Le Conseil fédéral souhaite que PostFinance soit autorisée à octroyer des crédits et des hypothèques. Pour ce faire, Postfinance doit être séparée du groupe Poste et privatisée, a indiqué mercredi le gouvernement. Avec des fonds de clients qui se montent à environ 120 milliards de francs, PostFinance est l'un des principaux établissements financiers de Suisse.
A l'origine, le Conseil fédéral avait proposé de lever l'interdiction pour PostFinance d'octroyer des hypothèques et des crédits et d'ouvrir son actionnariat. Mais lors de la consultation, une proportion importante des milieux concernés a estimé le projet inabouti.
Des doutes ont été exprimés, notamment au sujet de la constitutionnalité, de la neutralité concurrentielle, du fédéralisme et de la stabilité des marchés financiers. Toutes ces préoccupations sont liées au contrôle de l'Etat sur PostFinance (lire encadré).
Séparation de La Poste
Le Conseil fédéral a tenu compte des critiques. Il entend donc biffer de la loi l'exigence selon laquelle La Poste doit détenir la majorité des voix et des actions de Postfinance. Cela ouvrirait la voie au développement de PostFinance en tant que banque commerciale à part entière axée sur le marché intérieur.
La privatisation de PostFinance signifie également sa séparation du groupe Poste. L'intégration et la coopération étroites qui existent actuellement entre PostFinance et les autres sociétés du groupe dans le domaine des services postaux et des services de paiement doivent être adaptées.
Cela suppose une révision des dispositions de la loi sur la poste (LPO) régissant le service universel. Le Conseil fédéral a donc chargé le DETEC d'élaborer, au cours de cette année et en concertation avec le DFF, des propositions concrètes concernant l'évolution du service universel dans le domaine des services postaux et des services de paiement.
ats/sjaq
Garantie de la Confédération
Le Conseil fédéral a décidé d'ajouter une disposition qui permettrait à la Confédération de soutenir La Poste dans la mise en œuvre de la législation "too big to fail". En tant que banque d'importance systémique, PostFinance doit satisfaire à des exigences accrues en matière de fonds propres.
En raison de leur capacité de rendement réduite, la Poste et PostFinance ne peuvent pas fournir dans les délais et intégralement les fonds propres supplémentaire exigés par la FINMA.
C'est pourquoi la Confédération, en tant que propriétaire indirect de PostFinance, doit garantir qu'elle comblera le découvert restant de fonds propres en cas de faillite. Cette garantie de capitalisation devra être d'une durée et d'un montant limités et rémunérée aux conditions du marché.
Réactions opposées
La Suisse a besoin d'une banque publique qui s'engage à financer la protection de l’environnement, estime le Parti socialiste mercredi. Le parti critique également le Conseil fédéral pour ne pas avoir présenté d'alternatives à la privatisation.
Le PS estime que pour un service public fort, PostFinance doit rester à 100% en mains de La Poste. "Notre pays n'a pas besoin d'un géant bancaire supplémentaire qui ne s’intéresserait qu’à la maximisation de ses profits", déclare Valérie Piller Carrard, conseillère nationale (FR), citée dans le communiqué.
"Je suis inquiète pour La Poste, et pour les services universels qu'elle doit assurer et qui sont entre autres financés par Postfinance. Donc si ces financements disparaissent, j'ai peur pour ces services", estime Géraldine Savary dans La Matinale jeudi.
PostFinance pourrait détenir un rôle de pionnier en tant que "banque d'avenir viable" en "se concentrant sur les investissements nationaux et internationaux favorables à la protection de l’environnement", estime-t-elle
"Inacceptable" selon l'USS
L'Union syndicale suisse (USS) juge "inacceptable" la privatisation de PostFinance. La Poste possède un mandat de prestations de base que le Conseil fédéral sape avec sa proposition, écrit l'USS dans un communiqué mercredi. Une telle privatisation entraînerait la scission de l'ensemble du groupe de Swiss Post, avertit l'USS.
La proposition est une attaque frontale flagrante contre le service public, estime l'USS.
Pour le Parti libéral-radical (PLR), c'est la bonne et seule voie à suivre afin de garantir une concurrence loyale. Le Centre attend de Postfinance une stratégie claire avant de prendre position.