Les vols de propriété intellectuelle, la montée des tensions avec la Chine et les problèmes de logistique pendant la pandémie ont changé la donne aux Etats-Unis. Détenteur des principaux brevets dans le domaine clé des semi-conducteurs, le pays en avait délégué la production en Asie, pour des raisons économiques.
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Aujourd'hui, c'est le mouvement inverse qu'opère Washington, qui cherche à rapatrier le secteur par tous les moyens. L'été dernier, le président Joe Biden a d'ailleurs fait passer
, pour puces électroniques, avec l'appui des républicains. Il promettait 49 milliards de francs de subsides à l'industrie des semi-conducteurs.
Plusieurs chantiers
Ce changement de politique se voit particulièrement en Arizona, dans le sud des Etats-Unis, le nouvel eldorado des semi-conducteurs. Dans la banlieue de Phoenix, le géant taïwanais TSMC investit 40 milliards de dollars et créera 4500 places de travail.
Un peu plus au sud, l'américain Intel dépense 20 milliards pour 3000 emplois. "C'est un effort pour corriger les problèmes du passé. Nous nous adaptons, comme le font toujours les marchés", observe jeudi dans le 19h30 Jason Bagley, responsable des relations avec le gouvernement américain, chez Intel Corp.
Des programmes de formations ont également été mis en place dans la région pour aider les entreprises à trouver les milliers d'ouvriers qualifiés dont elles ont besoin.
Risque géopolitique
De fait, l'Arizona se trouve au coeur d'un redéploiement de l'économie mondiale. "La pandémie de Covid a montré que la chaîne d'approvisionnement est facilement perturbée", explique Chris Camacho, le président du Conseil économique de la région de Phoenix. "En s'installant ici, les entreprises évitent ce genre de risques. Cela leur permet aussi de se couvrir face au risque géopolitique", ajoute-t-il.
Principal producteur mondial de semi-conducteurs, Taïwan se trouve au coeur des tensions entre la Chine et les Etats-Unis. TSMC, son entreprise clé, avec près de 50'000 employés répartis dans ses filiales en Chine et aux Etats-Unis, produit environ la moitié des semi-conducteurs de pointe et un cinquième de toute la fabrication de puces.
Tout l'enjeu est donc pour la Chine comme pour les Etats-Unis d'augmenter la production sur leurs territoires. Quant à l'Europe, qui a aussi subi les conséquences des pénuries pendant la pandémie, elle tente de résister tant bien que mal. Mais les fleurons du secteur, dont ST Microelectronics, dont le siège social se trouve à Genève, ne pèsent qu'environ 10% du marché.
Reportage TV: Gaspard Kühn
Adaptation web: jgal
Aux Pays-Bas, une entreprise en étau entre Chine et Etats-Unis
L'entreprise ASML, à Veldhoven, aux Pays-Bas, est la seule au monde à maîtriser la technologie pour produire des puces électroniques de toute génération. Peu connue du grand public, elle retient l'attention de toutes les grandes puissances mondiales. Et pour cause, ses principaux clients sont l'américain Intel, le coréen Samsung et le taïwanais TSMC, mais la Chine a aussi représenté 15% des ventes ces dernières années.
Or, Washington demande aujourd'hui aux Pays-Bas d'empêcher ASML de vendre ses machines aux Chinois. Contre son gré, l'entreprise se retrouve ainsi au coeur d'un bras de fer qui la dépasse.