Une fois par mois, Marc Bettex, responsable d'exploitation de la Fromagerie Le Grand Pré, à Moudon (VD), apporte sa production de fromages à pâte molle à l'Agence régionale pour la qualité et l'hygiène alimentaire (ARQHA). Dans ce laboratoire, des milliers de produits laitiers, qui seront vendus en grande surface, sont analysés. L'objectif du fromager est de fixer une date limite de consommation (DLC) sur ses produits.
"Pour les fromages frais, on analyse les bactéries colis et staphs. Sur les fromages affinés, ce sont les listerias et les salmonelles qui sont examinés", explique le conseiller technique en fromagerie à l'ARQHA, Nicolas Genoud.
Selon le nombre de bactéries présentes naturellement dans le fromage, sa teneur en eau, le type de lait utilisé et le processus de fabrication, la date limite de consommation varie de 30 à 90 jours.
Se fier à nos sens
Pour le conseiller technique en fromagerie à l'ARQHA, Nicolas Genoud, certains produits peuvent pourtant être consommés bien après la date limite: "Bactériologiquement, le risque est minime si on parle d'un beurre, d'un fromage à pâte molle ou thermisé. Par contre, si on prend un lait pasteurisé, le risque est plus élevé parce qu'il y a encore tout le lactose à l'intérieur. C'est un produit qui pourrait fermenter".
Pour ne prendre aucun risque, il conseille de se fier à nos sens. "Si c'est un yogourt, on regarde si le produit est gonflé et s'il a des moisissures à l'intérieur. Si ce n'est pas le cas, il peut être consommé sans problème, même 15 jours après la date limite de consommation."
Pourquoi, dès lors, ne pas repousser la date inscrite sur l'emballage? Trop risqué, estime le fromager Marc Bettex: "C'est quand même un produit vivant. Si quelqu'un tombe malade, qui sera le responsable? Donc il faut se protéger avec une date limite de consommation", souligne-t-il.
La Suisse, 10e gaspilleur au monde
Entre le risque pour la santé et la volonté d'éviter le gaspillage, il est difficile de s'y retrouver. Et le consommateur suisse en particulier, puisque le pays fait figure de mauvais élève. Selon un rapport de l'ONU sur le gaspillage alimentaire, la Suisse pointerait au 10e rang mondial, avec 90 kilos de nourriture par habitant jetés chaque année, devant la France (85 kg), l'Allemagne (75 kg), l'Italie (67 kg) ou les Etats-Unis (59 kg).
En cause, le fait qu'on achète des produits en trop grande quantité, que les produits sont mal conservés, qu'ils ne sont pas mangés à temps ou parce qu'on sert des portions trop grandes.
Les produits laitiers, la viande et le poisson sont généralement peu largués dans les poubelles. Les Suisses en consommeraient de moins en moins et surveillent plutôt bien la date limite de consommation qui est inscrite sur l’emballage.
En revanche, les légumes frais finissent souvent en déchets. Ils représentent 30% des aliments jetés, suivis par les fruits (20%), puis le pain et les pâtisseries, que l'on achète en trop grande quantité.
Jusqu'à 120 jours après la date limite
Pour tenter de réfréner ce gaspillage, la Confédération a mandaté Foodsave2025. Le groupe a mis en place une série de guides pour aider les consommateurs à se détacher des dates limites de consommation.
Il assure que les huiles, les céréales et les aliments en conserve peuvent être mangés 120 jours après la date limite de consommation.
Pour le reste, tant que l'odeur et le goût ne sont pas altérés, de nombreux produits comme le fromage, les fruits et les féculents peuvent encore être consommés pendant plusieurs jours.
Charlotte Onfroy-Barrier / fme