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Jean-Marie Paugam: "L'accord céréalier est une veine essentielle du commerce alimentaire international"

L'invité de La Matinale - Jean-Marie Paugam, directeur général adjoint de l'OMC
L'invité de La Matinale - Jean-Marie Paugam, directeur général adjoint de l'OMC / La Matinale / 12 min. / le 14 mars 2023
Invité de La Matinale, Jean-Marie Paugam, directeur adjoint de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), salue la reconduite pour 60 jours de l'accord sur les exportations de céréales ukrainiennes. "Cet accord est vital car il est une veine essentielle du commerce alimentaire international", insiste-t-il.

Être numéro deux de l'Organisation mondiale du commerce (OMC), c'est avoir parfois des nuits agitées. Surtout dans le contexte actuel marqué par le Covid-19, les restrictions en Chine ou la guerre en Ukraine. Autant d'événements qui compliquent la sécurité alimentaire mondiale.

Car comme l'explique mardi dans La Matinale Jean-Marie Paugam, directeur général adjoint de l'OMC, tout est interconnecté et ce qui se passe en Ukraine ou en Amérique latine peut avoir des répercussions immédiates sur le reste du monde. "Le commerce joue un rôle pour nourrir environ un cinquième de la population mondiale. Et la crise en Ukraine, notamment, a aggravé cette situation qui était déjà assez tendue avant."

L'Ukraine représente 10% de la production mondiale de blé et "il y a des pays qui en dépendent immédiatement pour leur alimentation, leur stabilité et leur possibilité de croissance." Pour l'OMC, il est donc important de tout mettre en place pour maintenir les marchés ouverts et permettre à la nourriture de circuler des zones en excédant vers les zones en déficit, à l'image des vases communicants, souligne Jean-Marie Paugam.

"L'accord céréalier est vital"

On l'aura compris, la récente décision de la Russie de prolonger l'accord sur les exportations de céréales ukrainiennes réjouit tout particulièrement l'économiste français. Même s'il aurait préféré une reconduite de l'accord pour 120 jours supplémentaires comme c'était le cas jusqu'à présent, et non pas seulement pour 60 jours.

L'accord sur les exportations de céréales ukrainiennes est vital, car il est une veine essentielle du commerce international alimentaire

Jean-Marie Paugam, directeur général adjoint de l'OMC

"La prolongation est une bonne nouvelle. Cet accord est vital car il est une veine essentielle du commerce alimentaire international", insiste Jean-Marie Paugam, ajoutant que certains pays d'Afrique sont dépendants jusqu'à 60% dans certains cas des importations de blé ukrainien pour leur alimentation.

Sa durée pourrait toutefois poser d'éventuels problèmes ou du moins créer un peu d’incertitude au niveau des prix. "La question de la sécurité alimentaire, c’est non seulement la disponibilité, mais aussi l’accessibilité à la nourriture (déterminante pour fixer les prix, ndlr)", poursuit-il. "Et le prix est tout à fait fondamental."

Pour la suite, l'économiste se veut optimiste et croit à une extension de cet accord. "Je pense que la discussion va se poursuivre avec la Russie, qui a tout intérêt à voir ses propres exportations s’écouler correctement (...)".

Produire plus localement?

Concernant la volonté de certains pays ou régions de produire plus localement, pour des raisons environnementales, mais aussi pour des raisons d'auto-suffisance en cas de crise, Jean-Marie Paugam s'en réjouit. Avant de tempérer.

"Tout dépend des pays. Pour une partie d'entre eux, vous pouvez avoir une augmentation de la production locale, il y a des politiques qui sont mises en place pour cela. C’est d'ailleurs une des orientations que donne l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO). Mais ça n’est pas réaliste pour nourrir l’ensemble du monde."

Pour le directeur général adjoint de l'OMC, tous les pays du globe ne sont pas logés à la même enseigne, sans compter que le changement climatique va venir impacter les conditions de production agricole dans un certain nombre de régions. "Là encore, vous aurez toujours besoin d’avoir une circulation des denrées entre les zones qui produisent naturellement plus et celles qui produisent naturellement moins."

Une chose est sûre: une déglobalisation des échanges ne semble, selon lui, pas à l'ordre du jour. "On ne la voit même pas entre la Chine et les Etats-Unis, et ce avec toutes les tensions commerciales qu'on leur connaît. Vous avez aujourd’hui un commerce qui est revenu au niveau d’avant le Covid." Mais Jean-Marie Paugam de concéder: "Par contre, on assiste certainement à une forme de fragmentation, une complexification de la globalisation."

Propos recueillis par David Berger

Adaptation web: Fabien Grenon

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