Modifié

Le Conseil national refuse définitivement les garanties en faveur de Credit Suisse

Session parlementaire extraordinaire consacrée à Crédit Suisse: 48 heures compliquées pour la conseillère fédérale Karin Keller-Sutter
Session parlementaire extraordinaire consacrée à Crédit Suisse: 48 heures compliquées pour la conseillère fédérale Karin Keller-Sutter / 19h30 / 2 min. / le 12 avril 2023
En dépit de l'appel du pied du Conseil des Etats, le National est resté inflexible mercredi, refusant une seconde fois de valider les garanties de 109 milliards de francs de la Confédération pour soutenir le rachat de Credit Suisse par UBS.

Malgré le premier refus de la Chambre du peuple mardi soir, le Conseil des Etats avait, lui, réitéré mercredi matin son soutien à la stratégie du Conseil fédéral en faveur des deux banques, tout en durcissant les conditions d'octroi de ces garanties de 109 milliards de francs.

Cette proposition "de compromis" sommait le gouvernement d'élaborer un projet de loi qui permette de "réduire drastiquement" les risques que les grandes banques font courir à l'économie suisse. Elle incluait notamment l'examen d'une augmentation substantielle de fonds propres et d'une restriction légale des bonus. L'objectif était de "construire un pont avec le National", avait plaidé Johanna Gapany (PLR) au nom de la commission.

Mais ce pont ne sera pas bâti. En début d'après-midi, les élus de la Chambre basse ont rejeté définitivement le projet, infligeant au passage un cinglant désaveu à la gestion de la crise par le gouvernement.

Portée purement symbolique

L'UDC a persisté jusqu'au bout dans son rejet de principe. Quant aux socialistes et aux écologistes, ils affirment n'avoir pas confiance dans les promesses faites en matière de fonds propres et de bonus. La conseillère fédérale en charge des Finances Karin Keller-Sutter s'était pourtant engagée à soumettre différentes variantes au Parlement.

Ce résultat reste toutefois purement symbolique. Les garanties ont déjà été octroyées et ne peuvent être bloquées. Mais pour la gauche, socialistes en tête, c'était aussi l'occasion de tenter de durcir les conditions d'octroi des prêts.

>> Ecouter le conseiller national UDC et membre de la Commission des finances Manfred Bühler revenir dans le 19h30 sur le refus du Parlement d'approuver le plan de sauvetage de Credit Suisse :

Manfred Bühler, conseiller national UDC et membre de la Commission des finances, revient sur le refus du Parlement d'approuver le plan de sauvetage de Credit Suisse
Manfred Bühler, conseiller national UDC et membre de la Commission des finances, revient sur le refus du Parlement d'approuver le plan de sauvetage de Credit Suisse / 19h30 / 3 min. / le 12 avril 2023

Mandat d'examen

Dans la matinée, les membres du Conseil des Etats avaient failli aller plus loin que leurs homologues du National en proposant d'intégrer directement dans la modification de loi de nouvelles exigences en matière de fonds propres et de bonus. La gauche, ralliée par quelques centristes, avait plaidé pour cette option.

Mais le camp bourgeois a eu gain de cause pour inscrire un simple mandat d'examen. Différentes variantes pourront être analysées, ce qui permettra, selon la droite, d'étendre la révision à d'autres aspects que le capital propre et les bonus.

Un jour avant son effondrement, Credit Suisse disposait de 150% de fonds propres, a rappelé Martin Schmid (PLR). Et pourtant, cela n'a pas suffi pour maintenir la confiance.

Une série d'orateurs et oratrices ont aussi appelé à ne pas légiférer hâtivement et à en rester, pour le moment, aux analyses.

>> Ecouter Forum revenir sur le vote du National, suivi du débat entre Roger Nordmann (PS/VD) et Damien Cottier (PLR/NE) :

Le Conseil national refuse les garanties en faveur de Credit Suisse: débat entre Roger Nordmann et Damien Cottier
Le Conseil national refuse les garanties en faveur de Credit Suisse: débat entre Roger Nordmann et Damien Cottier / Forum / 15 min. / le 12 avril 2023

Différents motifs de refus

Dans la nuit de mardi à mercredi, le Conseil national avait rejeté une première fois ces crédits octroyés par le gouvernement, grâce aux voix conjuguées de la gauche et de l'UDC. Le parti conservateur a refusé les montants d'entrée de jeu, estimant que les banques trop grandes pour faire faillite ne devraient plus exister, tandis que la gauche exigeait des garde-fous plus stricts, eux-mêmes rejetés par la majorité de droite.

Beaucoup se sont insurgés d'avoir vu "le tapis rouge de l'aide étatique" déroulé encore une fois "pour sauver une banque mal gérée par des dirigeants avides".

>> Les événements de la journée de mardi en détail : Le National désavoue le Conseil fédéral sur le rachat de Credit Suisse

ats/jop

Publié Modifié

Séparation bancaire rejetée

La sénatrice Lisa Mazzone (Verte) a proposé de mentionner spécifiquement la séparation des activités des banques commerciales et des banques d'affaires.

"Les banques doivent redevenir ce qu'elles étaient auparavant, à savoir des pourvoyeuses de financements pour les infrastructures d'avenir. Elles ne sont pas là pour faire de l'argent avec de l'argent", a-t-elle martelé. Pour elle, les activités d'investissement à risque et celles de prêt - nécessaires à l'économie - doivent être séparées. La chute des premières n'entraînera ainsi pas celle des secondes.

Cette séparation est "le coeur du problème", a soutenu le socialiste Carlo Sommaruga. D'autant que la thématique n'est pas nouvelle: après la crise de 2008, plusieurs propositions en ce sens ont été discutées et balayées par le Conseil des Etats.

Economiesuisse fustige l'attitude de l'UDC et du PS

La faîtière des enterprises Economiesuisse a fustigé mercredi le "non" du Conseil national au crédit d'urgence en faveur de Credit Suisse. Pour elle, au lieu de prendre ses responsabilités et de ramener le calme, ce refus a augmenté l'incertitude pour la place économique suisse. Par leur intransigeance, l'UDC et le PS mettent en danger la concordance et le modèle de réussite suisse", dénonce-t-elle.

A l'heure actuelle, il n'y a pas d'autre solution que celle qui a été trouvée, estime encore Economiesuisse, qui juge incompréhensible que les partis n'assument pas leurs responsabilités dans la crise, d'autant plus que la Suisse continuera à être confrontée à des incertitudes économiques considérables dans les prochains mois.