Le nombre de voyageurs et voyageuses en 2022, année des 175 ans du chemin de fer en Suisse, est nettement plus haut que ce qu'il était en 2021. Mais il n'atteint pas le niveau de 2019, soit celui d'avant la pandémie de Covid, ont annoncé lundi les CFF. L'affluence moyenne en 2022 s’est élevée à 1,16 million de personnes par jour, soit 30,8% de plus qu'en 2021 mais 12,5% de moins qu'en 2019.
La guerre en Ukraine a eu un impact négatif sur les chaînes d’approvisionnement, à laquelle s'ajoutent l'inflation et les coûts de l’énergie. En raison des faibles précipitations de l’été, il a en effet fallu acheter plus d'électricité sur le marché, car les lacs de retenue des CFF - l'ex-régie fédérale possède quatre barrages - se sont mal remplis.
"On n'a pas pu produire autant d'énergie en été qu'on en produit d'habitude. On a dû acheter, alors qu'en général on vend pendant l'été. Ca ne devrait pas se répéter chaque année", a expliqué le patron des CFF Vincent Ducros dans l'émission Forum de la RTS lundi soir. Souci supplémentaire, l'hiver dernier, l'ex-régie fédérale a également dû créer des réserves dans ses barrages pour palier aux éventuels manquements de ses fournisseurs cet hiver. Ces aléas ont plombé le segment Infrastructure Énergie.
Freiner l'évolution des coûts
Sans les pertes d’Infrastructure Énergie (-165 millions de francs) et une correction de valeur de -83 millions sur les installations de CFF Cargo, le résultat serait à l’équilibre. Cargo Suisse a plongé à -187,4 millions, contre +1,1 million en 2021.
La correction de valeur était nécessaire, explique la direction, car les fonds de soutien de la Confédération pendant la pandémie ont expiré et le prochain paquet de soutien pour le trafic par wagons isolés est encore en suspens. La situation financière reste tendue. L’endettement a encore augmenté de 2,5%, pour atteindre plus de 11 milliards de francs en 2022 (+27,7% par rapport à 2019).
"Nous devons freiner l'évolution des coûts afin de pouvoir croître malgré tout, mais sans une hausse comparable ou démesurée des coûts", a déclaré en conférence de presse Monika Ribar, présidente du conseil d'administration de l'ex-régie fédérale. Des économies de 6 milliards de francs d'ici 2030 sont évoquées.
Pas de diminution de l'offre
"Il n'est pas du tout question de diminuer l'offre, ni de modifier le réseau. Ce n'est souhaité ni par la population ni par le monde politique", a rassuré le patron des CFF dans Forum. "On a un plan en cours depuis déjà une année. Etre plus efficients, diminuer notre appareil administratif, reporter les investissements qui ne sont pas indispensables. On a aussi un plan de stabilisation des finances, discuté avec le Conseil fédéral et bientôt par les Chambres", a-t-il détaillé.
A ses yeux, économiser six milliards en sept ans est réaliste. "Les CFF, c'est 11 milliards de chiffre d'affaires, 4 à 5 milliards d'investissements chaque année", explique-t-il. Rien que le fait de repousser les investissements non essentiels pourrait en apporter une bonne partie.
Des projets de digitalisation sont aussi évoqués pour économiser. Et une hausse du prix des billets? "Cela fait sept ans qu'il n'a pas augmenté", rétorque Vincent Ducrot. Quant à la suite, "c'est une question de pouvoirs publics".
Record d'abonnements demi-tarif
Dans le détail de l'activité, le trafic grandes lignes accuse une perte de 47,2 millions de francs en 2022, après -478,5 millions en 2021. Les recettes du trafic voyageurs ont gagné 36,2% à 2,494 milliards. Le trafic régional retrouve les chiffres noirs à 10,6 millions.
Le nombre d’abonnements généraux a atteint 430'768 (+6,0% par rapport à 2021). Les ventes d’abonnements demi-tarif affichent un record à 2'968'615 (+4,9% par rapport à 2021 et +9,0% par rapport à 2019).
SBB Cargo International accuse également une perte de -0,3 million de francs due aux chantiers et perturbations en Allemagne. Le segment Infrastructure Réseau a lui aussi plongé dans le rouge (-24,2 millions après +24,7 millions en 2021) en raison du renchérissement. Dans l'activité Immobilier, le bilan est positif à 269 millions et la situation s'est stabilisée.
ats/iar/vic
Les futurs capteurs de flux des CFF ne relèveront pas l'âge, le sexe ou la taille
Les CFF renoncent à segmenter leur clientèle selon l’âge, le sexe ou la taille dans les mesures d'affluence prévues dans les gares, ont-ils annoncé. Ce projet avait soulevé de nombreux questionnements et provoqué une certaine inquiétude au sein de l’opinion publique.
>> Lire: Les CFF veulent équiper leurs gares de caméras à reconnaissance faciale et Les futures caméras ne posent "aucun problème de protection des données", assurent les CFF
Après examen, la direction est arrivée à la conclusion qu’il fallait renoncer à la fonction de segmentation. "Il n’a jamais été question d’acquérir un système non conforme aux dispositions relatives à la protection des données", souligne-t-elle.
Mesure des mouvements uniquement
"Pour moi, l’utilité pour notre activité principale, le chemin de fer, n’est pas suffisamment avérée", a déclaré le patron des CFF Vincent Ducrot. Il assure avoir entendu et pris au sérieux les craintes exprimées par le public et les acteurs politiques. "On va acquérir uniquement la partie 'mesure des fréquences, des mouvements des gens', dans laquelle il n'y a aucune reconnaissance faciale", a-t-il précisé dans Forum, évoquant le terme de "senseurs" plutôt que de caméras.
Le système sera probablement mis en place à partir de début 2025. L'appel d’offres sera adapté et une analyse d’impact pour les offres déjà reçues sera réalisée. Le choix ne sera fait qu'après examen par le Préposé fédéral à la protection des données. Sollicité par la rédaction du 19h30 de la RTS, celui-ci a répondu qu'il saluait "toutes les initiatives visant à améliorer la protection de la sphère privée dans le cadre de ce projet". Il attend maintenant de recevoir plus d'informations des CFF avant de donner son feu vert.
L'accessibilité pas garantie
Côté exploitation, la transformation de la gare de Lausanne a pris du retard. Concernant la mise en oeuvre de la loi sur l’égalité pour les personnes en situation de handicap, le CFF ne pourront pas garantir l’accessibilité de toutes les gares à la fin 2023, en raison de travaux dispendieux.
En 2023, l’augmentation légale du prix du courant de traction imposée par l’Office fédéral des transports (OFT) viendra tempérer la situation financière, selon les CFF. Le paquet de stabilisation revu avec la Confédération devra permettre de garantir durablement leur financement jusqu’en 2030 et de réduire la dette.