Stefan Meierhans: "Beaucoup de gens ont des peurs existentielles parce qu'ils n'arrivent plus à joindre les deux bouts"
Avec des salaires réels mesurés à -1,9% entre 2021 et 2022, l'indice du pouvoir d'achat n'a jamais été aussi bas depuis les premières mesures en 1943. Selon les secteurs, le salaire réel a même chuté de 5% sur cette période, montre l'indice officiel de l'Office fédéral de la statistique.
C'est la 3e année consécutive que les salaires réels reculent en Suisse, tandis que la productivité du travail, elle, augmente. "Les caisses des entreprises sont pleines mais les poches des salariés sont de plus en plus vides", résumait ainsi Thomas Bauer, responsable de la politique économique chez Travail.Suisse, à la mi-août dans le 19h30.
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Et la situation n'est pas vouée à s'améliorer pour les citoyennes et les citoyens suisses: le directeur de l'Office fédéral du logement s'attend à une
d'ici 2026, tandis que les primes maladie risquent de bondir à nouveau en 2024, selon la faîtière des assureurs. L'inflation, bien que modérée en Suisse, s'est maintenue à 1,6% en août 2023, alors que les prix de l'énergie continuent d'augmenter.
Manque de transparence et de concurrence
Dans ce contexte, "beaucoup de gens ont maintenant des peurs existentielles parce qu'ils n'arrivent plus à joindre les deux bouts", alerte le surveillant des prix de la Confédération Stefan Meierhans dimanche dans le 19h30. "Les charges montent, tout monte, et beaucoup de gens qui ont pourtant un salaire assez confortable se voient confrontés à des difficultés."
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Si le St-Gallois souligne les facteurs exogènes qui pèsent sur l'économie et alimentent l'inflation, il dit craindre que certains n'en profitent pour gonfler les prix, "parce que tout le monde s'est habitué à ce que les prix augmentent". Selon lui, la solution réside dans la transparence: "Quand il y a de l'opacité, on a l'impression qu'on peut faire ce qu'on veut!"
Il estime par ailleurs que la Suisse souffre de "lacunes dans la concurrence".
Plusieurs axes d'action au programme
Dans l'optique d'agir concrètement pour soulager le porte-monnaie des ménages helvétiques, "Monsieur Prix" a convoqué mardi une réunion sur le pouvoir d'achat qui doit rassembler les différentes organisations de défense des consommateurs du pays pour faire "un état des lieux" des préoccupations autour de plusieurs axes.
Parmi ceux-ci, l'augmentation de la TVA (+0,4%) prévue pour 2024 figure au sommet de l'agenda, explique Stefan Meierhans. Pour lui, il faut là aussi miser sur plus de transparence pour s'assurer que l'occasion ne sera pas utilisée par certains pour gonfler davantage leurs prix.
Un autre axe important concerne les services liés à la Confédération. "L'Etat porte une responsabilité accrue dans le développement de beaucoup de prix. J'ai déjà dû intervenir auprès de La Poste et des transports publics. On a pu réduire la facture de 120 millions, mais il y a encore des questions qui se posent, par exemple en matière de prix de l'électricité", déplore le haut fonctionnaire.
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Les primes maladie, un bilan "difficile à accepter"
À l'approche de l'annonce tant redoutée des primes maladie 2024, Stefan Meierhans se désole particulièrement de la situation dans le domaine de la santé. Et de son propre bilan: "Avec une commission d'experts, on a proposé 38 mesures en 2017. Six ans plus tard, quasiment aucune n'a été réalisée. C'est une inertie qui est difficile à accepter. Aujourd'hui, j'attends que les décideurs prennent cette douleur de la population comme énergie pour changer les choses!"
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Propos recueillis par Jennifer Covo
Texte web: Pierrik Jordan