suite à la résiliation par le patronat en mai de l'ancienne CN.
Andreas Rieger de son côté a ajouté que l'extension de la libre circulation aux nouveaux pays de l'UE se présentait sous un meilleur jour.
Les syndicats avaient en effet agité la menace du référendum sur ce point si une nouvelle convention nationale ne pouvait être adoptée.