Modifié

Gilbert Ghostine: "Construire une usine en Suisse coûterait trois milliards de francs à Sandoz"

L'invité de La Matinale (vidéo) - Gilbert Ghostine, président du Conseil d’administration de Sandoz
L'invité de La Matinale (vidéo) - Gilbert Ghostine, président du Conseil d’administration de Sandoz / L'invité-e de La Matinale (en vidéo) / 14 min. / le 5 juin 2024
Face à la concurrence, notamment asiatique, Sandoz investit des millions en Europe pour garantir l'approvisionnement en médicaments. Le leader mondial des génériques, dont le siège est à Bâle, ne prévoit pas de construire un site de production en Suisse. Trop cher et trop long, déclare jeudi à la RTS le président du conseil d'administration Gilbert Ghostine. 

Invité jeudi dans La Matinale de la RTS, Gilbert Ghostine se défend des critiques sur les prix des médicaments, deux fois plus chers en Suisse par rapport aux pays voisins: "Certes, les génériques sont plus chers en Suisse, mais les coûts sont aussi plus élevés."

Et de poursuivre: "Les demandes pour la Suisse sont aussi différentes. Nous sommes, par exemple, obligés d'imprimer les notices et les emballages en trois langues."

Une autre raison est le système de distribution. "Quand vous comparez les prix, ce ne sont pas les prix fournisseurs, ce sont les prix de toute la chaîne d'approvisionnement. Il faut donc rattacher le prix à la disponibilité. Dans les pays européens où les prix sont très bas, il y a de grandes pénuries dans les pharmacies", affirme-t-il.

>> Relire : Sans Novartis, les premiers résultats de Sandoz sont en demi-teinte

Pénurie des médicaments

Sur les 1100 médicaments vendus en Suisse par Sandoz, environ 10% connaissent une pénurie, indique Gilbert Ghostine. "Les pénuries surviennent lorsqu'il y a une variation dans la demande, explique le président du conseil d'administration. La chaîne d'approvisionnement est un peu compliquée, cela prend trois à six mois pour faire des ajustements. Sandoz est donc en train d'investir massivement dans son parc industriel en Europe pour avoir l'agilité nécessaire et s'assurer de réduire les pénuries."

Nous sommes le seul grand opérateur européen à avoir toujours une production d'antibiotiques en Europe, de A à Z

Gilbert Ghostine, président du conseil d'administration de Sandoz

Gilbert Ghostine ne craint pas la concurrence asiatique. "Sandoz dépend moins de l'Asie pour les principes actifs en matière de médicaments, car nous sommes le seul grand opérateur européen à avoir toujours une production d'antibiotiques en Europe, de A à Z. Nous produisons nos principes actifs en Europe, notamment en Autriche. (…) Le marché est ouvert à tout le monde, ce qui fait la beauté de ce métier. Quand il y a de la concurrence, les prix ont tendance à baisser."

Secteur stratégique

La pandémie de coronavirus a changé la donne, selon Gilbert Ghostine. "Tout le monde a réalisé que l'industrie pharmaceutique est un secteur stratégique." Sandoz investit donc dans ses sites de productions européens (250 millions de francs en Autriche, 500 millions en Slovénie). "Nous voulons nous assurer que nous avons notre infrastructure de production dans des pays amis ou limitrophes", dit-il. Deux pays qui ont accordé à Sandoz 50 millions de subventions chacun, annonce le président du conseil d'administration.

L'entreprise bâloise a augmenté sa capacité de production en antibiotiques en Europe "de 50% par rapport à 2021 et de 20% en comparaison avec 2023".

Nous avons discuté avec l'administration fédérale de la souveraineté sanitaire, et elle est très confortable avec notre structure de production dans des pays amis comme l'Allemagne, l'Autriche et la Slovénie

Gilbert Ghostine, président du conseil d'administration de Sandoz

Toutefois, Sandoz ne dispose d'aucune usine en Suisse. "Nous avons discuté avec l'administration fédérale de la souveraineté sanitaire, et elle est très confortable avec notre structure de production dans des pays amis comme l'Allemagne, l'Autriche et la Slovénie. Construire une nouvelle usine en Suisse nous coûterait trois milliards de francs et prendrait du temps... Financièrement, ce n'est pas viable. Tant que nous pouvons assurer une bonne productivité dans des pays amis, cela fonctionne."

Et d'ajouter: "La Suisse est attentive à cette question et s'est assurée avec la communauté européenne que les entreprises pharmaceutiques suisses aient accès aux subventions européennes pour les investissements industriels en Europe."

Propos recueillis par Pietro Bugnon/vajo

Publié Modifié