"Je reste très confiant que d’ici la fin du deuxième trimestre 2021, nous serons, rien que pour Moderna, à plus de 6 millions de doses livrées à la Confédération", annonce Dan Staner, directeur de Moderna pour l’Europe, les pays du Moyen-Orient et l’Afrique. Et d'ajouter: "Le pari de Moderna, pris il y a une année, de s’attaquer à un virus que personne ne connaissait, de réussir à monter deux chaînes de production et de livrer des millions de doses chaque mois, reste de l’ordre du miracle."
Dan Staner explique que son entreprise travaille "à flux tendu": "J'ai à l’heure actuelle zéro stock. Il est difficile pour moi de garder des stocks dans des frigos quelque part autour de l’Europe, alors qu’il y a des gens qui décèdent et qui souffrent de cette maladie. En travaillant à flux tendu, il est évident que s’il y a un petit problème, sans amortisseur, vous sentez le moindre caillou sur la route."
LE RÔLE DE LONZA A VIEGE (VS)
Le vice-président de Moderna indique que le site de Lonza à Viège (VS) doit permettre de fournir à Moderna le principe actif de son vaccin pour l'ensemble de la planète à l'exception des Etats-Unis. Trois lignes de productions doivent à terme tourner à plein régime. Mais pour l'heure, ce n'est pas encore le cas, comme l’a souligné vendredi Albert Baehny, président de Lonza, dans La Matinale.
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Elles seront les trois opérationnelles dans le courant du deuxième trimestre, offrant alors une capacité annuelle de 300 millions de doses de substance active, précise-t-il. "Il n’y a pas de retard par rapport au plan initial, c’est simplement une tâche énorme". Et Dan Staner d'abonder dans ce sens: "Chaque ligne de production nécessite entre 3 et 6 mois pour monter en puissance."
LA RÉPARTITION ENTRE LES PAYS
Le critère est "simple", selon Dan Staner. "Le premier venu, qui vient négocier, discuter et trouver un terrain d’entente sur les livraisons, nous l'inscrivons dans notre carnet de commandes. Si maintenant, vous me contactez, je vais regarder ce qu'il me reste comme disponibilité d'offres de vaccins avant d'engager des conversations. C'est la manière dont nous fonctionnons. Ce critère est transparent."
Ce n'est donc pas parce que l'usine Lonza est en Suisse que le pays a des avantages sur l'approvisionnement du vaccin Moderna, souligne Dan Staner.
DES PHARMAS "CUPIDES"?
Mercredi dans "L'Illustré", le professeur genevois Didier Pittet - qui a offert, avec son confrère William Griffiths, au monde le gel hydroalcoolique - déclarait: "La cupidité des pharmas est sans limites."
Dan Staner lui répond: "Ce que l'on voit aujourd'hui, c'est que ce n'est pas les grandes pharmas qui ont amené les premiers vaccins, mais des petites sociétés de biotechnologie comme BioNTech et Moderna. A Moderna, nous investissons depuis dix ans à fonds perdu chaque année dans la plateforme de l'ARN messager. Aujourd'hui, nous avons enfin le premier médicament qui sort. C'est donc l'aboutissement de dix ans de recherche."
Et d'ajouter: "Il est normal que nous devions faire un profit. Au niveau de la production, nous avons commencé en disant que nous pouvions fabriquer au niveau mondial 600 millions de doses. Nous avons continué à investir et nous sommes passés à 700 millions de doses, puis à 1 milliard de doses. Pour l'année prochaine, Moderna espère pouvoir livrer à la planète entre 1,4 et 1,8 milliard de doses."
D'ailleurs, Dan Staner rappelle que Moderna travaille avec des partenaires "pour ouvrir la production" et lui permettre de multiplier par quatre le premier chiffre de 600 millions de doses.
ESSAIS SUR LES ENFANTS
La semaine dernière, Moderna avaitr annoncé avoir commencé des essais de son propre vaccin contre le Covid-19 sur des milliers d'enfants.
"La décision de vacciner les enfants n'est pas de notre ressort. Nous sommes en train de travailler pour pouvoir vacciner toutes les populations. (...) Nous venons de terminer une étude sur 3000 adolescents de 12 ans à 17 ans. Le premier patient en dessous de 12 ans vient d'être vacciné dans le cadre d'une étude qui sera menée aux Etats-Unis et au Canada, et qui devra enrôler 7500 patients. Nous attendons un enregistrement de cette indication vers la fin de l'année. Les enfants et les femmes enceintes arrivent toujours après des études de toxicologie", annonce-t-il.
Et d'expliquer sur la sécurité du vaccin: "Notre vaccin a été testé sur plus de 30'000 personnes lors de la phase 3. Nous avons à l'heure actuelle plus de 50 millions de patients sains qui ont eu le vaccin Moderna. Nous travaillons main dans la main avec toutes les autorités sanitaires et réglementaires pour suivre au jour le jour toutes les indications de sécurité de notre vaccin."
Propos recueillis par Valérie Hauert
Adaptation web: Valentin Jordil