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Le président de la BNS Thomas Jordan quittera son poste fin septembre

Le président de la BNS Thomas Jordan quittera son poste fin septembre
Le président de la BNS Thomas Jordan quittera son poste fin septembre / Forum / 2 min. / le 1 mars 2024
Le président de la direction générale de la Banque nationale suisse (BNS), Thomas Jordan, quittera ses fonctions le 30 septembre. Le Biennois avait pris la tête en 2012 d'un institut d'émission en crise après la démission de Philipp Hildebrand.

"Maintenant que les différents défis rencontrés ces dernières années ont pu être maîtrisés, le moment est propice pour me retirer", affirme Thomas Jordan, cité dans un communiqué de la BNS publié vendredi. Le document ne fait aucune mention au remplacement du président, âgé de 61 ans, ni des raisons de son départ. Le Conseil de banque et la direction générale affirment "regretter au plus haut point" la décision de Thomas Jordan.

Arrivé à la direction générale de la BNS en 2007, Thomas Jordan a été mis très rapidement à contribution. Le banquier central a traversé la crise financière de 2007-2008 en qualité de responsable du fonds de stabilisation créé en vue de reprendre des actifs illiquides d'UBS, la grande banque systémique alors en graves difficultés.

La nomination de Thomas Jordan la tête de la BNS est intervenue dans un contexte de crise pour l'institution, le Biennois ayant remplacé Philipp Hildebrand, contraint à la démission suite à des transactions controversées sur devises réalisées par son épouse d'alors. Il est confirmé dans ses fonctions en avril 2012, après une période d'intérim de trois mois.

Près de huit ans de taux négatifs

La levée du taux plancher entre le franc et l'euro en 2015 fut l'un des faits marquants de la présidence de Thomas Jordan, alors que la crise du Covid et la chute de Credit Suisse auront marqué la fin du mandat.

Défendant de longues années, contre vents et marées, une politique monétaire ultra accommodante qui lui aura attiré les foudres du secteur bancaire en Suisse, le président démissionnaire de la BNS a mis un terme en septembre 2022 aux taux d'intérêts négatifs qu'il avait lui-même introduits en 2015.

Début 2010, il accède à la vice-présidence de la BNS, oeuvrant dans cette fonction au développement de l'actuelle série de billets de banque et du volant anticyclique de fonds propres, un instrument destiné à éviter les bulles immobilières.

"C'est le bon moment"

Invité de Forum vendredi, Philippe Bacchetta, professeur de macroéconomie à l'Université de Lausanne, estime le moment bien choisi pour Thomas Jordan. "C'est le bon moment. Cela fait longtemps qu'il est dans l'institution et c'est important pour les instituions de se renouveler", analyste-t-il.

"Il vient de passer une phase de haute inflation qui a pu être maîtrisée, donc il peut sortir sur un succès, dans une situation où il peut être content de la Banque nationale", ajoute-t-il.

Questionné enfin sur le flou autour de ce départ, aucune raison n'ayant été mentionnée, Philippe Bacchetta estime que la communication est l'une des faiblesses de la BNS depuis plusieurs années. "Cela a aussi été le cas dans certains aspects de la politique monétaire et dans d'autres aspects plus politiques, sur la distribution des bénéfices ou encore le style d'investissement par rapport au climat", conclut-il.

Beaucoup plus critique, Cédric Wermuth, également invité de Forum vendredi, dépeint "un président conservateur" qui a "laissé de côté" toutes les obligations de la BNS si ce n'est le contrôle de l'inflation. Pour le co-président du PS, Thomas Jordan a notamment eu de la peine à comprendre "l'intérêt général" et "l'impact de sa politique sur les loyers ou sur la compétitivité de la Suisse, surtout dans le secteur de l'exportation".

Thomas Jordan quitte la présidence de la BNS: interview de Philippe Bacchetta et de Cédric Wermuth
Thomas Jordan quitte la présidence de la BNS: interview de Philippe Bacchetta et de Cédric Wermuth / Forum / 9 min. / le 1 mars 2024

ats/lan

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Une surprise

Cette démission constitue une grosse surprise, souligne Karsten Junius, chef économiste de la banque J. Safra Sarasin. L'actuel président aura fortement contribué à renforcer la crédibilité de la BNS, notamment en ramenant l'inflation dans la cible visée plus rapidement que les autres grandes banques centrales.

Il ne sera pas facile pour son successeur de marcher sur des traces aussi glorieuses, à en croire Karsten Junius. L'avis est partagé par l'économiste Stefan Gerlach, l'un des trois membres de l'autoproclamé "Observatoire de la BNS".

Le successeur de Thomas Jordan pourrait bien être choisi à l'externe, puisque traditionnellement la direction générale compte deux membres provenant du secteur privé et un ayant fait ses classes à la BNS.