Rachat de Credit Suisse: UBS renonce aux garanties et aux prêts de la Confédération et de la BNS
La première banque helvétique a annoncé vendredi qu'elle n'avait plus besoin des garanties et prêts sous forme de liquidités que le gouvernement et la BNS avaient mis à sa disposition lors du rachat forcé de Credit Suisse en mars dernier.
UBS a résilié le contrat de garantie contre les pertes, à concurrence de 9 milliards de francs, conclu avec la Confédération, ainsi que le contrat de prêts sous forme de liquidités de 100 milliards au maximum garantis par l'Etat, conclu avec la BNS.
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"Je suis soulagée", dit Karin Keller-Sutter
"La levée de la garantie par UBS est bénéfique pour la Confédération et les contribuables", a souligné la conseillère fédérale Karin Keller-Sutter. Les mesures d'urgence visant à préserver la stabilité financière prennent donc fin. La Confédération et les contribuables n'encourent plus aucun risque lié à ces garanties. La ministre des finances a rappelé que ces garanties ont rapporté des recettes à l'Etat (lire encadré).
"Je ne vous cache pas que je suis soulagée", a mis en exergue la cheffe du DFF.
Par ailleurs, elle a relevé que le paiement des liquidités mis à disposition d'UBS pour faciliter le rachat de Credit Suisse est un "signal fort" pour les marchés financiers. Les investisseurs applaudissaient en effet l'annonce. L'action UBS prenait 4,9% à 20,35 francs à 10,45 francs à 10h45.
"La faillite de Credit Suisse aurait des conséquences incalculables pour l'économie helvétique mais également au niveau mondial", a insisté Karin Keller-Sutter, tout en reconnaissant qu'il s'agissait de la moins mauvaise solution.
"Credit Suisse n'a pas été sauvée"
Un avis que ne partage pas Carlo Lombardini, avocat spécialiste du droit bancaire, interrogé vendredi soir dans Forum. Selon lui, le rachat par UBS ne constitue pas un sauvetage. "Rien n'a été sauvé", assène-t-il. "La Confédération a laissé mourir Credit Suisse!"
Selon lui, une autre solution aurait été possible: il aurait fallu avoir le courage de nationaliser Credit Suisse, ce que la loi permet, et de rétablir la confiance grâce à la garantie d'avoir la Confédération comme principal actionnaire.
"C'est très grave que la Confédération n'ait pas sauvé une banque [...] qui était fondamentalement saine, hormis les cellules [...] malsaines qui se trouvaient dans la banque d'investissement." À l'inverse, une nationalisation aurait permis "le maintien d'une bonne banque et la création d'une bad bank qu'on allait liquider. Les actionnaires auraient dû tout perdre!"
Ainsi, pour le spécialiste du droit bancaire, l'opération constitue "une magnifique réussite pour UBS, tant mieux pour eux! Mais j'attends avec impatience le résultat de la commission d'enquête sur cette très triste affaire, et je ne pense pas que le gouvernement doit pavoiser ce soir." Il ajoute toutefois que ce dernier avait peut-être de bonnes raisons d'agir ainsi. "C'est ce que la Commission d'enquête parlementaire (CEP) permettra de comprendre, je l'espère!"
Réflexion sur la régulation à mener
Carlo Lombardini espère aussi que cette CEP permettra une réflexion sur la manière de surveiller une banque. À ce sujet, Karin Keller-Sutter a également déclaré qu'il fallait désormais réfléchir sur les mécanismes qui pourraient à l'avenir être mis en place en Suisse pour donner aux instances de régulation davantage d'outils pour se faire entendre auprès des banques.
Elle a aussi critiqué les décisions des dirigeants de Credit Suisse ayant conduit à la perte de confiance des investisseurs dans l'établissement, qui était un fleuron du système bancaire helvétique.
Interrogée sur la future taille d'UBS après l'intégration de la banque aux deux voiles, Karin Keller-Sutter a rappelé qu'UBS menait des discussions avec le Département fédéral de l'économie et les partenaires sociaux. Des milliers de collaborateurs et collaboratrices de Credit Suisse devraient voir leurs postes supprimés lors de la fusion.
ats/kkub/ami
Des gains pour la Confédération et la BNS à hauteur de 730 millions
L'aide apportée par les autorités publiques dans le cadre du rachat de Credit Suisse par UBS s'avère payante. La Confédération et la BNS reçoivent au total quelque 730 millions de francs.
Les aides publiques avaient une contrepartie: la banque aux trois clés a ainsi payé 40 millions de francs à la Confédération dans le cadre de la garantie et Credit Suisse a versé un total de 214 millions, dont 61 millions à l'institut d'émission et 153 millions à l'Etat, selon un communiqué d'UBS.
L'ex-numéro deux bancaire a par ailleurs versé une prime de risques de 476 millions à la banque centrale helvétique.
Des gains aussi lors du sauvetage d'UBS
Ce n'est pas la première fois que le sauvetage d'une banque rapporte au final un gain aux autorités publiques. En 2009, le sauvetage d'UBS, embourbé dans la crise financière dite des "subprimes", avait également permis de dégager des bénéfices. Le gouvernement et la BNS avaient alors créé une banque de défaisance, nommée SNB Stabfund, qui avait accueilli les actifs toxiques de la banque aux trois clés à hauteur de 39,1 milliards de dollars.
Au sortir de la crise, la Confédération a vendu sa participation à l'été 2009 et réalisé un bénéfice de 1,2 milliard de francs. Quant à la BNS, elle a revendu fin 2013 le SNB-Stabfund à UBS elle-même, réalisant un gain de 3,76 milliards.