Depuis quelques semaines, le plein d'essence vidange le porte-monnaie des automobilistes. Le prix à la pompe a grimpé à des niveaux inédits depuis 2012. En cause, notamment, la forte demande de pétrole, stimulée par la reprise économique. Au niveau mondial, les commandes sont revenues à leur niveau d'avant la pandémie de Covid, soit près de 100 millions de barils par jour. La reprise du trafic aérien à venir devrait encore en rajouter quelques millions supplémentaires.
A cette forte demande s'ajoutent quelques facteurs géopolitiques et des problèmes sur la chaîne d'approvisionnement qui exercent une pression sur les prix.
Le prix du baril de Brent frôlait les 89 dollars jeudi en fin de journée. Mais tous les facteurs sont réunis pour prédire la poursuite à la hausse sur le moyen terme.
En bout de chaîne, le prix du litre à la pompe en Suisse coûte en moyenne 1,79 franc, selon un relevé du TCS. Soit une hausse rapide du prix, qui inverse la courbe amorcée début 2020: "Après le début de la pandémie en 2020, on a eu une chute de 20 à 25% de la demande en l’espace de quelques semaines. Ensuite, la demande a repris de façon très forte, parce que l'économie a redémarré. Notre économie fonctionne sur les énergies fossiles, donc le pétrole a suivi cette tendance", explique Malik Zetchi, analyste financier chez Pictet Wealth Management.
Répercussion des prix
Pour la société de transport Safram, spécialisée dans le transport des marchandises dangereuses, cette charge incompressible représente une part non négligeable du budget. Avec 300 véhicules sur les routes de l'Irlande à la Turquie, la hausse du prix à la pompe se fait ressentir. Mais son directeur Christophe Hottelier ne se dit pas inquiet pour autant.
"Au fil des années, on s'est habitué à vivre avec ces fluctuations des prix. On a des mécanismes avec nos clients pour justement répercuter ces hausses et ces baisses. Si le prix augmente de 10 centimes, on augmente nos prix de 1%, et vice-versa", explique-t-il.
Mais pour la plupart des consommateurs et consommatrices, qui payaient encore 1,40 franc le litre il y a quelques mois, la différence est de taille.
Opportunité pour une transition
Pour voir le verre à moitié plein, cette facture peut représenter une opportunité rêvée pour encourager la transition énergétique. "Cette transition énergétique dont tout le monde parle met du temps à se manifester dans les chiffres. Clairement, les prix du pétrole plus élevés permettront de changer le comportement du consommateur. Et ça, c'est quelque chose de relativement positif", note Malik Zetchi.
Pour l'analyste financier, le prix arrive à un niveau suffisamment élevé pour que le consommateur et l'économie réagissent. "La zone est orange, mais pas encore rouge", souligne l'expert.
D'autant qu'il n'y a pas que le prix du pétrole qui flambe. Les prix du gaz et du charbon atteignent également des niveaux record. "C'est l'une des leçons que nous avons apprises de cette crise, nous sommes bien plus dépendants des énergies fossiles que nous ne le pensions auparavant. Et cette situation de crise va encore perdurer dans le court et moyen terme", prédit Malik Zetchi.
Delphine Gianora / Feriel Mestiri
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