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UBS a aidé l'ex-président du Yémen à dissimuler des millions de francs

L'ancien président du Yémen Ali Abdallah Saleh photographié en avril 2011, en plein printemps arabe, lors d'un meeting avec ses supporters à Sanaa. [KEYSTONE - MUHAMMED MUHEISEN]
L'ancien président du Yémen Ali Abdallah Saleh photographié en avril 2011, en plein printemps arabe, lors d'un meeting avec ses supporters à Sanaa. - [KEYSTONE - MUHAMMED MUHEISEN]
UBS a géré des millions de dollars pour Ali Abdallah Saleh, le controversé ancien président du Yémen. Pendant des années, la banque n'a pas signalé les signes avant-coureurs de blanchiment d'argent. La Confédération inflige aujourd'hui une amende au numéro un bancaire suisse, comme le montrent les recherches menées par SRF Investigativ.

Pour la seule année 2011, UBS a relevé un total de 5438 alertes dans le dossier d'Ali Abdallah Saleh, l'ancien président du Yémen décédé en décembre 2017. Malgré cela, la banque n'a jamais signalé aux autorités le moindre soupçon de blanchiment d'argent. C'est ce qu'écrit le Département fédéral des finances (DFF) dans un avis de sanction que SRF Investigativ a pu consulter.

Ali Abdallah Saleh n'était pas un client comme les autres pour UBS. Il s'agissait d'une "personne exposée politiquement" (PEP), qui doit faire l'objet d'une enquête particulièrement minutieuse. Il a dirigé le Yémen pendant plus de trois décennies et a été cloué au pilori au niveau international pour des allégations de corruption.

UBS gère des millions pour le clan Saleh

En 2004, Ali Abdallah Saleh, alors président du Yémen, a ouvert un compte auprès d'UBS, enregistré au nom de "Wild Horse Investment Inc.". Mais selon le DFF, 25 personnes de l'entourage du dirigeant, dont ses deux épouses, ses enfants et ses petits-enfants, ont aussi eu des relations avec UBS.

Le mandat de répression concerne un paiement datant de 2009, une somme de plus de 10 millions de dollars versée par le sultan d'Oman au président yéménite. Le fils de ce dernier a remis le chèque à UBS à Zurich. Ali Abdallah Saleh a ensuite distribué la moitié des millions sur différents comptes UBS enregistrés au nom de membres de sa famille.

"Une justification peu convaincante"

Cette transaction a déclenché des alertes internes à UBS, comme le relève le DFF. Mais au lieu de contacter le Bureau de communication en matière de blanchiment d'argent (MROS), les employés se sont contentés de noter dans le dossier: "Il est de notoriété publique que les riches dirigeants du monde arabe soutiennent leurs homologues plus pauvres en leur offrant de tels cadeaux". Une "justification peu convaincante", selon le DFF. UBS aurait dû tirer la sonnette d'alarme.

Deux ans plus tard, cette relation d'affaires est devenue trop brûlante. En 2011, en plein milieu des troubles liés au printemps arabe, l'examen interne d'Ali Abdallah Saleh a abouti aux 5438 avertissements susmentionnés. UBS a alors fermé la quasi-totalité des comptes de la famille Saleh.

"La culpabilité d'UBS est considérable"

Malgré cela, UBS n'a pas signalé l'affaire aux autorités. Selon le DFF, la banque n'a pas non plus expliqué clairement pourquoi elle ne l'avait pas fait. Et surtout, UBS n'aurait pas dû rompre la relation avec le client, afin que les autorités puissent confisquer les avoirs.

En raison des manquements d'UBS à ses obligations, "des sommes d'argent très importantes soupçonnées d'être liées au comportement corrompu d'Ali Abdallah Saleh (...) ont été soustraites à l'accès de l'Etat", écrit le DFF. "La culpabilité d'UBS SA est considérable."

Documents incomplets

Le Département fédéral des finances critique également la manière de procéder d'UBS. Après deux ans de litiges avec la banque, il s'est avéré que les "documents demandés n'avaient été remis que partiellement ou de manière incomplète". Les personnes responsables n'ont donc pas pu être identifiées.

La sanction est donc automatiquement réduite. Le DFF a infligé une amende de 50'000 francs à UBS. Il reconnaît par ailleurs à l'établissement bancaire le mérite d'avoir amélioré sa gestion des risques depuis lors. Interrogé par SRF Investigativ, UBS n'a pas souhaité faire de commentaire.

Maj-Britt Horlacher, SRF Investigativ

Adaptation par Didier Kottelat

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Ali Abdallah Saleh, l'homme fort du Yémen

Ali Abdallah Saleh a été au pouvoir au Yémen pendant plus de trois décennies, de 1978 à 2012. Lors du printemps arabe en 2011, de violentes manifestations ont également eu lieu dans le golfe d'Aden, à la suite de quoi Ali Abdallah Saleh a annoncé sa démission. Il n'a toutefois renoncé au pouvoir de facto qu'avec hésitation.

En 2014, l'ONU a imposé des sanctions à son encontre parce qu'il a porté atteinte à la paix et à la sécurité du Yémen. La Suisse a emboîté le pas de la communauté internationale. Dès lors, Ali Abdallah Saleh a été frappé d’une interdiction d’entrée et de transit en Suisse ainsi que de sanctions financières. Dès le milieu des années 2000, différents rapports internationaux suggéraient que l'homme fort du Yémen était impliqué dans des affaires de corruption et de blanchiment d’argent.

Un rapport d’experts de l’ONU estimait en 2015 qu'Ali Abdallah Saleh avait accumulé entre 30 et 62 milliards de dollars et en avait transféré une grande partie à l’étranger. Il aurait obtenu cet argent grâce à des activités illégales et à la corruption, par exemple en concluant des contrats gaziers et pétroliers et en vendant des droits de prospection exclusifs. Saleh a été tué en 2017, vraisemblablement par des rebelles yéménites Houthis.

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Cet article est initialement paru en allemand sur le site de la chaîne publique de Suisse alémanique SRF et a été traduit par la rédaction de "dialogue". Vous pouvez lire l’article original sur SRF News.

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