Publié

Inflation: "Une fois les factures payées, il ne me reste absolument rien"

Les Suisses frappés par la hausse du prix des aliments.
Inflation : prix à la gorge / A bon entendeur / 44 min. / le 9 mai 2023
Au rayon alimentation, les produits premiers prix sont particulièrement touchés par l’inflation. Les ménages qui achètent au moins cher sont ainsi frappés par des hausses plus sévères que ceux qui peuvent s’offrir des produits hauts de gamme. Certains se retrouvent pris à la gorge.

A Roche, dans le canton de Vaud, Andreea Barlea s’occupe à plein temps de la station-service Tamoil, de quoi gagner environ 4500 francs brut par mois. Mère célibataire, elle vit avec ses deux enfants et sa sœur, qu’elle héberge le temps de ses études à l’Université de Lausanne.

Pour son ménage, la hausse des prix de l’alimentation est insoutenable. "Ça a eu un impact énorme. Je fais la plupart des courses en France. Je ne peux pas me permettre plus de 800 francs par mois", explique la Chablaisienne.

"Une fois les factures payées, il ne me reste absolument rien (…). Mes enfants grandissent vite, il leur faut en permanence des habits, des chaussures. Souvent, je n’ai pas mangé pour pouvoir leur donner à eux".

Inflation à deux vitesses

Ses difficultés sont emblématiques de celles que connaissent les foyers suisses à petit budget. En avril, l’inflation atteignait 2,6% sur l’ensemble des produits et services mais au supermarché, certains tickets de caisse ont nettement plus augmenté.

La hausse du prix des aliments d’entrée de gamme est en effet beaucoup plus forte que celle des autres produits comme le montrent les calculs de l’émission "A Bon Entendeur" de la RTS. Ainsi le prix des œufs "M-Budget" a-t-il bondi de 37% en une année, soit 9 centimes par œuf, tandis que dans le segment haut de gamme, le prix des œufs bio de la Migros n’a augmenté que de 5,5%, soit 4 centimes par œuf.

Le phénomène s’observe pour toute une série de produits. Alors que l’augmentation moyenne des céréales petit-déjeuner est de 6,1% sur un an, elle atteint 20% au niveau des premiers prix à la Coop et à la Migros, 22% chez Lidl et 22,3% chez Aldi. Idem pour le sucre dont le prix a gonflé de 17,6% en moyenne, alors que pour l’entrée de gamme, la hausse atteint 44,4% à la Coop et 44,9% chez Aldi et Lidl.

Les prix de Lidl et Aldi s'envolent

Les hard discounters ont par ailleurs perdu de leur attractivité. Le panier type du magazine "Bon à Savoir" coûte 9,9% plus cher aujourd’hui chez Aldi qu’il y a douze mois. Chez Lidl, la hausse atteint 7,7%, alors qu’elle n’est que de 3,2% à la Migros et de 1,7% à la Coop.

Si les chaînes allemandes restent meilleur marché que Migros et Coop, l’écart se resserre et les clients qui achètent au moins cher sont là encore les plus frappés par les augmentations de prix.

Situation critique

Pour le chef du service des affaires sociales de la commune de Carouge, la situation est critique. "Soit d'une manière ou d'une autre, il y a une augmentation des salaires, soit il y a un recalcul d'un certain nombre de barèmes pour accéder à un certain nombre de prestations, soit une partie de la population va drastiquement se précariser", craint François Berthoud.

Mais la probabilité d’une pleine compensation de l’inflation au niveau des salaires paraît faible. "Les entreprises elles-mêmes sont dans l’incertitude", observe Blaise Matthey, directeur de la Fédération des Entreprises Romandes (FER) à Genève. "Les salaires sont un élément très important du prix des produits et des services mais il y a aussi tout le reste: la matière première, l’énergie et tout cela fait que l’on doit être prudent si l’on souhaite préserver l’emploi à long terme".

Sujet TV: Alexandre Nicoulin, Yoan Rithner, Linda Bourget

Adaptation web: Julien Furrer

Publié