Ce poste inédit, créé à l'initiative de la Commission européenne, constitue un défi de taille tant la crise est profonde. Quelque 700'000 logements manquent en Allemagne tandis qu'en France, où les nouvelles constructions sont au plus bas depuis vingt ans, il faudrait construire chaque année environ 450'000 logements pendant dix ans pour répondre aux besoins, selon les évaluations.
De nombreux autres pays européens font face au même défi: une hausse de la demande doublée d'une baisse des constructions. Ainsi, alors que les prix restent élevés, tout comme ceux de l'énergie, même la "classe moyenne" a de plus en plus de mal à se loger.
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Taux d'intérêts, inflation et tourisme
"Il y a une crise de la construction liée au fait que les taux d'intérêts ont fortement augmenté dans la zone Euro", analyse Henri Sterdyniak, membre du collectif des Économistes atterrés, critique de la doctrine néolibérale européenne.
L'économiste cite également la hausse de l'inflation, qui péjore le pouvoir d'achat de potentiels futurs propriétaires ou locataires tandis qu'elle fait grimper le coût des constructions, qui doivent aussi tenir compte des nouvelles réglementations écologiques et sociales.
"En face, il y a une demande importante pour les logements en centres-villes qui s'explique par la pression du tourisme sur un grand nombre de villes européennes, notamment pour les locations saisonnières ou de courte durée", observe-t-il également.
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Action directe peu probable
Plusieurs leviers pourraient être envisagés pour améliorer la situation, comme baisser les taux d'intérêts ou inciter à la location des particuliers en limitant les impôts sur les propriétaires-bailleurs, souligne Henry Sterdyniak.
Lui-même préconiserait plutôt une incitation directe de la Commission européenne en faveur de la construction de logements sociaux. Mais cette solution devrait se heurter aux règles politiques de restriction budgétaire imposées par les traités européens.
Katja Schaer/jop
Moins d'urbanisation en Suisse romande également
En Suisse aussi, l'offre de logements ne suit pas la demande dans certaines régions, en particulier dans l'arc lémanique et les grandes villes. Les facteurs comme l'inflation ou les taux d'intérêt ont toutefois joué un rôle moins important.
"Les taux hypothécaires ont augmenté en Suisse mais n'ont pas eu un impact très important sur le marché immobilier", tant pour l'achat que pour la construction, estime Roland Bron, directeur romand de la société de conseil financier VZ.
Par ailleurs, le spécialiste du marché immobilier Yvan Schmidt pointe également un manque de nouveaux terrains à construire. "Il y a beaucoup de procédures compliquées, avec beaucoup d'oppositions. Et les règlements se sont considérablement enrichis, avec différentes lois extrêmement contraignantes tant sur les axes environnementaux que de protection du patrimoine", note-t-il.
Les derniers chiffres de l'Office fédéral de la statistique montrent une raréfaction des surfaces constructibles dans les canton de Vaud, Genève, Neuchâtel et Fribourg, où l'urbanisation s'est nettement ralentie au cours des dix dernières années.