Le ministre allemand des Affaires étrangères Guido Westerwelle a
fait de nouveau entendre la partition allemande lundi devant ses
pairs européens réunis à Luxembourg pour parler notamment du projet
de service d'action diplomatique européen, l'instrument qui doit
permettre à l'Europe de parler d'une seule voix dans le monde.
Mais sur la Grèce, c'est plutôt la cacophonie au sein de
l'orchestre européen. "Faire trop tôt des promesses d'aide concrète
ne va que conduire à retirer la pression sur la Grèce", a affirmé
le ministre allemand en arrivant. "Il n'est pas possible que le
contribuable européen soit tenu responsable, comme si cela allait
de soi, du mauvais comportement de certains pays", a-t-il
insisté.
Accablé par une dette record, Athènes a demandé vendredi
l'activation d'un programme de prêts évalué à 45 milliards d'euros,
dont 30 milliards d'euros apportés par ses partenaires de la zone
euro et le reste par le FMI. Mais Berlin, appelé à être le plus
gros contributeur avec 8,4 milliards d'euros, traîne des pieds. Au
sein même du camp d'Angela Merkel, des voix ont suggéré ce week-end
que la Grèce soit exclue de la zone euro.
Berlin irrite
Cette intransigeance agace de nombreux Européens. Le chef de la
diplomatie italienne Franco Frattini n'a pas hésité à dénoncer "la
rigidité allemande". "Il ne devrait y voir aucun doute: si la
maison commune est en difficulté, nous devons sauver les murs car
nous sommes aussi dans cette maison commune", a insisté Franco
Frattini à Luxembourg. "Nous devons trouver un équilibre et ne pas
demander l'impossible à la Grèce", a-t-il dit.
L'irritation à l'égard de l'Allemagne, qui place sans hésitation
ses intérêts nationaux avant ceux de l'Europe, s'exprime désormais
ouvertement au sein de l'UE. Le président de l'Eurogroupe
Jean-Claude Juncker s'est récemment inquiété dans une interview des
"grandes réticences qu'il y a (en Allemagne) lorsqu'il s'agit
d'Europe", reprochant à Berlin de jeter "en priorité un regard de
politique intérieure sur les questions européennes".
Si la situation ne se débloque pas rapidement, une réunion
extraordinaire au plus haut niveau des chefs d'Etat et de
gouvernement de l'UE pourrait être nécessaire pour dénouer la
crise, a dit Franco Frattini. "Il n'y a pas de temps à perdre" pour
que l'aide "qui s'impose d'urgence soit efficace", a estimé le chef
de la diplomatie autrichienne Michael Spindelegger.
Herman Van Rompuy se dit confiant
Le président de l'Union européenne Herman Van Rompuy s'est
déclaré lundi convaincu que l'Europe et la Grèce parviendraient à
surmonter la crise actuelle et que la stabilité de la zone euro
serait préservée. "Mon impression est que, malgré le fait que nos
problèmes soient loin d'être terminés, je suis convaincu que nous
maintiendrons la stabilité de la zone euro", a-t-il dit dans un
discours devant des étudiants de l'université de Kobe, dans l'ouest
du Japon.
"Nous devons faire face à une situation qui n'avait pas été prévue
lorsque les règles de l'Union monétaire ont été définies. Mais,
étape par étape, l'Union (européenne) et la Grèce surmonteront la
situation", a affirmé le président de l'UE. Herman Van Rompuy est
en visite pour trois jours au Japon afin d'assister à un sommet
UE-Japon.
afp/hof
Les taux grecs à 10 ans à plus de 9%
Les taux grecs à 10 ans ont dépassé lundi matin pour la première fois depuis l'entrée du pays dans la zone euro en 2001 le seuil de 9%, signe que la demande d'aide formulée par la Grèce vendredi n'a pas suffi à calmer les marchés.
A 10h58 (08h58 GMT), les taux longs grecs étaient à 9,116% contre 8,680% vendredi soir, soit leur plus haut niveau depuis l'entrée du pays dans la zone euro en 2001. Leur précédent plus haut datait de vendredi matin, à 8,950%.
Le différentiel entre l'emprunt grec et son homologue allemand à 10 ans (le "spread") qui sert de référence sur le marché obligataire, s'élevait à 607 points de base contre 561 vendredi soir. Il s'agit du plus haut niveau de "spread" pour la Grèce depuis 1997.
Les taux grecs à 2 ans, de leur côté, s'établissaient lundi matin à plus de 12%, du jamais vu également, signe d'une forte défiance à court terme sur la solvabilité du pays et sa capacité à réduire drastiquement ses déficits.