C'est un petit logo de 5 lettres et 5 couleurs qui fleurit sur les emballages des produits alimentaires. De A à E et de vert à rouge, il classe les produits en fonction de leur valeur nutritionnelle. Les industriels sont de plus en plus nombreux à l'adopter. En avril dernier, Migros a décidé de l'apposer sur tous les produits de sa marque. En juillet 2020, Aldi avait déjà été le premier distributeur à ajouter le nutri-score sur ses produits.
Le nutri-score attribue une note aux produits en fonction de leur teneur en nutriments favorables (fibres, protéines, fruits et légumes, etc.) et nutriments défavorables (calories, acides gras, sucre ou encore sel). Après calcul, le score obtenu par un produit permet de lui attribuer une lettre et une couleur, du produit le plus favorable sur le plan nutritionnel classé A, au produit le moins favorable, classé E.
Chasser le naturel
Ce mode de calcul ne prend pas en compte tous les éléments qui composent un aliment: les colorants, additifs et exhausteurs de goût sont par exemple écartés. C'est ce qui inquiète les producteurs de gruyère AOP. Si le nutri-score leur était imposé, le gruyère se verrait attribuer la note de C ou D.
Et pour cause, pour bénéficier du fameux label, le gruyère doit contenir au moins 49% de matières grasses. "Ce qui ne va pas avec le nutri-score, c'est qu'il ne tient pas compte d'un produit naturel, qui correspond à une tradition à travers les siècles et qui n'a jamais posé de problème de santé publique. Ça fait 900 ans qu'on produit du gruyère comme ça et personne n'est tombé malade!" s'agace Philippe Bardet, président de l'Interprofession du gruyère AOP.
Influence sur les ventes
Si l'Union européenne rend le nutri-score obligatoire, les producteurs craignent une baisse des ventes de fromages et autres produits labellisés AOP. En France, de nombreuses études ont en effet montré que les ventes des produits bénéficiant du nutri-score avaient augmenté plus vite que celles des produits non étiquetés; et "deux fois plus vite pour les produits notés A", selon la Fédération romande des consommateurs (FRC).
De nombreux nutritionnistes et diététiciens alertent pourtant le consommateur et lui conseillent d'adapter les portions à ses activités et son profil. "Un yogourt noté A n'est pas forcément mangeable sans modération et ne va pas pouvoir remplacer un plat équilibré contenant des féculents, des protéines et une source de légumes. Il faut regarder étage par étage la pyramide alimentaire et tenir compte du rassasiement alimentaire", précise notamment Sandrine Lasserre, diététicienne à Genève.
En Europe, la France et l'Allemagne ont déjà massivement adopté le nutriscore. L'Italie, pays européen qui compte le plus de produits labellisés AOP et IGP, y est fermement opposée. Avec six autres pays de l'Union, elle mène une fronde pour freiner la généralisation de cette notation.
Charlotte Onfroy-Barrier