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Plus de 13 milliards de francs de prévoyance LPP ne sont pas réclamés

La caisse de libre passage angoisse beaucoup de personnes au chômage
La caisse de libre passage angoisse beaucoup de personnes au chômage / 19h30 / 3 min. / le 27 mars 2021
Les comptes de libre passage gonflent avec la crise du Covid-19. Des dizaines de milliers de personnes ont perdu leur emploi et doivent trouver une caisse pour abriter leurs avoirs du 2e pilier. Si rien n'est entrepris, l'argent est reversé à la Caisse supplétive LPP. Actuellement, plus de 13 milliards de francs y sommeillent.

Lorsqu'on perd son emploi en Suisse, que l'on change d'employeur ou que l'on s'accorde une pause dans la vie professionnelle, on reçoit généralement une lettre de sa caisse de pension indiquant qu'on en est désormais exclu. L'assuré doit indiquer à cette dernière où transférer son 2e pilier, faute de quoi, un compte de libre passage lui sera ouvert auprès de l'institution Supplétive LPP à Zurich. Une très grande part de la population y a ses avoirs de retraite.

"J'ai été complètement perdue avec ce courrier. Impossible de comprendre de quoi il s'agissait, qu'est-ce que je devais faire avec ça. Je les ai contactés, mais cela ne m'a pas vraiment aidé. Pour moi ce sont des termes financiers qui ne me parlent pas du tout", raconte Rachel Pesquet, licenciée il y a quelques mois.

Du "jamais vu"

Nathalie, qui souhaite garder l'anonymat, a travaillé chez différents employeurs: "Chaque fois que je recevais un courrier me demandant ce que je devais faire de mes avoirs, je n'y ai jamais répondu. Aujourd'hui, je ne sais pas où est mon argent".

Pour résoudre ce casse-tête, les deux jeunes femmes ont fait appel à une conseillère patrimoniale, Anne-Sophie Tourrette. La fondatrice de AdvisorOne affirme n'avoir jamais eu autant de demandes sur la prévoyance LPP de libre passage en 13 ans de métier. "Depuis 6 mois, cela n'arrête pas. Les gens aujourd'hui se posent des questions, soit parce qu'ils ont eu le temps de se les poser, soit parce qu'avec le Covid, il y a eu peut-être plus de licenciements ou de départs de Suisse", explique-t-elle.

1,3 million de comptes

Les assurés en Suisse sont nombreux à avoir perdu la trace de leurs avoirs. Ces fonds en déshérence sont regroupés dans la Caisse supplétive, que les professionnels appellent "caisse poubelle". Et le montant est astronomique: "Il y a plus de 13 milliards de francs dans cette caisse, répartis sur plus de 1,3 million de comptes. Donc cela concerne une grosse partie de la population", affirme Diego Rohner, le fondateur de Kala.ch, une application qui permet de retrouver ses avoirs LPP. Lancée il y a seulement quelques mois, la société reçoit déjà plus de 50 demandes par jour, précise le directeur.

Hormis la Caisse supplétive, dont le taux d'intérêt proche du 0 ne fait pas rêver, le marché global du libre passage représente environ 55 milliards de francs. "On estime que plus de 10 milliards de francs sont en train de venir s'ajouter sur les comptes de libres passage en raison des licenciements liés à la crise du Covid", note Diego Rohner.

Prendre le contrôle des capitaux

Près de 1700 compagnies se partagent ce marché en Suisse. Le directeur de l'une d'elles le confirme, "il y a clairement un afflux depuis la crise sanitaire, des flux qui partent des caisses de pension vers les fondations de libre passage", signale François Normand.

Le directeur de Lemania Pension hub précise avoir déjà ouvert environ 400 comptes de libre passage depuis le début de l'année. "Le défi des fondations de libre passage est d'accompagner des personnes qui sortent de leur caisse de pension, où ils n'avaient aucun choix. Maintenant, ils doivent prendre le contrôle de leurs capitaux retraite et choisir leur investissement. Il faut bien les accompagner", souligne François Normand.

Pour Anne-Sophie Tourrette, "le monde du libre passage est une jungle. Chaque offre sur le marché a des produits de placements différents et des frais différents. Mon rôle est d'aider les clients à trouver le meilleur rapport risque-rendement pour leur retraite", conclut-elle.

Philippe Lugassy, Feriel Mestiri

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