Sait-on d'où vient l'or que nous achetons? Finance-t-il des conflits armés en Afrique? Quand elles sont interpellées sur ces questions sensibles, la plupart des banques répondent qu'elles travaillent avec des raffineries certifiées, conformes aux standards internationaux, sans toutefois divulguer leur nom ou celui des autres acteurs de la chaîne d'approvisionnement, à commencer par les sociétés minières.
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L’acheteur d’or, qu'il soit sous forme de lingot ou de titre financier, n’a donc pas les moyens de s’assurer que le métal a été produit de manière responsable.
Raiffeisen pionnière
Dans ce contexte, les engagements pris par Raiffeisen et la Banque cantonale de Zurich (BCZ) sont salués par les ONG. Spécialiste des matières premières chez Swissaid, Marc Ummel estime que Raiffeisen en particulier fait oeuvre de pionnière. En effet, ses clients connaîtront les noms de toutes les parties prenantes lorsqu'ils achèteront de l’or à l'avenir.
"Pour le secteur bancaire, c’est nouveau, explique le spécialiste. Dans le domaine de l’horlogerie ou de la joaillerie, il y a certaines petites marques qui le font déjà, mais ça reste encore minime. Il y a encore énormément de choses qui doivent se développer pour que les acteurs de l’industrie de la joaillerie, de l'horlogerie ou des banques s’assurent vraiment que l’or qui arrive chez eux ne soit pas produit en violation des droits humains ou en portant atteinte à l’environnement."
Pour Marc Ummel, les pratiques vont de toute façon devoir encore évoluer en Suisse. Le Conseil fédéral a d'ailleurs ouvert aujourd'hui une consultation sur des dispositions d'exécution relatives aux nouveaux devoirs de diligence des entreprises, en particulier concernant les minerais de conflits.
Guillaume Meyer/iar
Origines douteuses
Il existe deux grandes catégories d'or importé en Suisse: l'or minier, qui provient de mines industrielles ou artisanales, et l'or recyclé, qui a déjà été affiné et utilisé. Il s’agit notamment de lingots bancaires. L'immense majorité (80%) de l'or recyclé mondial est affiné en Suisse.
C'est précisément l'or minier qui est parfois considéré comme problématique. Et particulièrement le minerai qui transite par Dubaï, fortement soupçonné de provenir en partie de mines artisanales africaines, qui peuvent être situées dans des zones de guerre, gérées par des milices armées, ou encore employer des enfants.
Depuis janvier dernier, les raffineurs suisses sont tenus de faire figurer si l'or qu'ils importent est extrait de mines ou s'il s'agit d'or bancaire ou recyclé. Cette mesure découle de la volonté du Secrétariat d'Etat à l'économie (SECO) de rendre le commerce autour de l'or plus transparent.
La nouvelle nomenclature devrait permettre de savoir précisément quelle quantité d'or importée provient des mines. Côté politique, l'initiative avait été plutôt bien accueillie. Pour Swissaid, cette mesure nécessaire ne constitue toutefois qu'une étape intermédiaire.