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Il est difficile de louer une voiture cet été en Suisse et les prix s'envolent

La pénurie et une forte demande font grimper les prix des voitures de location
La pénurie et une forte demande font grimper les prix des voitures de location / 19h30 / 2 min. / le 18 juillet 2022
Les loueurs de voitures vivent une crise sans précédent dans toute l'Europe et la Suisse n'est plus épargnée. Les véhicules disponibles manquent en raison de pénuries dans la construction automobile, au moment où les touristes affluent. Les clients "last minute" doivent débourser des sommes inédites.

"On n'a jamais vu ça, c'est hors de prix", affirme lundi dans le 19h30 de la RTS Sara Sekkate, une employée de l'entreprise de location de voiture Enterprise, à l'aéroport de Genève.

Cette année, la hausse estivale des prix dépasse toutes les précédentes. Selon l'Indice suisse des prix à la consommation, le prix pour une location de véhicule a augmenté de 86,8% au mois de juin par rapport à l'an dernier. Si le renchérissement est global (+3,4%), la location de voitures enregistre la plus forte variation, derrière le mazout (+88%).

Le jour de notre visite au guichet Enterprise de l'aéroport, un client qui n'avait pas réservé son véhicule à l'avance devait débourser au minimum 500 francs la journée pour une petite voiture, sans les assurances complètes. "Plus tôt vous vous y prenez, mieux ce sera", affirme Jérémie Zanna, un autre employé de l'enseigne.

En recherchant une voiture (catégorie petite) pour un week-end prolongé à la fin juillet (date du vendredi 29 au dimanche 31 juillet, choisie au hasard, à titre d'exemple), les prix varient de 335 francs chez Enterprise à 577 francs chez Avis, selon une comparaison effectuée auprès des six grands groupes de location situés à Genève Aéroport.

Les loueurs obligés de vendre

Cette hausse exceptionnelle des prix trouve son origine en été 2020. Après quelques mois de pandémie et d'arrêt quasi total du tourisme, les entreprises de location limitent leurs pertes en réduisant leur parc automobile.

Selon le Service des automobiles du canton d'Appenzell Rhodes-Interieur, qui immatricule environ 80% des voitures de location du pays, le nombre des voitures de location enregistrées dans le canton a chuté de 14'083 en 2019 à 8826 en 2020, soit une réduction de 37%.

Ce chiffre a toutefois augmenté à nouveau. "Nous avons actuellement un parc de véhicules de location d'environ 12'800 voitures de tourisme et sommes donc encore en dessous des effectifs d'avant le coronavirus", indique Michael Lanker, le responsable du service.

Après le retour des touristes, la pénurie de puces

Aujourd'hui, les loueurs de voitures aimeraient renouveler leur flotte pour répondre à la demande des touristes, qui affluent à nouveau depuis la fin des mesures sanitaires, notamment en provenance des Etats-Unis et du Canada. Mais ils se trouvent confrontés à des retards de production du secteur automobile, apparus en raison de pénuries de certains composants depuis le début de la pandémie, notamment des puces électroniques.

"Aujourd'hui, il n'y a pas de voiture disponible pour le canal de location. Ce n'est pas comme un particulier, qui achète une voiture sur commande avec un délai de livraison. Les loueurs achètent généralement de grandes quantités à prix réduits aux constructeurs, qui utilisent les loueurs en tant que canal de marketing. Mais en ce moment, ils n'ont pas besoin des loueurs pour mettre leurs voitures sur les routes", précise Hendrik Lütjens, président de l'Association suisse des loueurs d'automobiles et directeur d'Europcar en Suisse.

Autre facteur expliquant la hausse des prix, les coûts d'entretien des véhicules de location ont pris l'ascenseur: "Normalement, nous gardions les voitures de location durant 6 à 9 mois. Aujourd'hui, nous avons beaucoup de voitures qui sont dans nos flottes depuis plus de 12 mois, ce qui entraîne des coûts supplémentaires pour les révisions ou les réparations, que nous n'avions pas d'habitude", ajoute Hendrik Lütjens.

Augmentation durable des prix

Mêmes explications chez Sixt, qui affirme que les nouvelles immatriculations en Europe sont à leur plus bas niveau depuis trente-deux ans. Selon le loueur, qui a été contraint de fermer plusieurs bureaux en Suisse durant la pandémie, la hausse des prix liée à la pénurie pourrait être durable: "Le chiffre d'affaires par véhicule des grands fournisseurs internationaux n'a augmenté que d'environ 15% en moyenne entre 2019 et 2021. Il s'agit plutôt d'un alignement du niveau des prix par rapport à d'autres prix touristiques qui ont augmenté de manière bien plus importante. Sixt part du principe que le niveau des prix est dû à un effet de rattrapage général dans le secteur et présente donc un caractère à long terme", écrit un porte-parole.

Le malheur des uns faisant le bonheur des autres, les alternatives à la location de voitures tirent les bénéfices de cette crise. Même s'il est impossible pour l'heure d'établir un lien de cause à effet, les CFF n'ont jamais vu autant de réservations de billets Interrail.

Mobility Car sharing, l'entreprise basée sur l'autopartage des voitures, a constaté elle une augmentation de 50% des réservations longues durées en juillet et août par rapport à l'année passée. "Il est possible qu’une partie de cette augmentation soit due aux changements dans les habitudes de voyages dus à la pandémie mais également à la pénurie de voitures de location ainsi qu'à l’augmentation des tarifs de ceux-ci", conclut Stéphanie Gonzalez, la porte-parole pour la Suisse romande.

Feriel Mestiri

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