Ils étaient le symbole de la crise de la dette. Les pays de la périphérie, ceux à qui on avait donné l'acronyme infamant de "PIGS" - cochon en anglais - pour Portugal, Italie, Grèce, Espagne, tirent désormais l'économie européenne.
L'Espagne et la Grèce devraient voir leur PIB progresser de plus de 2% cette année, un peu moins pour l'Italie ou le Portugal, mais c'est toujours mieux que la stagnation française et la récession qui se profile en Allemagne.
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Autre signe qui ne trompe pas: la Grèce, qui avait vécu la plus violente débâcle des finances publiques il y a 15 ans et qui avait été la cible des spéculateurs pariant sur sa faillite, emprunte maintenant sur les marchés financiers moins cher que la France. C'est dire à quel point la situation s'est inversée.
Et, de leur côté, les politiques s'en félicitent... L'an dernier, le Premier ministre espagnol Pedro Sánchez, estimait que son économie avançait à la vitesse d'une moto. Il s'est rectifié en juin dernier, jugeant qu'elle filait en fait comme une fusée.
Rebond grâce au tourisme
Plusieurs facteurs expliquent ce retournement de situation. Le tourisme, d'abord, qui s'est accéléré à la sortie des confinements liés à la pandémie de Covid. Mais ce n'est pas tout: "C'est aussi le résultat de politiques européennes, à commencer par le grand plan de relance pendant la pandémie. Ces pays, comme l'Italie et l'Espagne, bénéficient largement des transferts budgétaires européens", souligne Frederik Ducrozet, chef économiste de Pictet Wealth Management.
Certains secteurs comme la construction ont beaucoup profité de ces plans de relance. Une manne qui ne s'est pas tarie puisqu'il reste encore des dizaines de milliards d'euros à distribuer dans le cadre de ce plan européen.
Enfin, quinze ans plus tard, les réformes et des plans d'austérité portent leurs fruits "dans des pays comme le Portugal et la Grèce, poursuit l'expert. La situation budgétaire structurelle s'est fortement améliorée dans ces deux pays. Il y a une vraie amélioration, plus profonde, qui n'est pas seulement liée aux cycles économiques ou à l'aspect chance pour des pays mieux exposés à la reprise après la pandémie".
Amélioration des finances publiques
De son côté, Christina Carlsten, analyste, spécialiste de l'Europe à la banque Piguet Galland, constate aussi l'amélioration des finances publiques, soulignant notamment le travail réalisé en Espagne: "Le pays a vraiment réussi à diminuer sa dette par rapport au PIB et comme l'économie va mieux, les revenus vont aussi augmenter.
Pour autant, certains indicateurs ne sont pas encore au beau fixe. Le Portugal montre quelques signes de ralentissement. L'économie italienne a retrouvé l'an dernier son niveau d'avant 2008, mais la Grèce n'y est pas encore, ce qui montre à quel point la crise a été profonde et a fait des dégâts. Cela se voit aussi dans les salaires réels qui restent 30% en dessous de leur pic en 2008. Dans toute l'Union européenne, seuls les Bulgares ont un pouvoir d'achat plus faible que les Grecs.
La situation sur le marché du travail s'est améliorée. En Espagne et en Grèce, plus d'une personne sur quatre était sans emploi au pire des turbulences économiques. Le taux de chômage vient de passer en dessous des 10% en Grèce, mais il reste au-dessus en Espagne et presque deux fois élevé que la moyenne de l'Union européenne.
Mathilde Farine