Depuis quelques années, le restaurant gastronomique Le Cigalon, à Thônex (GE), fait face à un phénomène nouveau, que Corinne Bessire, sa patronne, accueille avec un zeste d’amertume: le "no show". "Ça devient un peu récurrent: des personnes ne se présentent pas et n’honorent pas leur réservation", déplore la tenancière jeudi dans le 19h30.
En clair, vous réservez une table dans un restaurant, mais vous décidez finalement de ne pas y aller sans pour autant annuler, ou vous oubliez d'y aller. Pour l'établissement, cela signifie une table de perdue, à moins de parvenir à la donner à d'éventuels clients arrivés plus tard à l'improviste, lorsque c'est possible.
Fichage des clients fantômes
Corinne Bessire tente comme elle peut de lutter contre ce fléau. Elle enregistre sur le téléphone les numéros des clients peu fiables sous le nom 'pas venu'.
"La prochaine fois qu’ils vont m’appeler, quand je vais décrocher, je vais voir le message 'pas venu'. Et malheureusement, le restaurant sera complet pour eux", explique-t-elle.
La carte de crédit bientôt obligatoire pour réserver?
Le phénomène du no show est en augmentation en Suisse, si l'on en croit les données du système de réservation MyLOCALINA. La part de réservations non honorées a doublé en quelques années, passant de 0,23% en 2019 à 0,47% en 2022, soit une sur 213. Et toutes les plateformes de réservation en ligne interrogées constatent que les clients prennent de plus en plus de libertés.
"Nous proposons comme solution que le client donne sa carte de crédit lors de la réservation", déclare Yves Latour, le directeur du site Lunchgate.ch. "Comme ça, s’il ne vient pas, le restaurant peut tout de même lui prélever un certain montant." Il s'agit d'une sorte de caution. La pratique, courante dans certains pays, arrive en Suisse. Elle pourrait devenir la norme.
Une "catastrophe" pour la caisse
"La marge des restaurateurs est tellement faible que ça devient une catastrophe quand une table de deux ou de quatre ne vient pas", s'alarme Laurent Terlinchamp, président de la Société des cafetiers. "À une certaine époque, les bénéfices étaient différents. Aujourd’hui, chaque franc doit être calculé pour le client et pour le restaurateur. La réservation doit donc être tenue ou annulée."
Avec leurs charges très élevées, les restaurants gastronomiques sont les premières victimes du no show. Les établissements situés hors des villes sont particulièrement vulnérables, car leurs tables sont encore plus difficiles à remplir à la dernière minute.
Théo Jeannet/ami