Modifié

Le Conseil fédéral a tenu une séance urgente au sujet de Credit Suisse, UBS examine les conditions d'un rachat

Credit Suisse et UBS sont sous pression en Allemagne et en France. [AFP - Fabrice Coffirni]
Des rumeurs font état d’un rachat de Credit Suisse par UBS / Le 12h30 / 2 min. / le 18 mars 2023
Une nouvelle réunion urgente du Conseil fédéral consacrée à la situation de Credit Suisse a eu lieu samedi soir à Berne. UBS exigerait des garanties de l'Etat à hauteur de plusieurs milliards en cas d'une éventuelle reprise de Credit Suisse, affirme Reuters.

L'UBS exigerait environ six milliards de dollars de garanties de la part de l'Etat, a indiqué l'agence de presse Reuters tard samedi soir, citant des sources proches des discussions en cours. Le montant avancé pourrait encore changer. L'agence Bloomberg avait également indiqué plus tôt que l'UBS demandait des garanties de l'Etat en cas de rachat.

Samedi soir, les discussions se heurtaient encore à de gros obstacles, indique Reuters. Une fusion entre UBS et Credit Suisse pourrait notamment entraîner la suppression d'environ 10'000 emplois. Les discussions pourraient donc encore durer une bonne partie de la journée de dimanche en raison de la complexité d'un éventuel rapprochement entre les deux banques, indique une source bien informée.

Les autorités suisses semblent de leur côté pousser UBS à reprendre tout ou partie de Credit Suisse. Une nouvelle réunion urgente du Conseil fédéral consacrée à la situation du numéro deux bancaire suisse a eu lieu samedi soir à Berne. Le porte-parole du gouvernement André Simonazzi a indiqué à l'agence Keystone-ATS qu'il ne ferait aucun commentaire, à ce stade.

Plusieurs réunions ont eu lieu samedi soir

Les sept conseillers et conseillères fédéraux se sont retrouvés à 17h au siège du Département des finances, selon la NZZ. Plusieurs experts et fonctionnaires se sont ensuite joints à la réunion, qui a duré environ deux heures. Le porte-parole du gouvernement André Simonazzi a indiqué qu'il ne ferait aucun commentaire.

Des réunions de crise ont aussi été convoquées samedi au Credit Suisse, à UBS, mais aussi chez les régulateurs du secteur bancaire, la Banque nationale suisse (BNS) et l'Autorité fédérale de surveillance des marchés financiers (Finma).

Mais que donneront ces pourparlers dans les hauts étages de la finance helvétique? Les rumeurs d'un rachat de Credit Suisse par UBS sont de plus en plus pressantes. Un accord pourrait être conclu d'ici dimanche.

D'après le scénario le plus envisageable, UBS pourrait reprendre les activités de gestion de fortune et d'actifs de la banque aux deux voiles, alors que l'activité de banque d'affaires serait vendue.

Un rachat par UBS avec des garanties étatiques?

Vendredi soir, le Financial Times avait affirmé, plusieurs sources anonymes à l'appui, qu'UBS était en pourparlers pour le rachat total ou partiel de son rival, avec la bénédiction des autorités de régulation helvétiques.

>> Lire aussi : UBS serait en pourparlers pour racheter Credit Suisse, selon le Financial Times

Le quotidien britannique précise samedi que les régulateurs aux Etats-Unis, au Royaume-Uni et en Suisse évalueraient la structure juridique de la transaction. Cette dernière se baserait sur plusieurs concessions envers UBS. Le numéro un bancaire helvétique voudrait ainsi avoir la possibilité de répondre graduellement aux exigences internationales en matière de fonds propres.

Deux sources proches du dossier ont également indiqué à l'agence Reuters que le Conseil fédéral pourrait offrir une garantie contre les risques encourus en cas de rachat. Selon elles, UBS fait l'objet d'une pression croissante des autorités suisses pour envisager une telle opération.

Mais le numéro bancaire exigerait une garantie environ six milliards de dollars au Conseil fédéral. Les discussions sont toutefois toujours en cours et ce montant pourrait être modifié car plusieurs scénarios sont encore à l'étude.

Les garanties doivent servir à couvrir le coût de la dépréciation de certains actifs de Credit Suisse et de possibles frais de contentieux.

Aucun commentaire officiel

Interrogées samedi par Keystone-ATS, la BNS, la Finma et Credit Suisse ont refusé de commenter ces informations.

Un porte-parole d'UBS s'est, quant à lui, contenté de confirmer à AWP les propos tenus mercredi par le CEO Ralph Hamers selon lesquels UBS se concentre sur sa propre stratégie. La banque n'a pas fait d'autres commentaires.

