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Thierry Mauvernay: "Il faut de nouvelles entreprises qui pensent différemment"

L'invité de La Matinale (vidéo) - Thierry Mauvernay, investisseur et président du groupe biotechnologique Debiopharm
L'invité de La Matinale (vidéo) - Thierry Mauvernay, investisseur et président du groupe biotechnologique Debiopharm / L'invité-e de La Matinale (en vidéo) / 12 min. / le 28 octobre 2022
Le président de la société romande Debiopharm Thierry Mauvernay vient de publier "Ecouter et oser pour entreprendre avec succès", aux éditions Le Cherche Midi. Il encourage les jeunes à se lancer dans la création d'entreprises et à "dédramatiser" les risques, donc à en prendre.

Invité vendredi de la Matinale de la RTS, Thierry Mauvernay dit vouloir transmettre deux choses: sa passion pour l'entrepreneuriat et son expérience.

"On a deux fonds [d'investissement] avec près de 500 nouvelles entreprises par an. Je vois beaucoup de jeunes entrepreneurs qui ont plein de rêves et c'est magnifique. Il faut avoir des rêves", lance le patron de la société Debiopharm, spécialisée dans les formes rares de cancer et les maladies infectieuses.

Il faut d'abord penser au client, et après on adapte la technologie.

Thierry Mauvernay

"Malheureusement", déplore-t-il dans la foulée, "ils n'envisagent jamais l'échec. Or l'échec est un peu le parallèle de la création d'entreprises".

Et les jeunes entrepreneurs pensent essentiellement aux technologies, pas suffisamment aux clients. "Ils sont tellement sûrs que leurs technologies vont les emmener loin qu'ils pensent que les clients vont être automatiquement amoureux de ces technologies", remarque ce passionné. "Or ce n'est pas le cas. Il faut d'abord penser au client, et après on adapte la technologie."

Un écart ténu entre le succès et l'échec

Thierry Mauvernay écrit dans son ouvrage que "le succès est souvent tellement près de l’échec qu’il ne faut ni trop encenser l’un, ni trop blâmer l’autre". C’est une sorte de livre sur l’équilibrisme de l'entrepreneur entre le rêve et le réalisme.

"J'ai trop vu ça", explique-t-il. "Quand vous avez un succès, tout le monde vous dit que vous êtes magnifique. Et quand vous avez un échec, on vous délaisse complètement. Mais la différence entre le succès et l'échec est très mince."

Dans la période de crise actuelle, faite d'instabilité et d'inflation, l'innovation est difficile, reconnaît aussi le patron de Debiopharm. Du reste, et même si beaucoup de classements placent la Suisse en tête de l'innovation, il ne pense pas que ce soit le cas.

Essayons de dédramatiser le risque, ça me paraît très important.

Thierry Mauvernay

"Beaucoup de brevets sont déposés en Suisse par rapport au nombre d'habitants, mais souvent la recherche ne vient pas d'ici. Elle vient de la Silicon Valley, de Boston, de différents pays mais les brevets sont déposés en Suisse", souligne Thierry Mauvernay. "En Suisse, on est plutôt un peuple d'ingénieurs (…) On n'ose pas trop prendre des risques. Et le jeune entrepreneur non plus. D'autre part, ce jeune entrepreneur aime le confort. Essayons de dédramatiser le risque, ça me paraît très important."

C'est à l'Etat d'être à la manœuvre et de prendre les décisions.

Thierry Mauvernay

L'urgence de promouvoir l'entrepreuneriat

Et pour faire bouger les choses, il faut changer un peu les mentalités, juge cet entrepreneur, citant en exemple la Corée du Sud, qui a su prendre le virage. "Le futur va de plus en plus vite et il nous faut de nouvelles entreprises qui vont penser différemment", souligne-t-il. "La Suisse peut le faire. Elle a des universités extraordinaires, des grands groupes extraordinaires, mais c'est le pont entre les deux qui n'est pas fait."

Et c'est à l'Etat de prendre les choses en mains, estime le président du groupe basé à Lausanne et à Martigny. "C'est lui qui va être à la manœuvre, prendre les décisions politiques. Et il y aura aussi toute une éducation à faire."

Selon une enquête de la Haute école de gestion de Fribourg, un peu plus de 7% de la population suisse en âge de travailler souhaite lancer son entreprise. "Ce n'est pas beaucoup, on est loin du compte", remarque Thierry Mauvernay. "Et il faut vraiment promouvoir l'entrepreuneriat".

Propos recueillis par Frédéric Mamaïs/oang

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