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Genève, Lausanne et le canton de Neuchâtel ont emprunté des millions à la FIFA

Le siège de la FIFA à Zurich. [Keystone - Steffen Schmidt]
Genève, Lausanne et le canton de Neuchâtel ont emprunté des millions à la FIFA / La Matinale / 4 min. / le 30 janvier 2023
Les villes de Genève, de Lausanne ainsi que le canton de Neuchâtel ont emprunté de l'argent à la FIFA, au moins depuis 2018, pour des montants entre 30 et 150 millions de francs, a appris la RTS. Ces emprunts interpellent, d'autant qu'ils sont parfois le fait de gouvernements à majorité rose-verte, un camp politique plutôt critique vis-à-vis de la FIFA.

Mi-janvier, une enquête des journaux de Tamedia révélait que la Ville de Berne, en difficultés financières, avait emprunté à plusieurs reprises de l'argent à la Fédération internationale de football (FIFA).

>> Lire à ce sujet : La Ville de Berne a emprunté des fonds à hauteur de 1,8 milliard auprès de la FIFA

C’est grâce à une plateforme financière en ligne, la startup Loanboox basée à Zurich, que ces transactions ont été effectuées. Son modèle d'affaires est de mettre en relation directe des emprunteurs (des collectivités publiques ou des entreprises) avec des prêteurs, comme des banques, des assurances, des fonds de pension mais aussi des entités privées, sans intermédiaires.

C'est donc par ce biais qu'en 2022, la ville de Lausanne a emprunté en moyenne 40 millions de francs à la FIFA, le canton de Neuchâtel 100 millions et la ville de Genève 150 millions. Des montants qui représentent toutefois une part très marginale de leurs emprunts à court terme.

Les villes de Neuchâtel (10 millions en 2019), de Fribourg (10 millions en 2022) et de La Chaux-de- Fonds (20 millions en 2022) ont aussi eu recours à de tels prêts. Côté alémanique, Winterthour (ZH) et Frauenfeld (TG) ont aussi effectué ce type de transactions, selon SRF.

Offres les plus avantageuses

Il faut dire que la FIFA est assise sur des milliards de francs, résultats de la vente des droits de télévision, de licences ou encore de sponsoring autour de la Coupe du Monde. Et comme garder autant de liquidités dans les banques coûte cher en période de taux d'intérêts négatifs, il est avantageux de faire circuler cet argent.

Plusieurs services communaux des finances ont ainsi indiqué à la RTS que les offres de prêts de la FIFA étaient financièrement très attractives, c'est-à-dire sans frais ni intérêts. Mais ce ne sont pas les seuls critères qui ont joué.

Pour le canton de Neuchâtel, il fallait des emprunts en francs suisses et auprès d'organismes soumis à la juridiction suisse, a détaillé le conseiller d'Etat chargé des Finances Laurent Kurth lundi dans La Matinale. "Une fois ces deux conditions remplies, on prenait les offres les moins chères, étant entendu que nous cherchions des offres à court terme, afin de verser le plus rapidement possible les aides Covid".

"Les transactions avec la FIFA ont représenté moins de 5% des opérations de ce type", a encore précisé le ministre neuchâtelois.

>> Voir aussi les explications du 19h30 :

En plus de Berne, la FIFA à prêté de l'argent à des collectivités publiques de Suisse romande
En plus de Berne, la FIFA à prêté de l'argent à des collectivités publiques de Suisse romande / 19h30 / 2 min. / le 30 janvier 2023

Pas de critère éthique

Toutefois, ces emprunts financièrement attractifs interpellent. La FIFA - et tout récemment sa Coupe du Monde au Qatar - ont fait l'objet de nombreuses critiques, tant du point de vue des droits humains que de l'environnement. Des critiques rejetées par les instances dirigeantes de la Fédération. Cela étant, certains de ses anciens membres ont été ou sont toujours poursuivis par la justice pour des soupçons de corruption, de fraude ou de gestion déloyale.

