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La BNS continue la lutte contre l'inflation et relève son taux directeur

La Suisse s'en sort mieux que ses voisins européens en matière d'inflation. [Keystone - Laurent Gilliéron]
La Banque nationale suisse relève son taux d'intérêt directeur pour lutter contre l'inflation / Le 12h30 / 2 min. / le 23 mars 2023
La Banque nationale suisse (BNS) augmente une nouvelle fois jeudi son taux directeur, afin de poursuivre sa lutte contre l'inflation. Cette hausse intervient dans un contexte de tensions mondiales sur le secteur bancaire, fragilisé par le resserrement des politiques monétaires.

L'institut d'émission helvétique a augmenté de 50 points de base son taux directeur pour le porter de 1,0% à 1,5%, a-t-elle précisé dans un communiqué jeudi. Elle "n'exclut pas que d'autres relèvements de taux soient nécessaires pour assurer la stabilité des prix à moyen terme", a averti la banque centrale helvétique.

Avec la hausse de jeudi, le taux directeur de la BNS est porté à 1,5%, soit une quatrième hausse consécutive. "Vu le risque que l'inflation se consolide encore plus, un relèvement du taux directeur était nécessaire" malgré les tensions sur le secteur bancaire, a souligné le présient de la BNS lors d'une conférence de presse à Zurich. "Plus l'inflation se consolide et s'étend, plus il devient difficile de la combattre", a ajouté Thomas Jordan.

>> Lire également : Les mesures prises pour Credit Suisse ont permis de "juguler la crise", estime la BNS

Inflation toujours préoccupante

L'inflation en Suisse est actuellement à 3,4%, contre un objectif compris entre 0% et 2% fixé par la BNS. "Les perspectives de croissance de l'économie mondiale au cours des prochains trimestres restent faibles", écrit l'institut. "Dans le même temps, l'inflation devrait rester élevée dans le monde pour le moment", ajoute la banque.

L'inflation devrait toutefois refluer à 2,6% cette année, puis à 2% en 2024 et 2025. Le renchérissement risque donc de se maintenir tout en haut de la fourchette considérée comme acceptable par le garant de la stabilité monétaire en 2025 également.

"Sans la hausse des taux directeurs d'aujourd'hui, les prévisions d'inflation seraient encore plus élevées à moyen terme", a déclaré la BNS.

Du mieux sur la croissance

Les perspectives de croissance, en revanche, se sont améliorées, l'institut d'émission articulant pour 2023 une croissance de 1% environ du produit intérieur brut, deux fois plus généreuse qu'escompté jusqu'ici. L'exercice de projection demeure toutefois teinté de nombreuses incertitudes, en Suisse comme à l'étranger.

Mercredi soir, la Réserve fédérale américaine (Fed) a relevé son taux d'un quart de point de pourcentage, cherchant l'équilibre entre sa lutte contre l'inflation et les turbulences sur le secteur bancaire qui, a-t-elle averti, risquent de "peser" sur l'économie. Le principal taux directeur de la Fed se situe désormais dans une fourchette de 4,75% à 5,00%, au plus haut niveau depuis 2006, à l'issue d'une décision prise à l'unanimité.

>> Lire à ce sujet : La Fed, banque centrale américaine, relève son taux directeur

Il y a une semaine, la Banque centrale européenne (BCE) avait fait de même en décidant d'un nouveau relèvement des taux d'un demi-point de pourcentage afin de combattre le renchérissement, jugeant que les banques de la zone euro étaient solides et "résilientes".

cab avec les agences

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Charles Wyplosz: "Relever les taux d'intérêts consiste à ralentir l'activité économique"

"La mission numéro un de la banque centrale est d'assurer les prix", a souligné jeudi soir dans l'émission Forum de la RTS le professeur émérite d'économie à l'Institut des hautes études internationales de Genève Charles Wyplosz, cofondateur de l'observatoire de la BNS.

La BNS a donc dû agir pour diminuer l'inflation. Mais comment le relèvement du taux directeur permet-il d'atteindre cet objectif?

Voici la réponse qu'en donne l'économiste: "C'est là que l'histoire est un peu triste. L'idée de relever les taux d'intérêts consiste à ralentir l'activité économique et à laisser le chômage remonter. On n'a pas trouvé mieux pour ralentir l'inflation, parce qu'elle nourrit des salaires, qui nourrissent les prix, qui nourrissent les salaires, etc. A un moment, il faut couper cela. La seule méthode qu'on connaît est celle de ralentir la croissance, au besoin de l'arrêter, pour faire remonter le chômage, pour ramollir ce cercle vicieux."

>> Voir l'interview de Charles Wyplosz dans Forum :

Les mesures prises ont permis de "juguler la crise" de Credit Suisse, selon la BNS: interview de Charles Wyplosz
Relèvement du taux directeur de la BNS et crise de Credit Suisse: interview de Charles Wyplosz / Forum / 5 min. / le 23 mars 2023

Stratégie risquée

Pour une banque centrale, la technique est risquée. "Si elle crée de la récession, on la déteste", soutient Charles Wyplosz.

L'économiste point également un danger pour des acteurs financiers qui n'auraient pas anticipé une remontée des taux d'intérêts: "On sort d'une période d'une quinzaine d'années où les taux étaient négatifs. Toutes les banques centrales répétaient en boucle que cela allait durer longtemps. D'un seul coup, l'inflation est arrivée. On a pris les institutions financières par surprise. Les banques n'étaient pas prêtes à cela. Un certain nombre d'entre elles se sont faites piéger en ayant suivi une stratégie entièrement basée sur des taux d'intérêts zéro, voire négatifs."