Les pénuries rencontrées dans presque tous les secteurs de l'économie ne sont "pas uniquement dues au Covid, mais beaucoup", explique Stéphane Garelli, professeur d'économie à l'IMD Lausanne, mardi dans La Matinale de la RTS.
Pratiquement toutes les matières premières, mais aussi les composants, comme les semi-conducteurs, sont concernés par la pénurie d'approvisionnement, causant d'importants retards et des surcoûts notamment dans la construction (voir encadré).
"Goulot d'étranglement"
"On est dans un goulot d'étranglement", car on a connu une explosion de la demande pendant l'été et les approvisionnements n'ont pas suivi. "Cela prend beaucoup plus de temps de remettre une usine en marche et de se réapprovisionner en matières premières", d'autant plus que le commerce maritime, par lequel transite 80% du commerce mondial, était à l'arrêt, développe le professeur. Et même quand les produits arrivent à quai, ce sont parfois les camionneurs qui manquent.
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A cela s'ajoute la fermeture de nombreuses usines produisant notamment des vêtements et des chaussures au Vietnam en raison du Covid. Le port de Ningbo en Chine, le troisième dans le monde en termes d'expédition, a aussi dû cesser ses activités pendant le mois d'août en raison de la découverte d'un foyer de la maladie.
En outre, le récent putsch en Guinée entraîne des problème avec la bauxite, qui est nécessaire à l'aluminium. Or 64% des importations européennes de bauxite viennent de la Guinée. Conséquence, le prix de l'aluminium a atteint lundi son plus haut niveau depuis 2008.
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Un enjeu géopolitique mondial
Le problème est aussi géopolitique. "Parmi les secteurs les plus problématiques, on peut citer les hautes technologies, avec les 17 terres rares dont nous dépendons depuis la Chine", rappelle Stéphane Garelli. Et la Russie est un des plus gros exportateurs de blé du monde. "On commence à dépendre de pays qui sont géopolitiquement importants et qui vont utiliser les matières premières comme arme politique", explique le professeur d'économie, qui cite encore l'exemple du gaz russe.
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Moins vite et plus cher
Cette situation de pénurie devrait durer jusqu'à l'été de l'année prochaine et il faut s'attendre à une augmentation des prix. Mais l'inflation devrait être limitée, car "après la fête de l'été" il y a un tassement de la demande en raison des craintes liées à une quatrième vague du Covid, analyse Stéphane Garelli.
La demande devrait connaître un tassement pendant l'automne pour se reporter sur les fêtes de fin d'année. Mais les produits seront probablement "moins là que d'habitude et plus chers que d'habitude", résume le professeur.
Pour faire face, les entreprises diversifient leur approvisionnement. C'est un "changement majeur dans les entreprises. La sécurité de l'approvisionnement et la sécurité tout court en matière de santé vont devenir une priorité, et plus seulement la vitesse et le coût", détaille Stéphane Garelli.
"C'est toute l'économie qui est en train de trouver une nouvelle manière de travailler, probablement un peu moins efficace et un plus cher que d'habitude", conclut l'économiste.
Propos recueillis par Romaine Morard
Adaptation web: Caryl Bussy
L'exemple de la construction
Les pénuries observées dans le monde touchent au premier chef le domaine de la construction, avec tout d'abord d'importants retards: il faut neuf mois pour construire une maison individuelle au lieu de 6 auparavant.
La facture finale est également plus élevée, d'environ 10%, selon le directeur de Home et Foyer Bernard Von Gunten. L'entreprise générale a notamment ajouté une réserve pour pandémie dans ses contrats.
Les problèmes d'approvisionnement concernent presque tous les domaines, dont le bois, l'acier, les cuisines, le carrelage, la peinture ou les fenêtres, avec des délais de livraisons qui ont doublé.