Tamedia a informé le personnel jeudi matin. Un collaborateur a confirmé à Keystone-ATS les points principaux du programme d'économies du groupe que le site persoenlich.com a révélé.
La suppression de postes en Suisse alémanique fait partie d'un paquet d'économies de 6 millions de francs au total. Sur ce montant, 3,5 millions concernent la Suisse romande, comme déjà annoncé mercredi. Les 2,5 millions de francs restants concernent les titres de Tamedia en Suisse alémanique.
Ces nouvelles mesures font suite à un vaste programme d'économies mis en place ces dernières années. Au cours des trois dernières années, les rédactions des titres de Tamedia ont déjà dû économiser 70 millions de francs.
Jusqu'à 28 postes supprimés en Romandie
Tamedia va supprimer jusqu'à 28 postes sur 247 collaborateurs en Suisse romande. Ces suppressions de postes touchent les titres et services éditoriaux de la Tribune de Genève et de 24 heures, de la rédaction de T (rédaction commune des titres romands de Tamedia) et du Matin Dimanche.
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L'entreprise justifie ces mesures par l'évolution du chiffre d'affaires et par un modèle économique sous pression en raison de la transformation numérique.
Plus de 40 postes perdus en plus, selon Impressum
Dans un communiqué, l'association professionnelle Impressum estime que ces licenciements toucheront dans les faits une quarantaine de personnes: 20 postes à plein temps dans différentes rédactions de Suisse alémanique du groupe et 21 postes supplémentaires de collaborateurs externes.
"Si l'on ajoute à cela les mesures de suppression annoncées hier en Suisse romande, on obtient une estimation d'environ 70 journalistes qui manqueront à l'avenir sur la place médiatique suisse", ajoute Impressum, évoquant "une nouvelle saignée" qui représente une étape de plus "dans le sinistre processus de démantèlement qui dure depuis des années".
Syndicom, de son côté, "condamne la suppression supplémentaire de postes" au sein de Tamedia. Cette mesure est "d'autant plus incompréhensible" que le groupe a réalisé un bénéfice de 123 millions et versé 47 millions de dividendes l'année dernière, souligne le syndicat. La suppression de postes "est irresponsable à l'égard des professionnels des médias et n'est pas nécessaire du point de vue économique", selon Stephanie Vonarburg, vice-présidente de syndicom, citée dans un communiqué.
ther avec ats
Le Conseil d'Etat vaudois inquiet pour la diversité des médias
Jeudi, le gouvernement vaudois a fait part de son inquiétude. Il a adressé un courrier à la direction de l'entreprise dans lequel il exprime sa vive préoccupation pour l'emploi et la diversité de la presse.
Le Conseil d'Etat regrette la suppression potentielle d'un nombre important d'emplois au sein des rédactions, a-t-il indiqué dans un communiqué.
Il ne s'agissait pas d'un acte de protestation à proprement dit, comme l'explique dans Forum Christelle Luisier Brodard, présidente du Conseil d’Etat vaudois. "Nous voulions leur dire que nous avions pris acte avec regret de cette décision, et leur montrer aussi notre préoccupation à la fois pour les emplois, mais aussi par rapport à la diversité de l'offre médiatique en Suisse romande. Dans une société démocratique comme la nôtre, on est attaché au fait d'avoir des médias forts et indépendants."
Tout en étant conscient de l'évolution rapide de l'environnement de la branche médiatique, le gouvernement rappelle en effet dans son courrier à l'éditeur l'importance de la diversité de la presse et son attachement à la couverture de l'actualité régionale.
Une délégation du Conseil d'Etat recevra la direction de Tamedia à brève échéance.
Si l'Etat n'a pas de prise directe sur les décisions d'une entreprise privée comme Tamedia, il est important, selon Christelle Luisier Brodard, de maintenir le dialogue. "Nous voulons comprendre ce qui se passe et voir si l’offre en matière de couverture locale est maintenue, et veiller que les procédures de licenciement soient respectées. Et c’est aussi l’occasion de discuter du futur des médias", poursuit-elle au micro de Forum. Car comme elle le souligne, le rôle de l'Etat n'est que subsidiaire dans ce domaine.
Antonio Hodgers, "choqué" par l'ampleur de ce plan d'économies
A Genève, le président du Conseil d'Etat Antonio Hodgers se dit "choqué par l'ampleur de ce plan économique et des licenciements prévus, qui auront inévitablement des conséquences fortes sur la qualité. A l'heure où la presse d'information devrait réaffirmer son rôle, notamment face aux réseaux sociaux et autres vecteurs de désinformation, c'est un signal regrettable, qui nous préoccupe en matière de qualité, de diversité et d'emploi", a-t-il indiqué à l'agence Keystone-ATS.
"Nous soulignons notre attachement à ce que le projet éditorial de la Tribune de Genève soit maintenu. Le quotidien raconte la vie locale et nous sommes ainsi naturellement concernés par son destin. Nous n'avons pas le pouvoir d'infléchir les décisions d'acteurs privés, mais nous engageons Tamedia à assumer ses responsabilités d'entreprise et d'employeur, et à limiter les conséquences sur l'emploi et la qualité", a ajouté Antonio Hodgers.
Profession fragilisée
Quant au Conseil administratif de la Ville de Genève, il condamne la vague de licenciements décidée par TX Group. Ces nombreuses suppressions d'emplois, qui font suite à plusieurs autres décisions du même type depuis les années 2010, fragilisent encore davantage la profession, estime-t-il dans un communiqué.
Cette annonce confirme une fois de plus l'importance du renforcement substantiel des mesures fédérales de soutien pour assurer la diversité des médias en Suisse, souligne le Conseil administratif.