Après une forte progression ces dernières années, plusieurs voyants sont désormais à l'orange sur le marché européen des véhicules électriques: les ventes sont en baisse ou stagnent dans certains grands pays, et la valorisation boursière du pionnier Tesla s'érode.
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Si ces chiffres peuvent être mis en lien avec l'arrêt de certaines subventions, notamment en Allemagne ou en France, beaucoup d'automobilistes hésitent encore à faire le choix du tout-électrique. En cause, un prix à l'achat en moyenne plus élevé, l'autonomie limitée de certains modèles et une disponibilité des stations de recharge que certains jugent encore insuffisante.
Présent vendredi au Swiss Economic Forum d'Interlaken (BE), le patron du géant allemand Volkswagen a toutefois affiché un véritable enthousiasme et sa conviction que le futur de l'industrie automobile sera "définitivement électrique".
Ralentissement temporaire
Presque toutes les grandes marques traditionnelles proposent désormais des modèles dans plusieurs gammes de prix. Et d'après Thomas Schäfer, sa marque est bien positionnée dans le virage électrique européen. "Nous avons de superbes voitures, elles sont compétitives... Maintenant, nous devons simplement passer à la vitesse supérieure et proposer au grand public des modèles qui se situent dans la même fourchette de prix que les voitures thermiques. Ensuite, ça s'imposera rapidement", estime-t-il mardi dans l'émission Tout un monde.
Il évoque notamment des voitures disponibles d'ici à la fin 2025 pour moins de 25'000 euros, et un modèle "d'entrée de gamme à moins de 20'000 euros, qui sera produit et vendu en Europe".
Selon lui, le ralentissement constaté en ce début d'année n'est que temporaire: "L'électromobilité a atteint un léger plateau. C'est dû essentiellement au caractère hétérogène du marché européen: il s'est très bien développé dans les pays nordiques ou en Suisse, mais dans certains pays d'Europe de l'Est, c'est beaucoup plus lent", analyse-t-il.
"Direction politique claire"
Le manager estime aussi que le problème vient du coût de l'électricité, "toujours très élevé en Europe", selon lui. "En Chine ou aux Etats-Unis, où les coûts de l'électricité sont très bas, on voit que la mobilité électrique se développe", dit-il. Enfin, concernant l'arrêt de certaines subventions, il en appelle à des "règles et des politiques stables pour que l'électromobilité s'impose".
L'Union européenne prévoit d'interdire la vente de véhicules thermiques neufs d'ici à 2035. Si ce délai met une certaine pression sur les épaules des constructeurs, l'industrie n'est pas "à deux ou trois ans près", estime Thomas Schäfer.
"La question la plus importante, c'est que nous réussissions cette transformation d'ici à la fin de cette décennie, (...) que la direction politique soit claire et que nous ayons des prix de l'électricité raisonnables pour pouvoir produire des batteries ici, en Europe."
Economie circulaire des batteries
La production de ces batteries a aussi un impact conséquent sur l'environnement, tant en termes d'émissions grises de CO2 que de pollution des sols. Le recyclage est donc primordial pour en diminuer l'empreinte écologique.
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"Nous avons une stratégie d'économie circulaire et nous sommes déjà très avancés dans le domaine des batteries. On a mis en place une ligne de recyclage à Salzgitter, près de Wolfsburg. Là-bas, plus de 90% des batteries peuvent être recyclées. Il n'y a pas de crainte que les batteries deviennent des déchets encombrants, ce sont des matières premières très précieuses qu'il faut réutiliser", expose le patron de Volkswagen.
Ainsi, en dépit des contraintes politiques, de la concurrence mondiale exacerbée et des impacts environnementaux toujours conséquents, l'industrie automobile semble avancer vers son avenir électrique avec une certaine sérénité.
Sujet radio: Patrick Chaboudez
Adaptation web: jop
Pas de restrictions vis-à-vis de la Chine
Nouvel acteur majeur dans le secteur automobile, la Chine est aujourd'hui à la fois un marché et un pays producteur incontournable. Le groupe Volkswagen y est présent depuis 40 ans, il y vend un tiers de ses véhicules et vient d'annoncer des investissements à hauteur de 2,5 milliards de francs dans ce pays.
Ainsi, alors que la concurrence des marques chinoise se fait toujours plus forte, l'industriel allemand affiche sa sérénité et se montre hostile à toute nouvelle taxe pour protéger le marché européen. "La concurrence, c'est toujours bien!", estime-t-il. "Elle apporte des innovations, elle dynamise l'industrie."
Il est opposé au principe des taxes douanières qu'envisage d'imposer l'Union européenne pour freiner les constructeurs chinois tels que le géant BYD. "Les droits de douane rendent les véhicules et les affaires plus chères", argue-t-il.
"Le marché européen est attractif. Les constructeurs chinois viendront bien sûr en Europe, comme les Japonais sont venus dans les années 60-70. Ou les Coréens. Et c'est tout à fait normal", estime-t-il. "La réglementation en Europe est très différente de la Chine, et les décideurs politiques doivent faire en sorte qu'elle soit respectée. Si un constructeur veut réussir à long terme en Europe, il doit aussi produire et renforcer ses chaînes d'approvisionnement en Europe. Alors tout le monde jouera à nouveau à égalité."