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La numérisation de l'agriculture ne profite pas forcément aux agriculteurs

L'agriculture subi elle aussi une dynamique de numérisation (image d'illustration).
Digitalisation de l’agriculture: le bonheur numérique est-il dans le pré? / Le 12h30 / 1 min. / le 15 février 2022
Les outils informatiques censés optimiser l'agriculture profiteraient surtout à d'autres acteurs, selon une enquête menée en Suisse par la faculté d'ethnologie de l'Université de Neuchâtel (UniNe). Celle-ci s'est intéressée aux activités administratives des exploitations agricoles.

Les agriculteurs et agricultrices helvétiques profitent-ils réellement de la numérisation de leur profession? La réponse est non, selon un groupe pluridisciplinaire de l'Université de Neuchâtel. D'après ses conclusions, ce sont d'autres secteurs comme l'administration, les organes de certification ou encore certaines entreprises qui en retirent le plus de bénéfices.

La numérisation de l’agriculture est majoritairement présentée par le prisme de ses manifestations les plus spectaculaires, comme les machines connectées ou l'intelligence artificielle. "Or, ces exemples cachent souvent une autre forme de numérisation plus ordinaire: celle des outils informatiques liés aux activités administratives d'une exploitation", écrit mardi l'UniNe dans un communiqué.

Ces outils servent par exemple à vérifier que les paiements directs sont bien utilisés ou que les règles liées aux labels sont respectées.

Une réalité loin des beaux discours

"Malgré certains discours présentant la numérisation comme un moyen d'aider à la gestion autonome de l'activité agricole, notre analyse révèle une image plus nuancée", explique l'auteur de l'étude Jérémie Forney, cité dans le communiqué. "A l'heure actuelle, la numérisation renforce l'approche bureaucratique de la gouvernance et la contribution des technologies numériques aux intérêts des agriculteurs eux-mêmes reste minime", note-t-il.

Interrogé dans le journal de 12h30, l'anthropologue précise que ces solutions sont présentées pour simplifier la vie administrative des agriculteurs, "c'est avant tout les besoins et les intérêts des autres acteurs de cette gouvernance de l'agriculture qui sont prioritaires". Il évoque notamment l'intérêt des administrations de simplifier leurs propres bureaucraties, ou encore celui de certaines entreprises d'accumuler des données.

Un colloque ouvert au public se tient mardi et mercredi à l'UniNe sur le thème de la digitalisation du secteur agricole.

rb/jop

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Étude basée sur des entretiens

Ces conclusions résultent d’une série de 23 entretiens menés auprès des différents acteurs de la numérisation du secteur agricole du pays, allant des paysans et paysannes jusqu’aux fournisseurs de semences, en passant par les administrations et les organismes de certification (IP-Suisse, Biosuisse, p. ex.).

Ces entretiens ont été associés à l’analyse d’un corpus de documents et à une série d’observations réalisées lors d’événements en lien avec la thématique.