Avec la politique d'austérité de Milei, plus d'un Argentin sur deux vit désormais dans la pauvreté
Sur une population de près de 47 millions d'Argentins, 52,9% vivaient sous le seuil de pauvreté sur les six premiers mois de l'année, contre 41,7% au second semestre 2023, selon les chiffres de l'Institut national de statistiques (Indec), les premiers couvrant la présidence Milei.
Selon l'Indec, un "pauvre" en Argentine début 2024 disposait de moins de 237'000 pesos (près de 240 dollars). L'indigence, ou extrême pauvreté, sous le seuil d'un panier alimentaire de 107'000 pesos (109 dollars) a elle aussi fortement augmenté: 18,1% de la population. Un saut de plus de 6 points.
L'enquête semestrielle de l'Indec sur la pauvreté est une extrapolation, appliquée à la population totale, sur la base d'un échantillon statistique de 31 centres urbains.
Forte récession
Javier Milei mène depuis neuf mois une politique d'austérité drastique, qui a vu en particulier une dévaluation brutale du peso de 54% fin 2023, et un assèchement de la dépense publique, au nom de l'objectif "zéro déficit" budgétaire.
Cette thérapie "de choc" a entraîné une décélération marquée de l'inflation, ramenée à autour de 4% mensuels (contre 17% en moyenne par mois en 2023) et des équilibres budgétaires mensuels successifs, sans précédent depuis 15 ans.
Mais elle a aussi conduit à une forte récession (-3,5% prévus à fin 2024), une baisse d'activité et des milliers de pertes d'emploi: le chômage est passé en un an de 6,2% à 7,7%. Un chiffre qui ne dit rien, pourtant de l'impact sur l'énorme secteur informel (qui représente plus de 45% de l'emploi total).
Tendance lourde
Hormis quelques semestres faisant exception, la tendance lourde en Argentine est à la hausse de la pauvreté depuis 2017, quels que soient les gouvernements: du libéral Mauricio Macri (2015-2017) ou du péroniste Alberto Fernandez (2019-2023).
Mais elle n'avait jamais atteint 50% depuis une vingtaine d'années, quand la troisième économie d'Amérique latine se remettait à peine de sa "Grande crise" traumatique - et émaillée de violences - de 2001.
Le porte-parole de la présidence a évoqué "la dure réalité" et les "bombes à désactiver" laissées par le gouvernement péroniste. "Personne n'a jamais dit que ce serait simple, que l'activité ne souffrirait pas".
Populations les plus fragiles
"Cette politique d'austérité touche surtout les populations les plus fragiles, comme les retraités", rappelle dans l'émission Forum Margarita Gingins, spécialiste de l’Amérique latine.
"On supprime par exemple toutes les aides au remboursement des médicaments, ce qui péjore énormément la vie des retraités. Cela représente beaucoup de monde et ce sont des gens qui n'ont pas de quoi rebondir. Les travailleurs ont, eux, perdu des subsides aux transports", regrette la binationale argentine et suissesse.
Margarita Gingins estime que Javier Milei n'est pas responsable de la situation économique du pays. En revanche, "je pense qu'il doit donner une réponse à la situation sociale. On ne peut pas gouverner un pays avec seulement un projet économique. Sa responsabilité, c'est de ne pas avoir mis en place un filet social pour accompagner la population."
asch avec afp