L'Inde peut se targuer d'une croissance qui devrait avoir atteint 7,5% sur l'année qui s'est terminée en mars, soit trois fois plus que la moyenne mondiale. Cette croissance est plus élevée que celle de son rival chinois, un point important pour un pays qui souffre généralement de la comparaison entre les géants asiatiques. Et la tendance devrait se poursuivre.
Dans le match face à la Chine, il y a également l'intérêt grandissant de nombreuses multinationales qui cherchent à s'installer en Inde pour diversifier leur production. "Les exportations de l’Inde, tous secteurs industriels confondus, ont atteint un record à 780 milliards de dollars l’an dernier", souligne Vivek Shevade, consultant pour des entreprises étrangères, interrogé mardi dans La Matinale. Il cite par exemple les exportations d’Apple, qui ont doublé en 2023. Et il s'attend à ce que Tesla, Foxconn et d’autres commencent ou continuent à investir en Inde.
Créer des emplois
L'Inde veut développer son industrie, car l'économie indienne ne crée pas assez d'emploi pour le moment. Le chômage, bien que difficile à estimer au vu l'importance du secteur informel, touche près d'un jeune sur deux et l'agriculture occupe encore presque la moitié de la population active, qui reste pauvre.
Certes, l'Inde a étendu le secteur des services, comme l'informatique, ce qui a permis à l'économie de se développer. Mais avec une limite, parce que sa croissance fournissait assez peu d'emplois et souvent très qualifiés.
Perspectives lointaines
L'Inde est toutefois encore loin d'être "l'usine du monde". Le Premier ministre Narendra Modi, comme ses prédécesseurs, veut vraiment développer l'industrie. L'objectif est que cette industrie atteigne 25% du PIB. Mais pour l'instant, elle se situe aux environ de 17-18%. La Chine, de son côté, est à près de 28%.
En Inde, il y a beaucoup plus de frilosité aux échanges internationaux que lorsque la Chine s'est ouverte
Certes, l'Inde suscite de l'intérêt pour ses perspectives de croissance, pour son immense marché ou encore pour réduire la dépendance à la Chine. Mais le pays "n'est pas la seule candidate à l'alternative", souligne Catherine Bros, professeure d'économie à l'Université de Tours et spécialiste de l'Inde, citant notamment le Vietnam. De plus, "l'Inde n'est pas du tout positionnée sur les mêmes segments de la chaîne de valeur que la Chine, vous ne pouvez pas délocaliser si facilement", poursuit la chercheuse. Il y a également "beaucoup plus de frilosité aux échanges internationaux que lorsque la Chine s'est ouverte", note encore Catherine Bros.
Des voix critiques
Les implantations d'entreprises n'ont pas vraiment augmenté en Inde, estime Jean-Joseph Boillot, chercheur associé à l'institut IRIS à Paris. Selon lui, chaque annonce est reprise comme une propagande.
De son côté, Catherine Bros nuance le tableau général, estimant que Narendra Modi a bénéficié de circonstances favorables, comme les difficultés en Chine. La professeure d'économie cite également les faiblesses structurelles dans l'économie indienne, notamment le nombre insuffisant d'emplois créé. Ce point va occuper le vainqueur des élections, quel qu'il soit.
Sujet radio: Mathilde Farine
Adaptation web: Julie Liardet