Malgré les critiques de "greenwashing", le succès des géants de la mode ne se dément pas
Zara, Mango ou encore H&M: ces marques connues dans le monde entier ont été vertement critiquées ces dernières années. En cause, leur bilan carbone ou encore les conditions de travail des ouvriers et ouvrières du textile.
Plusieurs entreprises semblent en tout cas avoir été sensibles aux critiques. L'an dernier, H&M a par exemple annoncé qu'elle renonçait au coton en provenance de la province chinoise du Xinjiang, sur fond d'accusations de travail forcé et de discrimination des minorités. Elle a aussi lancé sa marque durable et fait une grande partie de sa publicité sur son label "équitable".
Pour Stéphane Bonvin, consultant en mode, ces changements s'avéraient nécessaires pour ces marques. "Je pense qu'elles ont besoin de cela pour leur image (...). Une des raisons pour lesquelles elles continuent à fleurir, c'est justement parce qu'elles peuvent capter une partie du public attentif aux étiquettes", explique-t-il.
"Un modèle d'affaires pas remis en cause"
Autre son de cloche du côté de l'ONG Public Eye. Pour Géraldine Viret, sa responsable communication, "H&M qui fait du vert", c'est tout simplement antinomique.
"Ce qui est clair, c'est qu'il n'y a rien d'équitable ou de recyclable dans H&M. Si l'on regarde leur empreinte environnementale, leur attitude, on voit bien qu'ils mettent en place des lignes de vêtements qui représentent une part infime de leurs collections et où ils utilisent du coton bio et font quelques efforts (...) mais ils ne sont absolument pas en train de remettre en cause leur modèle d'affaires", dénonce-t-elle.
Le problème principal du modèle de la fast fashion est qu'il se base sur des collections qui se renouvellent en permanence. Les prix sont par ailleurs tellement bas qu'ils poussent les consommateurs à jeter pour racheter du neuf. Au final, les vêtements sont donc difficiles à recycler car ils ne sont tout simplement pas fait pour durer.
Décomplexion post-pandémie
Mais alors, comment expliquer ce succès - au moment où H&M par exemple vient de publier un bénéfice trimestriel qui dépasse son niveau d'avant la pandémie? La première raison tiendrait tout simplement à la période de privation que les consommateurs et consommatrices viennent de vivre, avec les multiples confinements et autres mesures liées à la pandémie.
"Jamais je n'ai eu l'impression de voir autant d'habits neufs sur des personnes dans le bus, dans la rue ou encore en vacances. C'était frappant cet été, et peut-être qu'on a eu une attitude moins raisonnable à la sortie du confinement, basé sur le fait de se faire plaisir de façon un peu décomplexée, d'être un petit peu moins attentifs à l'écologie", juge Stéphane Bonvin.
Si la pandémie de Covid-19 peut donc faire office d'explication ponctuelle, de manière plus générale, les consommateurs préoccupés par les questions environnementales existent bel et bien mais d'après Géraldine Viret, ils se sentent parfois un peu dépassés par l'ampleur de la tâche.
Une jeunesse divisée
"Ce sont des problèmes d'une telle ampleur qu'il est difficile de penser qu'on peut soi-même individuellement faire une différence et contribuer à changer le système, alors que c'est pourtant le cas (...) Schématiquement, on voit qu'on a une jeunesse assez divisée sur ces questions, avec d'un côté des activistes qui n'achètent que le minimum et de l'autre des personnes qui prennent l'avion pour une journée shopping dans une grande ville", détaille-t-elle.
Quoi qu'il en soit, les chiffres tendent à le prouver, les activistes du climat ne sont visiblement pas encore suffisants pour faire trembler les géants de la mode.
Arditë Shabani/ther