A Alessandria, dans la région italienne du Piémont, les artisans répètent les mêmes gestes depuis 1857. Avec 100 grammes de poils, les chapeliers forment une cloche.
"Moi, je dois réaliser le premier feutrage mécanique du chapeau. Je vais fabriquer la trame de la cloche, grâce à un mouvement d'oscillations qui va réduire de plus en plus l'épaisseur du tissu", explique l'artisane chapelière Florentina Marusac.
Pas de couture
Les chapeaux sont formés, jamais cousus. Soixante artisans en produisent 180'000 par an. Six semaines sont nécessaires pour faire un Fédora, six mois pour un Panama Montecristi. La dernière étape de la création d'un feutre est toujours celle du feu: le couvre-chef est passé dans les flammes d'un mini-brasero.
"Il faut un minimum de 52 étapes pour un chapeau. Il n'y a pas d'école pour enseigner cela, nous apprenons le métier sur le tas. Les plus anciens expliquent aux jeunes. Mais surtout, tu regardes les passages pour voler le secret", raconte Roberta Compi, la coordinatrice du foulage.
Rétablissement des affaires
En 2017, la faillite de Borsalino pour mauvaise gestion avait fait grand bruit. Rachetée par Philippe Camperio, un investisseur genevois, l'entreprise s'est relancée grâce aux femmes, qui représentent désormais 60% de la clientèle. Les recettes ont augmenté de 25% l'an dernier.
Jacopo Politi, le chapelier styliste, a pour mission de permettre à la tradition de mettre le cap sur le futur, notamment grâce aux couleurs reprises dans les archives de la marque. "Ce qui est incroyable chez Borsalino, c'est que nous faisons encore notre feutre", souligne-t-il. Les possibilités sont vastes. "On mélange les types de poils", précise-t-il. Les variations s'observent dans les saisons, le poids ou encore la résistance à l'eau. "Différentes qualités, pour avoir des chapeaux pour les différentes occasions", résume le styliste.
Mémoire industrielle du Piémont, Borsalino vient de s'offrir un musée, où l'on trouve un hommage à Alain Delon et Jean-Paul Belmondo. Ces deux acteurs français ont permis au chapeau de devenir un symbole mondial. L'exposition présente aussi 2000 modèles historiques, dont les chapeaux des papes et de films célèbres.
Valérie Dupont/ami