Autant d'éléments dont les partis de gauche se sont fait l'écho. Socialiste, Laurent Kurth défend cependant le choix de son canton: "La FIFA n’est pas interdite d’activités en Suisse, ce n'est pas une organisation de malfaiteurs. Par ailleurs, d'autres prêteurs ont aussi fait l'objet de critiques par le passé, notamment certaines banques. (...) D'autre part, lorsqu'on passe par des emprunts obligataires, ce que personne ne critique, en réalité on ne sait pas qui nous prête. Donc de ce point de vue-là, je trouve que les critiques par rapport à ces prêts de la FIFA sont assez mal fondées."

Enjeu politique

À l'heure actuelle, le canton de Neuchâtel a décidé de ne plus faire de tels emprunts. Pour des raisons conjoncturelles, d'une part, mais aussi politiques: "C'est sûr qu'à partir du moment où la FIFA est régulièrement un acteur de premier plan dans les polémiques médiatiques, on se repose la question de la pertinence politique" de leur emprunter de l'argent, concède Laurent Kurth, qui souligne aussi que la FIFA n'est pas soumise à la surveillance de la Finma, comme le sont les banques.

Lausanne ne demandera plus de prêts

À Lausanne, la conseillère municipale en charge des Finances, Florence Germond, a indiqué lundi après-midi par mail à la RTS que Lausanne ne demandera plus de prêts à la FIFA. La socialiste explique cette décision en faisant elle aussi référence aux récents évènements, à savoir les critiques autour de la Coupe du Monde au Qatar.

La Fédération internationale de football, elle, n'a pas répondu aux questions de la RTS.

>> Voir aussi le débat entre les conseillers communaux lausannois Virginie Cavalli (Vert'libéraux), et Samuel de Vargas (PS), dans Forum :

La ville de Lausanne est interpellée pour ses emprunts à la FIFA: débat entre Virginie Cavalli et Samuel de Vargas
La ville de Lausanne est interpellée pour ses emprunts à la FIFA: débat entre Virginie Cavalli et Samuel de Vargas / Forum / 7 min. / le 30 janvier 2023

Marc Menichini/jop

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Le détail des transactions pour la Ville de Genève

Comme toutes les communes du pays, la ville de Genève finance ses besoins en trésorerie notamment par des tranches d’emprunts à court terme. Via des courtiers, mais aussi des plateformes financières en ligne.

La ville est inscrite à Loanboox depuis 2018. Grâce à elle, elle a conclu 11 transactions avec la FIFA: des emprunts d’une durée de trois à sept mois pour des montants entre 30 et 150 millions de francs.

Le détail des transactions pour la Ville de Lausanne

Pour la gestion de sa trésorerie à court terme, "ces trois dernières années, la Ville de Lausanne a effectué une vingtaine d’opérations d’emprunt sur Loanboox, d’une durée moyenne de 3 mois environ, pour des montants moyens d’une quarantaine de millions de francs", a détaillé son chef du service des finances.

Entre 2017 et 2022, des emprunts à court terme ont été effectués à 28 reprises auprès de la FIFA, mais aussi auprès de l’Aéroport de Genève ou d'Eurofima AG via Loanboox. Cela étant, la ville réalise la plus grande partie de ses opérations à court terme par le biais d'autres courtiers auprès des banques, des assurances et des fonds de pension.

Des transactions légales, selon Loanboox

Quelque 170 communes ou organisations parapubliques romandes sont inscrites aujourd’hui sur la plateforme Loanboox qui, selon son directeur général Philippe Cayrol, a permis de réaliser plus de 500 transactions.

Concrètement, la procédure est très simple: une commune fait une demande de prêt sur la plateforme, les investisseurs lui transmettent leurs offres et la commune fait son choix, selon ses critères. Aucun intermédiaire n'est impliqué, donc la démarche est potentiellement moins chère qu'avec un courtier traditionnel.

Quant à sa légalité, Philippe Cayrol précise dans La Matinale que "seuls les prêteurs qui sont des personnes morales suisses et des professionnels de la trésorerie peuvent être actifs sur la plateforme". Il précise par ailleurs que "toutes ces entités ont des comptes bancaires établis en Suisse, ces comptes sont soumis à la réglementation bancaire suisse".