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Le viager en plein essor, poussé par l'inflation et le vieillissement de la population

Conséquence inédite du vieillissement de la population, le nombre de ventes immobilières en viager est en augmentation en Suisse romande
Conséquence inédite du vieillissement de la population, le nombre de ventes immobilières en viager est en augmentation en Suisse romande / 19h30 / 3 min. / le 17 janvier 2023
De nombreux retraités ne parviennent plus à assurer financièrement l'entretien de leur logement. Pour éviter de devoir se séparer de leur bien, ils optent de plus en plus pour le viager. Un fonds d'investissement dédié vient d'être créé.

Renée Perrin habite depuis 23 ans dans sa maison à Champagne (VD). A 83 ans, sans enfant, sa situation financière s'est compliquée après le décès de son mari. L'an dernier, cette ex-restauratrice a décidé de vendre sa maison en viager.

"Il n'y avait plus l'AVS de mon mari. Et en tant qu'indépendants, nous n'avions pas de deuxièmes pilier. J'ai trouvé que la solution du viager était la meilleure pour moi. Cela me permet de rester jusqu'à mon décès. Grâce à cela, je n'ai pas eu besoin de me déraciner".

Une vente au rabais, qui en vaut la peine

Le principe est simple: le propriétaire vend son logement à un prix nettement inférieur au prix du marché. En échange, il pourra continuer d'y habiter jusqu'à son décès.

Dans le cas de Renée Perrin, sa maison, évaluée à 940'000 francs, a été revendue 640'000 francs. Une dévalorisation qu'elle estime normale, puisqu'elle pourra y vivre jusqu'à ses derniers jours. "Finalement, c'est comme si je payais un loyer pendant 10 ans à mon propriétaire. Et puis je suis au moins chez moi, dans mes souvenirs", note l'octogénaire.

Le soulagement de cette retraitée va au-delà de l'argent qu'elle reçoit. Car Renée Perrin n'a plus à se soucier de l'entretien: "Tout ce qui concerne la maison ne me concerne plus. Si le chauffage lâche, si ma cuisinière lâche, c'est au frais du nouveau propriétaire. Je ne paie plus d'impôt foncier, plus d'assurance bâtiment, plus d'assurance incendie."

Marché de niche en plein essor

Renée Perrin n'est pas une exception en Suisse. La vague de baby-boomers qui déferle sur l'AVS pousse de plus en plus de propriétaire à vendre en viager. La baisse de leur revenu couplé à l'inflation et à la hausse des coûts de l'énergie soutient ce nouvel l'essor.

L'agent immobilier Christophe Andrié en témoigne. Il s'est spécialisé il y a 7 ans dans la vente et l'achat en viager. Aujourd'hui, il réalise 3 à 4 transactions par mois en Suisse romande.

"Le marché croît parce que les gens se retrouvent à la retraite, avec des charges qui augmentent. Les assurances maladie augmentent et les taux d'intérêt aussi. Par contre, les retraites ne bougent pas", explique le courtier chez Viagers.ch.

Un premier fonds dédié

Ce marché de niche en pleine croissance a même incité la création d'un fonds immobilier dédié, Viage SA, autorisé par la Finma le mois dernier. Les propriétaires pourront lui vendre leur bien directement.

François Normand, directeur général de Viage SA, explique la démarche, qui bénéficie tant aux vendeurs qu'aux acheteurs: "Les banques aujourd'hui peuvent ne pas reconduire votre crédit si les revenus à la retraite ne suffisent pas. Le fonds immobilier Viager est une solution dans ces cas-là pour que les personnes âgées puissent profiter de leur maison jusqu'à la fin de leur vie."

Côté investisseurs, l'intérêt principal des acquéreurs institutionnels, selon François Normand, est de "pouvoir placer l'argent dans un produit sociétal, qui amène une solution aux personnes âgées. Ensuite, il s'agit d'un marché de niche, qui n'existait pas avant, soit un marché immobilier collectif de maisons individuelles. Finalement, c'est un marché qui n'a pas de vacance, puisque toutes les personnes vivent dans leur maison".

En capital ou en rente

Le montant est généralement versé en deux temps. Premièrement, un montant initial, appelé le bouquet, auquel s'ajoute une rente mensuelle, que le vendeur perçoit jusqu'à son décès. La répartition entre le bouquet et la rente se discute généralement entre les parties.

"A mon âge, j'ai choisi le capital [Le bouquet, ndlr]. Parce qu'à 83 ans, je ne vais pas toucher une rente pendant longtemps", pense Renée Perrin.

Le fonds Viage SA a fixé l'âge minimum d'entrée à 70 ans. En sachant qu'environ 40% des baby-boomers sont propriétaires, le marché potentiel est immense.

Sujet TV: Philippe Lugassy

Réalisation Web: Feriel Mestiri

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