Des centaines de citoyens russes ont leurs comptes gelés dans les banques suisses, selon une liste du Secrétariat d'Etat à l'économie (Seco). Ils ne peuvent plus déposer ou sortir de l'argent, ni même effectuer une transaction. La plupart des personnes frappées par ces sanctions sont des proches du président russe Vladimir Poutine, des ministres, des membres de la Douma ou des oligarques. Pas moins de 57 entreprises sont ciblées et la liste s'allonge de jour en jour.
Pour la place financière suisse et celle de Genève, la clientèle russe est importante. Il a donc fallu s'adapter: "Les banques ont dû mobiliser leurs équipes, notamment de compliance, pour déterminer si, parmi leur clientèle, figurent des personnes sur la liste des sanctions. Cela demande un énorme travail d'analyse des bases de données", précise Edouard Cuendet, le directeur de la Fondation Genève place financière.
Il n'existe pas de statistique précise, mais selon les estimations hautes effectuées par la NZZ, la clientèle russe détiendrait le 5% des avoirs gérés en Suisse, soit quelque 150 milliards de francs. La somme totale des avoirs gelés pourrait atteindre plusieurs dizaines de milliards de francs.
Malgré de nombreuses sollicitations, aucun banquier n'a souhaité déclarer combien de comptes ont été gelés, ni pour quel montant.
Personae non gratae
Un autre volet des sanctions oblige les banques à déclarer tout dépôt de plus de 100'000 francs existants des clients russes ne résidant pas en Suisse. Les banques devront par ailleurs refuser l'apport de nouvelles liquidités supérieures à 100'000 francs.
Selon Milena Assenova, gestionnaire de fortune chez MA Advisory SA, "la clientèle russe a toujours représenté un plus grand risque par rapport à la clientèle européenne. Avec les sanctions aujourd'hui, tous les établissements financiers leur ferment la porte".
Même s'il leur est permis d'ouvrir un compte à moins de 100'000 francs, "beaucoup de banques refusent d'entrer en matière avec des Russes", assure la gestionnaire spécialisée dans la clientèle de l'Europe de l'Est.
A la difficulté pour les banques d'identifier l'origine des fonds s'ajoute les sanctions qui touchent la clientèle russe. La place bancaire suisse risque donc elle aussi de laisser quelques plumes dans cette guerre en Ukraine.
Philippe Lugassy / fme