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Stéphane Garelli: "Je ne crois pas au black-out cet hiver en Suisse"

L'invité de La Matinale (vidéo) - Stéphane Garelli, professeur d’économie
L'invité de La Matinale (vidéo) - Stéphane Garelli, professeur d’économie / La Matinale / 13 min. / le 19 août 2022
Alors que certains experts agitent le spectre de la pénurie d'électricité en Suisse, l'économiste Stéphane Garelli se dit sceptique quant à un possible black-out cet hiver. Selon lui, des alternatives existent et pourront être mises en place pour éviter cette situation.

Le spectre d'une pénurie d'électricité cet hiver fait couler beaucoup d'encre et agite la sphère politique et le secteur de l'énergie depuis le début de l'été. Si rien n'indique clairement, pour l'heure, qu'il faille céder à l'alarmisme, les appels à économiser de l'énergie se multiplient.

A la Confédération aussi, la possibilité d'une pénurie préoccupe. Selon le président de la Commission fédérale de l'électricité, des coupures d'électricité de plusieurs heures sont à prévoir cet hiver. Stéphane Genoud, professeur en management de l'énergie à la HES-SO Valais, estimait lui cette semaine dans La Matinale que des coupures alternées entre les régions étaient envisageables pour éviter une pénurie dans l'ensemble du pays.

>> Lire aussi : Il faut s'attendre à des coupures d'électricité cet hiver, prévient une commission fédérale et Stéphane Genoud: "Pour éviter un black-out total, il faudra peut-être couper en alternance Lausanne et Genève"

Pour Stéphane Garelli, professeur d'économie à l'IMD Lausanne, il n'y a toutefois pas matière à s'inquiéter. "Je trouve cela absurde de dire que l'on va couper l'électricité pendant quatre heures dans une ville. Je ne crois pas au black-out", a-t-il déclaré vendredi au micro de La Matinale.

La Suisse va, selon lui, plutôt adopter des mesures telles que l'interdiction de l'illumination des magasins ou des villes la nuit ou instaurer des dimanches sans voitures comme cela a pu être fait par le passé. "Il y a plein de possibilités plutôt que de couper toute l'électricité", a affirmé l'économiste. Il a également souligné le caractère responsable de la population helvétique: "Si on lui dit d'économiser de l'énergie, elle le fera."

Une récession "douce" possible

Malgré la hausse des prix de l'énergie, le renchérissement en Suisse demeure relativement faible en comparaison internationale. Selon les dernières prévisions du Secrétariat d'Etat à l'économie (SECO) et des analystes, le pays ne devrait pas connaître une forte récession.

Mais les indicateurs sont flous, voire se contredisent, indique Stéphane Garelli. Pour lui, la possibilité qu'une récession "douce" ait lieu en Europe est probable. "Aujourd'hui, nous entrons dans un monde beaucoup plus fracturé qu'auparavant. La situation a changé: nous sommes en train de créer de l'inflation dans le système même. Ce phénomène va nous accompagner pendant longtemps", a avancé le professeur.

>> Lire aussi : L'impact économique d'une pénurie d'électricité n'est pas précisément étudié en Suisse

Si elle arrive, cette récession, même douce, profitera aux entreprises pouvant facilement absorber des augmentations de prix, comme les sociétés de luxe, ainsi qu'à celles qui sont liées au commerce de l'énergie, explique Stéphane Garelli.

Le gouvernement doit aider les ménages fragiles

Face au renchérissement de l'énergie, les perspectives économiques pour les ménages fragiles qui n'ont pas d'épargne ne sont en revanche pas réjouissantes, a pointé l'économiste.

"L'électricité, le chauffage, ce sont des coûts impossibles à éviter", a-t-il rappelé. Il estime que la solution doit venir des gouvernements, qui doivent prendre "des mesures ciblées" pour aider financièrement ces ménages.

Quant aux entreprises, "nous ne sommes pas encore à un stade où elles ont besoin d'aide. Elles s'adapteront", a affirmé l'économiste, qui a vanté la résilience de la Suisse, "pays le plus économiquement diversifié au monde".

Des négociations salariales sont par ailleurs à prévoir cet automne, notamment pour les bas salaires, estime Stéphane Garelli, partageant ainsi l'hypothèse des syndicats selon laquelle si les employeurs n'augmentent pas les salaires, des troubles sociaux et politiques auront lieu.

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Propos recueillis par Aleksandra Planinic/iar

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Groupe E veut "agir dès maintenant" pour éviter la pénurie

Le directeur général du réseau électrique Groupe E estime qu'une réduction de la consommation énergétique est indispensable en Suisse pour éviter une pénurie d'énergie. Le groupe énergétique a déjà commencé à préparer tous les scénarios.

"Il ne faut pas tomber dans l'alarmisme", tempère Jacques Mauron vendredi devant la presse. Le directeur général de Groupe E - qui alimente les cantons de Fribourg et Neuchâtel, ainsi qu'une partie de Vaud - explique collaborer étroitement avec l’Organisation pour l’approvisionnement en électricité en cas de crise et l'Association suisse de l’industrie gazière.

Il se prépare à la mise en oeuvre d'éventuelles mesures restrictives décidées par la Confédération. Celles-ci s'appliquent sous la forme de quatre paliers pour l'électricité et trois pour le gaz: elles vont du simple appel à réduire la consommation jusqu'à des coupures ponctuelles d'électricité.

"En cas de délestage, c'est une situation très dure qui nous attend avec un possible risque de coupure des télécommunications, mais aussi la possibilité que certaines communes ne puissent pas assurer leur approvisionnement", alerte Groupe E.

"Tout ce qu'on fait dès maintenant à un impact sur l'hiver prochain", selon Jacques Mauron. Groupe E va accompagner sa clientèle pour l'aider à se préparer à de possibles restrictions. La firme a mis en ligne sur son site internet des conseils pour économiser l'énergie. (ats)