"Le politique semble avoir démissionné sur les sujets liés à la santé", déplore Thomas Boyer
Mercredi, le Conseil national a débattu des dépenses dans le domaine de la santé en abordant notamment la question du Tarmed, la grille tarifaire des prestations médicales dans les cabinets médicaux et dans les hôpitaux.
Mais alors que les coûts de la santé ont déjà augmenté de plus de 7% durant les premiers mois de 2023, selon Santésuisse, l'association des assureurs maladie, le monde politique semble démuni.
>> Lire : Les coûts de la santé sont déjà en hausse de 7,5% en 2023, selon Santésuisse
Difficile avancée sur le sujet
Même le président de la Confédération Alain Berset s'est montré dérouté il y a une semaine lors de son intervention dans le 19h30. "Nous avons fait avec le Conseil fédéral tout ce qu'il était possible de faire en régie propre. Nous avons besoin de soutiens forts du Parlement pour faire passer des projets de meilleure maîtrise des coûts et ce n'est pas très très simple."
Au Parlement, les réformes sont balayées, à l’image du prix de référence des médicaments génériques, ou aboutissent aux forceps dans une version édulcorée. Exemple mardi soir au Conseil des Etats avec la réduction de la charge des primes d'assurance maladie. Les sénateurs ont d'abord refusé le texte avant de finalement l'adopter. Josef Dittli, conseiller aux Etats PLR/UR, a avoué que la crainte de voir l'initiative du PS "Maximum 10% du revenu pour les primes" passer en votation populaire l'a emporté. "Nous devons accepter ce contre-projet, et ne pas jouer à la roulette russe. Cela pourrait conduire à un oui à l'initiative et là ce serait la catastrophe."
"Désintérêt pour la santé"
De son côté, le directeur de l'assureur-maladie Groupe Mutuel Thomas Boyer considère que le Parlement n'en fait pas assez pour résoudre le problème. "Globalement, j'ai l'impression qu'il y a une forme de démission du politique sur les sujets liés à la santé. Sur les neuf thèmes liés à la santé dans l'ordre du jour de la session d'été, six se rapportent au financement et à la transparence, deux visent à alourdir le catalogue des prestations et un seul sujet porte sur la maîtrise des coûts", relève-t-il dans le 19h30.
S'il sait bien qu'il est important de traiter du financement car il pèse lourd sur le budget des ménages, il assure aussi qu'il faut prendre le problème à la racine. "Il faut donc traiter des coûts. Et je pense que le Parlement ne va pas assez vite, au vu du rythme de l'augmentation des coûts."
"Les cantons sont le principal lobby"
Le directeur du groupe Mutuel "rejoint" Alain Berset sur cette "paralysie du Parlement causée par les lobbys". "Le principal lobby du Parlement aujourd'hui, ce sont les cantons", affirme-t-il.
Il faut régler les problèmes d'évolution des coûts de la santé. Il y a une vraie urgence
"En tout cas, ils sont dans un position qui relève du conflit d'intérêt: ils sont propriétaires d'hôpitaux, ils ont donc tout intérêt à veiller à leur rentabilité. Mais en même temps ils définissent les tarifs qui vont être remboursés sur les factures. Sur plusieurs sujets, les hôpitaux freinent. Ils ont édulcoré le projet sur le financement des primes et ça fait 13 ans que le financement des prestations ambulatoires traîne au Parlement car les cantons ne veulent pas prendre en charge une partie de la facture."
Enfin, le directeur insiste: "il faut régler les problèmes d'évolution des coûts de la santé. Il y a une vraie urgence".
Sujet TV: Valérie Gillioz
Adaptation web: Julie Marty