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La chute de l'euro, à double tranchant pour la Suisse

Face à la chute de l'euro, les Suisses ne se montrent guère "pique-assiettes".
Face à la chute de l'euro, les Suisses ne se montrent guère "pique-assiettes".
En chute libre depuis la mi-mars, l'euro a affiché lundi un plus bas en quatre ans face au dollar et s'échangeait mardi 1,40 franc contre 1,50 franc en décembre. La force du franc présente des avantages directs pour les Suisses. Mais à long terme, la situation pourrait se dégrader. Avantages et inconvénients d'un euro plus faible.

Actuellement, acquérir des biens ou profiter de services dans la
zone euro, en se rendant sur place ou via internet, est plus
avantageux qu'au début de l'hiver. Il peut être aussi intéressant
d'investir, en achetant de l'euro pour le revendre une fois que son
cours aura remonté.



Cependant, dans les faits, les Helvètes ne semblent pas avoir
envie de jouer aux "pique-assiette", comme l'a clamé le chancelier
autrichien Werner Faymann samedi. Ces accusations ont d'ailleurs
été rejetées tour à tour par la ministre suisse des Affaires
étrangères Micheline Calmy-Rey, par la Commission européenne et par
le ministre autrichien des Affaires étrangères Michael
Spindelegger.

Faire ses courses à l'étranger

Le tourisme d'achats dans les zones frontalières n'affiche pas
de hausse marquante. Migros France, par exemple, compte un volume
de ventes en augmentation de 5 à 10% depuis le début de l'année. En
plus, il est difficile de connaître la cause exacte de ce
phénomène. La chute de l'euro ne semble pas être la principale
raison de ce plus grand succès.

S'acheter une maison

L'immobilier pourrait aussi être un secteur d'investissement
intéressant. Mais l'environnement restant globalement difficile et
la chute de l'euro n'étant que de 5%, cela ne devrait pas
encourager l'achat de maison en France voisine par exemple, estime
Michel Juvet, chef économiste à la banque Bordier.

Partir en vacances en Europe

Pour les habitants de Suisse, la force du franc invite également
à des vacances dans un pays de la zone euro. Mais là aussi, les
Helvètes se montrent timides. Kuoni, par exemple, n'enregistre pas
plus de demandes de voyage que l'année passée à la même période,
malgré la chute de l'euro et bien que les offres coûtent en moyenne
15% de moins qu'il y a 9 mois. Une addition de 100 francs dans un
restaurant en Italie ne représentante que 7 francs d'économisés par
rapport à l'été passé, explique Peter Brun, porte-parole du plus
gros voyagiste de Suisse. Selon lui, la demande devrait néanmoins
être en hausse dès juillet. Les Suisses ont repris confiance, mais
ils se décideront au dernier moment, par prudence.

Et le pétrole?

En revanche, la chute de l'euro ne contribue pas à une baisse du
prix du pétrole. Voire même, elle contribue à sa chute, étant donné
que l'or noir est payé en dollars, devise qui monte, en partie
justement à cause de l'euro qui dégringole.

Des risques pour l'emploi

Reste que la situation de l'euro est "inquiétante" pour la
Suisse, a indiqué lundi le président de la banque centrale
helvétique. Mercredi dernier, à l'issue de sa réunion hebdomadaire,
le Conseil fédéral avait aussi fait part de son inquiétude. Car la
force du franc est pénalisante pour l'industrie d'exportation, les
entreprises voyant leurs marges s'éroder quand elles ne doivent pas
augmenter leurs prix en euros pour compenser l'appréciation.



Si le niveau de 1,42 franc pour un euro devait perdurer, quelque
20'000 emplois seraient menacés en Suisse d'ici à la fin de
l'année, estimait Daniel Lampart, économiste de l'Union syndicale
suisse (USS) dans un entretien publié le 9 avril par L'AGEFI. "Nos
modèles et simulations économiques l'ont clairement
démontré."



"La force du franc pèse sur la capacité concurrentielle des
entreprises suisses qui ne pourront pas indéfiniment réduire leurs
coûts sans toucher aux emplois. Les risques de délocalisation dans
des pays meilleur marché est réel", selon Daniel Lampart. Près des
deux tiers des exportations suisses se font avec la zone euro... En
outre, les importations deviennent meilleur marché, ce qui tire les
tarifs à la baisse, avec un éventuel risque de déflation.

"Un taux actuel vivable"

La faiblesse de l'euro par rapport au franc n'a pour l'instant
pas de conséquences sur les exportations suisses, a assuré le 7 mai
le chef économiste du Credit Suisse Oliver Adler à l'ATS.



"La plupart des exportateurs considèrent le cours actuel de 1,40 à
1,45 comme peu problématique, selon nos sondages", a expliqué
Oliver Adler. "Notre économie peut vivre avec un taux de change de
l'euro entre 1,40 et 1,50 franc", avait aussi assuré le ministre
des Finances Hans-Rudolf Merz mercredi dernier.



Les chiffres appuient ce constat: les exportations suisses ont
augmenté de plus de 3% au premier trimestre et la tendance se
poursuit. Selon Oliver Adler, une crise ne se développera que si le
cours du change tombe à 1,30-1,35 franc pour un euro.



Caroline Briner

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La BNS au front

Peu ou très problématique: la chute de l'euro est un problème pour la Suisse. C'est pourquoi la Banque nationale (BNS) a entrepris de recourir à des mesures non conventionnelles en achetant massivement des euros.

L'institut d'émission helvétique ne commente jamais ses interventions, mais il est certain qu'elle intervient «sinon le franc suisse serait déjà beaucoup plus haut", a estimé lundi un opérateur zurichois à l'ATS. Selon les experts, la BNS aurait acheté depuis janvier pour plusieurs dizaines de milliards d'euros.

En seulement deux ans, la part de l'euro dans le porte-monnaie de la banque centrale a quadruplé, passant de 21,9 milliards à 80,5 milliards de francs, soit 65% des réserves de devises de la BNS, selon la NZZ am Sonntag du 2 mai.

Selon le trader zurichois, "la BNS essaie de se braquer contre" le raffermissement du franc suisse, mais "elle n'a aucune chance" d'empêcher à terme un passage sous les 1,40 franc pour un euro.

En tant que pays créditeur du Fonds monétaire international (FMI), la Banque nationale suisse participera par ailleurs au plan de sauvetage du FMI (plus de 1000 milliards de francs) pour un montant qui pourrait atteindre 17,9 milliards de francs, selon le Département fédéral des finances.