Le Farinet, l'Epi ou encore le Bonobo sont des monnaies locales qui n'auront tenu que quelques années. A contrario, l'Abeille, créée fin 2019, tire son épingle du jeu. Les autorités communales ont rapidement pris part au projet et ont fait le choix stratégique de renoncer à l'argent liquide. La monnaie existe donc uniquement sous forme de carte, avec un avoir à dépenser dans une centaine de commerces locaux.
"Dès le départ, on a travaillé avec les commerçants pour savoir quel système ils voulaient. On a commencé avec 90 commerçants et maintenant on en a 114. On a aussi collaboré avec des entreprises qui ont promis d'acheter un certain nombre de cartes Abeille à donner à leurs collaborateurs la première année", a précisé le conseiller communal Théo Huguenin-Elie mercredi dans La Matinale de la RTS.
3 millions de francs chargés en Abeille
Près de 3 millions de francs ont été chargés en Abeille et 70'000 francs sont dépensés en moyenne chaque mois auprès des 114 commerçants locaux, selon Nancy Kaenel Rossel, chargée de projet au marketing urbain. "On a la chance d'avoir des entreprises qui nous soutiennent et offrent régulièrement de la monnaie locale à leurs collaborateurs et qui soutiennent régulièrement la monnaie locale", ajoute-t-elle.
Confrontés au e-commerce et au tourisme d'achat, les commerçants saluent ce soutien. Brigitte Leitenberg, présidente de l'Association des commerces indépendants de détail de La Chaux-de-Fonds, raconte que "la carte Abeille a permis d'animer la ville parce que ses détenteurs peuvent consommer dans les commerces, mais également participer à la vie sportive et culturelle de la ville".
Le digital, "une étape importante"
L'Abeille franchit donc une nouvelle étape avec une application et une carte modernisée pour encore plus de simplicité. Ces outils ont été développés avec deux entreprises chaux-de-fonnières. Pour Virgile Perret, de l'Observatoire de la finance à Genève, il est difficile de passer au digital, mais celle-ci reste une étape importante.
"Ce n'est pas facile à entreprendre parce que ça engendre des coûts et c'est relativement complexe. Mais je pense que c'est un effort qui vaut la peine d'être entrepris. C'est important pour faciliter l'usage de ces monnaies locales, pour toucher aussi une population plus jeune et pour étendre l'utilisation de ces monnaies à de nouveaux territoires. Eventuellement aussi pour augmenter le volume des transactions, et donc pour mieux s'intégrer dans l'écosystème des paiements", souligne-t-il.
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Propos recueillis par Deborah Sohlbank
Adaptation web: Andreia Portinha Saraiva
Les monnaies locales ont besoin de soutien politique
A Genève, le Léman a été créé en 2015 et, pour son fondateur et co-président Antonin Calderon, si la numérisation est une étape incontournable, il constate que le soutien politique est également indispensable au bon développement des monnaies locales.
"Le soutien politique permet aux monnaies locales de changer d'échelle et de gagner de la crédibilité. Mais il faut qu'elles restent en dehors des enjeux partisans", explique-t-il.