Restructuration plus radicale, fermeture complète des activités de banque d'affaires, rachat par UBS, les investisseurs soupèsent les options pour le numéro deux du secteur en Suisse qui peine à regagner la confiance, alors que le titre a refermé la séance vendredi en baisse de 8,01% à 1,86 franc.

Credit Suisse doit trouver les moyens de rassurer coûte que coûte les marchés avant leur ouverture lundi matin, même si l'établissement est l'une des 30 banques au niveau mondial considérée comme trop grosse pour faire faillite.

"La confiance est perdue"

Du côté des experts, les analyses diffèrent également et il apparaît difficile de prédire l'avenir du géant bancaire. Konrad Hummler, ex-associé-gérant principal de la banque Wegelin, ne croit pas au sauvetage de Credit Suisse. "Les marchés internationaux du crédit réagissent trop négativement", déclare-t-il dans la presse alémanique.

Une fois que la confiance est perdue, elle disparaît, explique-t-il samedi dans la Neue Zürcher Zeitung. Konrad Hummler voit deux scénarios possibles pour la banque zurichoise. "Soit elle est liquidée en bonne est due forme - il existe des méthodes standardisées pour cela -, soit sa liquidation est transférée à une autre grande banque et la Finma et la BNS assument la garantie sans conditions", avance-t-il.

Mercredi soir, l'autorité de surveillance des marchés financiers Finma et la Banque nationale suisse annonçaient qu'elles mettraient des liquidités à la disposition du Credit Suisse en cas de besoin, après le naufrage de la banque suisse en bourse. Quelques heures plus tard, Credit Suisse annonçait qu'elle emprunterait jusqu'à 50 milliards de francs.

Cette aide de plusieurs milliards n'a que peu apaisé les inquiétudes des investisseurs vis-à-vis de la banque, en pleine tourmente boursière.

>> En lire plus : Les marchés rechutent et l'action Credit Suisse s'enfonce de nouveau de 8%

"Une fusion avec UBS ne serait pas approuvée"

Cette bouée de sauvetage fait donc resurgir les questions autour d'une faillite ordonnée, dans laquelle le régulateur prendrait le contrôle de la banque et se chargerait de la démanteler. C'est une hypothèse "fantaisiste", réagit David Benamou, directeur des investissements d'Axiom Alternative Investments.

Credit Suisse est l'"une des banques les mieux capitalisées d'Europe", rappelle-t-il. Son ratio de fonds propres durs, les sommes que les banques doivent mettre de côté pour le choc en cas de crise, se monte à 14,1% et la banque dispose maintenant d'énormes liquidités avec l'aide de la banque centrale.

Reste à savoir si la Commission de la concurrence approuverait une fusion entre Credit Suisse et UBS. L'ancien président de la Finma Eugen Haltiner juge que ce ne serait pas le cas, car cela aurait de sérieuses réserves en raison de la position dominante des deux banques sur le marché, déclare-t-il dans la presse.

"La fusion de l'Union de Banques Suisses et de la Société de Banque Suisse en 1998 était déjà un exercice d'équilibre du point de vue du droit de la concurrence", ajoute-t-il dans une interview accordée au groupe alémanique CH Media.

"Garder ce bijou suisse en Suisse"

L'ancien conseiller fédéral Christoph Blocher a quant à lui qualifié une éventuelle fusion de Credit Suisse et UBS de "mauvaise chose" pour la place économique suisse.

Les entreprises suisses actives au niveau international ne peuvent mener certaines affaires uniquement avec une grande banque, soit UBS ou Credit Suisse en Suisse, déclare l'industriel de 82 ans dans une interview publiée sur Blick.ch. Une seule grande banque supprime toute concurrence.

De son côté, le directeur chez Mirabaud John Plassard affirme samedi au micro de l'émission Forum de la RTS qu'il faudrait, théoriquement, "garder ce bijou suisse en Suisse". Il a notamment insisté sur cette "machine qui existe depuis cent ans" et qui "appartient à la culture" helvétique.

Avec la perte d'actifs des grandes banques, depuis quinze ans, au profit d'institutions bancaires régionales et privées, la Comco "serait obligée" d'approuver cette fusion pour la survie de Credit Suisse. Ce rachat, s'il advient, devra "absolument" être annoncé "avant l'ouverture des marchés asiatiques" dimanche soir, précise l'expert.

>> L'interview de John Plassard dans Forum :

John Plassard. [DR]DR
Vers un rachat de Credit Suisse par UBS? Interview de John Plassard / Forum / 8 min. / le 18 mars 2023

ther/boi/mera avec les agences

Publié Modifié