Il est reproché à Conforama d'utiliser de faux "prix barrés" lors de ses actions, soit des prix qui sont censés montrer le tarif d'un article avant le rabais. Or ces prix barrés n'auraient jamais été pratiqués durant la période précédant la promotion. Le groupe aurait aussi parfois indiqué des comparaisons de prix avec la concurrence qui, elles aussi, ne correspondaient pas à la réalité.
C'est la Fédération romande des consommateurs (FRC) qui, à l'issue d'une vaste enquête, a dénoncé cette pratique et porté plainte en avril 2019. L'affaire a ensuite été instruite par le Ministère public vaudois. Celui-ci a rapporté une politique d'affichage "volontairement trompeuse", susceptible d'infraction à la loi fédérale sur la concurrence déloyale, subsidiairement de violation de l'obligation d'indiquer les prix au consommateur.
Depuis juin 2018
La pratique incriminée remonterait à plusieurs années, "mais à tout le moins depuis le mois de juin 2018", indique le procureur Stephan Johner dans son acte d'accusation. Elle aurait été en vigueur dans tout le pays, la chaîne d'origine française comptant une vingtaine de filiales en Suisse. "La totalité ou la quasi-totalité" des actions seraient par ailleurs concernées, tant dans les magasins, sur internet ou dans les catalogues.
La société, spécialisée dans les équipements de la maison (meubles, décoration, électronique et autres électroménagers), conteste ces accusations.
Procès suspendu
Lundi matin face au Tribunal correctionnel de Lausanne, Stephan Johner a indiqué que le Ministère public avait poursuivi son enquête au cours des quatre derniers mois, soit après le dépôt de l'acte d'accusation en août. Des relevés hebdomadaires sur douze articles, pris au hasard, montreraient que Conforama ne s'est toujours pas remis en question.
Si l'avocate du groupe, Clara Poglia, a critiqué "les problèmes méthodologiques" et l'absence de "pertinence" de ce nouveau pointage, la FRC l'a jugé important. "Cela montre que cette pratique continue, que Conforama n'a pas réalisé l'ampleur du phénomène", a affirmé son responsable du service juridique, Jean Tschopp.
Les juges ont aussi estimé que ces nouvelles pièces devaient être versées au dossier, sachant qu'elles doivent permettre "d'apprécier" l'éventuelle culpabilité de Conforama. Toutefois, comme ces pièces ont été déposées trop tardivement pour un examen détaillé, la présidente Malika Turki a préféré ajourner le procès à une date ultérieure.
Longue enquête
Avant la suspension de l'audience, deux témoins ont encore été entendus. Un ancien collaborateur de la FRC a notamment raconté comment l'enquête s'était déroulée, à la suite de dénonciations de plusieurs consommateurs. Durant près d'un an, des bénévoles de la FRC, appelés "enquêteurs mystères", ont fouillé magasins et internet pour suivre l'évolution des prix. Quatre enseignes et 350 articles ont été suivis, dont 160 pour le seul Conforama, où les pratiques auraient été les plus douteuses.
L'acte d'accusation contient une centaine d'exemples, pour tous types d'articles. Le premier de la liste est un frigo, dont le prix a oscillé entre 699 et 799 francs entre juillet 2018 et avril 2019. L'action, ou fausse action selon la FRC, était à chaque fois accompagnée d'un prix barré de 1099 francs.
ats/vajo