L'obligation d'installer des panneaux solaires existe dans 19 cantons, mais uniquement pour les nouvelles constructions. Désormais, les 26 cantons font un pas supplémentaire. Fin août, la Conférence des directeurs cantonaux de l'énergie a adopté à l'unanimité le document "Politique du bâtiment 2050+", qui dicte les principes stratégiques de la politique énergétique et climatique à venir.
Parmi les mesures approuvées, ce sont non seulement les nouveaux bâtiments, mais aussi les bâtiments existants qui devront s'approvisionner "dans une proportion adéquate avec de l'électricité renouvelable produite sur place", peut-on lire dans le rapport. Des incitations soutiendront une utilisation plus poussée du photovoltaïque sur les surfaces du bâtiment.
Ce principe servirait de base pour la suite des travaux. Les cantons doivent encore édicter les prescriptions juridiques pour le mettre en oeuvre.
Plus 500 mégawatts par an
L'association professionnelle Swissolar s'en réjouit. Selon son directeur David Stickelberger, qui s'exprimait dans les colonnes du TagesAnzeiger lundi, l'obligation d'installations photovoltaïques pour les bâtiments existants représenterait une part importante du développement de l'énergie solaire et pourrait fournir 500 mégawatts par an, selon ses estimations.
L'obligation d'installations solaires viendrait ainsi muscler l'explosion du marché des installations solaires déclenchée depuis le début de la guerre en Ukraine.
Khalid Belgmimi, directeur général de PrimeEnergy, dit avoir triplé son effectif depuis le début de l'année et prévoit déjà de doubler son chiffre d'affaires l'an prochain. "Malheureusement, on est un peu les bénéficiaires heureux de cette crise énergétique, mais sans se réjouir." Pour autant, il aurait préféré des mesures incitatives, plutôt qu'une obligation.
L'obligation "nécessaire" et "raisonnable"
Au niveau politique, l'incitation met en effet tout le monde d'accord. C'est l'obligation qui fait le plus débat. La gauche est plutôt pour. Selon la Verte genevoise Isabelle Pasquier-Eichenberger, "la situation actuelle de pénurie et de crise au niveau européen montre qu'il est nécessaire d'aller rapidement dans cette direction".
Le socialiste vaudois Roger Nordmann estime quant à lui raisonnable l'obligation de mettre des panneaux solaires "quand on construit un nouveau bâtiment ou qu'on refait le toit. A ce moment-là, on a de toute façon l'échafaudage, donc les surcoûts de mettre du solaire à la place d'autres choses sont minimes."
"Atteinte au droit"
L'association des propriétaires fonciers dénonce une atteinte au droit. Une critique que soutient également le PLR vaudois Olivier Feller: "Je suis opposé à l'obligation décrétée par la Confédération et je suis favorable à une neutralité technologique. Ce qui compte aujourd'hui, c'est de pouvoir produire de l'énergie de façon renouvelable. Et pour cela, il y a certes le solaire et le photovoltaïque, mais il y a également d'autres méthodes, comme les pellets de bois ou les réseaux de chauffages à distance."
L'avis d'Olivier Feller n'est toutefois pas unanime au sein de son parti. Jacqueline de Quattro considère l'idée "bonne": "Si nous voulons garder notre souveraineté énergétique et rester approvisionnés, il va falloir faire un certain nombre de sacrifices. Cela signifie accepter des éoliennes même si on les voit; accepter un barrage même s'il y a des mouches qui pourraient être touchées; et aussi des panneaux photovoltaïques sur le toit du voisin et sur le nôtre. Mais on ne peut pas exiger d'un couple de rentiers qu'il couvre son toit intégralement, sans soutien financier."
Les subventions actuelles en tout cas ont suffi au directeur de PrimeEnergy pour tourner à plein régime, sans aucune obligation. Et aujourd'hui, Khalid Belgmimi sait qu'il va devoir augmenter encore la cadence face à l'évolution d'un secteur qu'il anticipe exponentielle.
Pascal Jeannerat, Feriel Mestiri