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Les Balkans attirent toujours plus de nomades du numérique

La France reconduit l'accord sur le télétravail des frontaliers. [Keystone]
Les digital nomads s'installent à Skopje / Tout un monde / 5 min. / le 12 décembre 2023
De plus en plus de "digital nomads" profitent des avancées technologiques pour travailler et voyager en même temps. Si certains affectionnent particulièrement l'Espagne, la région des Balkans, où le coût de la vie est peu élevé, fait de plus en plus d'adeptes. Reportage à Skopje, capitale de la Macédoine du Nord.

Près de l’imposante statue d’Alexandre le Grand sur la place centrale ou même dans des rues un peu plus éloignées, on entend de plus en plus l’anglais dans les rues de Skopje. Certains cafés à la mode servent désormais de bureaux à de nouveaux venus, comme Jens. Ce Néérlandais de 28 ans a toujours son ordinateur dans son sac à dos.

"J'avais besoin d'un endroit pas cher pour rester jusqu'à Noël. Et en fait, Skopje c’est plutôt le hasard, car depuis Malte où je télétravaillais avant, il y avait un vol pas cher pour Skopje, le jour où je voulais voyager. Donc j’ai regardé un site très utilisé par les digital nomads qui compare le coût de la vie. Skopje était bien placé, j’ai trouvé un billet d’avion direct, et me voilà ici", témoigne le jeune homme mardi dans Tout un monde.

1000 dollars d'économie par mois

Après les confinements liés à la pandémie de Covid-19, l’entreprise de jeux en ligne de Jens a généralisé le télétravail. Depuis, le jeune hollandais déménage régulièrement, à la recherche d’une bonne connexion Wi-Fi et de mini prix. Le très branché magazine britannique Time Out a placé la capitale macédonienne en tête des villes les moins chères pour les nomades du numérique.

"Ici, je peux facilement mettre environ 1000 dollars de côté par mois. Aux Pays-Bas, la plupart de mes revenus partiraient dans les frais, le loyer, les dépenses du quotidien. Je ne pourrais pas économiser grand-chose, peut-être 200 ou 300 euros par mois. Ça fait une grande différence".

Ici, je peux facilement mettre environ 1000 dollars de côté par mois. Aux Pays-Bas, la plupart de mes revenus partiraient dans les frais, le loyer, les dépenses du quotidien

Jens, jeune hollandais expatrié à Skopje

La capitale, pas chère et bien connectée au reste de l’Europe, possède de magnifiques montagnes avec une jeunesse parfaitement anglophone. Maciek, la quarantaine, travaille comme nomade numérique depuis quelques années. Webmaster, originaire de Pologne, il apprécie le dépaysement macédonien.

"Je voulais changer mon environnement culturel et voir le monde. J’arrive ici en Macédoine, et je ne connais que le nom de la capitale: Skopje. J’ai choisi le pays un peu par hasard, je voulais le découvrir et voir ce qui s’y passait. J’étais 5 mois en Turquie avant, la Macédoine était un pays accessible et je me disais que ça pouvait être sympa", témoigne-t-il au micro de la RTS.

>> Lire aussi : Ces pays européens qui font le pari d'attirer chez eux les nomades digitaux

Impact du Covid

Moins réputées que les plages espagnoles ou thaïlandaises, les capitales du sud-est de l’Europe se font petit à petit leur place sur l’agenda des "digital nomads". Développeurs web, designers 3D ou community managers, ils seraient aujourd'hui plusieurs milliers à travailler dans les Balkans.

"Ils sont en train de découvrir la région. Parce qu’avant, comme vous savez, dans les Balkans on a connu pas mal de guerres. Il y avait des gens qui venaient aussi travailler avant, mais le digital nomading est devenu vraiment populaire après le Covid. Ils se sont aperçus que les Balkans étaient vraiment une super région pour vivre, voyager et profiter. Et, en même temps, bien plus abordable financièrement que des pays comme la Finlande ou d'autres pays".

Le digital nomading est devenu vraiment populaire après le Covid. Ils se sont aperçus que les Balkans étaient vraiment une super région pour vivre, voyager et profiter

Dian, organisatrice de soirées pour les nouveaux expatriés à Skopje

Le gouvernement macédonien a annoncé vouloir suivre l’exemple de l'Albanie et de la Croatie et instaurer un visa dédié aux nomades du numérique afin de leur permettre de rester plus longtemps. Mais dans un pays où le salaire moyen dépasse à peine les 500 euros, l'arrivée de ces travailleurs fortunés suscite déjà quelques incompréhensions.

"Certains de ces nomades digital gagnent par exemple 2000 euros par mois. En arrivant ici, ils se disent 'Wahoo, un appartement à 600€, c'est tellement pas cher'. Mais mon salaire est trois fois ou même parfois 6 fois moins élevé que le leur! C’est un peu frustrant, mais on ne peut pas faire grand-chose", confie notamment Dian.

Hausse limitée du coût de la vie

Si les prix du marché de l’immobilier explosent à Belgrade, Tirana ou Zagreb, la hausse reste limitée à Skopje. Une aubaine pour les nomades du numérique, mais qui s’explique par une triste réalité socio-économique, analyse le sociologue Zdravko Saveski.

"Beaucoup de Macédoniens ont émigré ces dernières années et en même temps, les entreprises du BTP continuent de construire de nouveaux immeubles résidentiels. Il y a donc beaucoup d’appartements qui restent vides et comme la demande est faible, les prix n’augmentent pas beaucoup. Mais pour ces prix bas, nous payons en fait un prix énorme car les gens qui émigrent vers les pays occidentaux ne contribuent pas au progrès économique de ce pays".

Or, la jeunesse locale continue d’émigrer en Europe de l’Ouest. En 20 ans, la Macédoine du Nord a perdu 10% de sa population.

Louis Seiller/hkr

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