"Un Etat a-t-il le droit de se procurer des données en violation
des lois de l'Etat ami et probablement aussi en violation de ses
propres lois?", s'est indigné le prince héritier et chef d'Etat
Aloïs de Liechtenstein lors d'une conférence de presse à Vaduz.
Informateur rétribué
Le gouvernement allemand a confirmé lundi que ses services
secrets (le BND) avaient versé entre 4 et 5 millions d'euros à un
informateur pour s'approprier des données volées dans une banque de
la principauté. "Avec son attaque contre le Liechtenstein,
l'Allemagne ne règlera pas ses problèmes avec ses contribuables", a
poursuivi le prince, ajoutant que "le système fiscal allemand est
le plus mauvais au monde."
Le scandale a entaché le statut de paradis fiscal du
Liechtenstein, qui tire environ 30% de son produit intérieur brut
(PIB) du secteur financier, avec des Allemands parmi ses principaux
clients. "Visiblement, le gouvernement allemand n'a toujours pas
compris comment on se comporte avec un Etat ami," a-t-il
regretté.
Le prince n'a pas exclu que la révélation de cette affaire
quelques jours avant la visite mercredi à Berlin du chef du
gouvernement du Liechtenstein, Otmar Hasler, ait été un moyen de
faire pression sur son pays. La chancelière allemande Angela Merkel
avait déclaré à des journalistes lundi attendre une plus grande
transparence fiscale en Europe, en particulier au Liechtenstein,
"un pays qui fait encore l'objet de questions".
Enquête ouverte
La justice liechstensteinoise recherche de son côté
l'informateur qui a transmis les documents confidentiels, a dit à
la presse allemande le procureur Robert Wallner, qui n'exclut pas
que l'enquête puisse s'élargir à des Allemands ayant participé à la
transaction. La banque princière LGT, premier groupe bancaire du
pays, a affirmé samedi que des documents achetés par les autorités
allemandes à un informateur avaient été subtilisés en 2002.
Le coupable avait été rapidement arrêté et avait rendu la
disquette volée, mais en avait apparemment conservé une copie, a
expliqué le ministre de la Justice du Liechtenstein Klaus
Tschütscher lors de la conférence de presse du prince à Vaduz. Ces
données ont permis à la justice allemande de lancer une enquête
record contre un millier de riches contribuables soupçonnés d'avoir
caché des fonds au Liechtenstein pour échapper au fisc.
afp/kot
Crime organisé: Vaduz se joint à la lutte
Le Liechtenstein a ratifié jeudi dernier la Convention de l'ONU contre le crime organisé. La Principauté estime s'être ainsi dotée d'un nouvel instrument important pour lutter contre le blanchiment d'argent et la corruption, a-t-elle indiqué mardi.
La ratification complète les mesures déjà prises par le petit Etat pour éviter que de l'argent acquis illégalement à l'étranger y soit placé. En tant que place financière, le Liechtenstein est conscient de sa responsabilité dans la lutte contre la criminalité organisée et le blanchiment d'argent, a écrit le ministère des affaires étrangères dans un communiqué.
La Principauté a également ratifié deux protocoles liés à la Convention de l'ONU. Le premier réprime la traite des personnes, le second le trafic de migrants. Le traité entrera en vigueur mi-mars au Liechtenstein.
Le Parlement suisse a ratifié ces textes en juin 2006. Il s'agit des premiers instruments régissant à l'échelle mondiale la prévention et la répression de délits concernés.
La convention vise à atténuer les différences entre les systèmes juridiques nationaux. Les Etats parties s'engagent à ériger en infractions la participation à une organisation criminelle et le blanchiment d'argent. Ils doivent aussi mettre en oeuvre des normes réprimant la corruption de fonctionnaires étrangers.
La convention les oblige à faire assumer aux entreprises la responsabilité de leurs actes sur les plans pénal, civil et administratif. Les Etats parties doivent enfin assurer la saisie des valeurs acquises par des moyens délictueux.