Les Nations unies sont convaincues que le cannabis légal est l’une des clés d'un développement durable. Largement sous-exploitées, ses vertus sont pourtant nombreuses. Ce superaliment pousse facilement, enrichit les sols et constitue une fibre textile hyper écologique. Sa culture nécessite, par exemple, 70% moins d'eau que le coton et presque aucun pesticide.
La chanvre peut en outre être utilisé pour la fabrication de matériau de construction écologique. A ce titre, la France fait figure de pionnière. "Il y a une trentaine d'années, la France a été la première à développer un système de construction basé sur l'utilisation de chaux mélangée avec une partie du chanvre", explique dans La Matinale Pascal Mortoire, membre de la faîtière française des chanvriers.
Il développe: "La chenevotte, la partie boisée du chanvre qui contient de la lignine, a plusieurs propriétés intéressantes. Elles est notamment un isolant parfait. Ça fait un matériau de construction et d'isolation absolument incroyable, qui résiste au feu, qui permet une utilisation dans toutes les pièces. Cela permet d'utiliser beaucoup moins de produits pétrosourcés."
Exploité massivement par le passé
Malgré toutes ces qualités, le chanvre n'est quasiment pas cultivé. "La surface au niveau mondial dédiée à la culture du chanvre légal correspond à moins de 0,02% des surfaces cultivées. Il y a donc du potentiel", explique Marco Fugazza, économiste à la CNUCED.
Le chanvre n'a toutefois pas toujours été autant boudé. Pendant des siècles, jusque dans les années 40, il a été exploité massivement en Europe, avant d'être abandonné.
"On a substitué les fibres naturelles avec les fibres synthétiques - un dérivé synthétique du pétrole - qui arrivaient pour la plupart des Etats-Unis", détaille Lorenza Romanese, directrice de l'association européenne du chanvre industriel.
Elle explique que la plante a également été victime de sa mauvaise réputation: "Le chanvre a fini dans le même panier que le cannabis à haute teneur de THC, et il a été démonisé. Tout cela est arrivé des Etats-Unis, avec une décision du Congrès en 1937 de bannir toute la catégorie botanique de cannabis sativa L."
L'argument climatique devrait toutefois favoriser son retour en grâce. "Un hectare de chanvre classique réussit à emprisonner plus de carbone en cinq ou six mois qu'un hectare de forêt primaire. C'est absolument incroyable, ça séquestre entre dix et quatorze tonnes de carbone par an, et cela sans utilisation de pesticide et avec très peu d'engrais", s'enthousiasme Pascal Mortoire.
Barrières législatives
A présent, la balle est plus que jamais dans le camp des législateurs. La culture du chanvre pâtit en effet de nombreuses barrières légales, notamment dans l’Union européenne. La Suisse, elle, fait figure d'élève modèle pour certaines de ses applications.
"Pour tout ce qui est nourriture, la Suisse est très avancée. Elle autorise une teneur beaucoup plus élevée de THC dans les aliments, comme la farine, les produits dérivés de la graine et l'huile de chanvre", énumère Lorenza Romanese.
Et de conclure: "Dans l'Union européenne, on doit respecter un microgramme par kilo de poids corporel, contre sept en Suisse. Cette tolérance n'a pas pour autant un effet intoxicant. Personne en Suisse n'a jamais souffert à cause d'un pain produit avec de la farine de chanvre. C'est une valeur très sûre que l'Europe devrait suivre".
Sujet radio: Benjamin Luis
Version web: Antoine Schaub