Modifié

L'OMC condamne les aides perçues par Airbus

Les aides contestées concernaient notamment l'A 380. [Keystone]
Les aides contestées concernaient notamment l'A 380. - [Keystone]
L'Organisation mondiale du commerce a rendu mercredi un premier verdict sévère pour l'Union européenne dont des décennies d'aides à l'avionneur Airbus ont été jugées illégales, permettant aux Etats-Unis et à Boeing de remporter une première bataille mais pas la guerre.

Car la lutte acharnée que se
livrent depuis 40 ans Washington et Bruxelles au nom de leurs champions, Boeing
et Airbus, est loin d'être terminée. Et chacun a les yeux rivés sur le jugement
préliminaire que l'OMC doit rendre le 16 juillet concernant le deuxième volet
de cette guerre, les aides américaines à son constructeur aéronautique.

Alors que Boeing et le
représentant américain au commerce, Ron Kirk, ont salué "une grande
victoire" mercredi, l'UE et Airbus qui n'avait cessé de clamer sa victoire
ces derniers mois, sortent la tête basse après cette première décision. Bruxelles
s'est ainsi dit "déçue de certaines conclusions".

Subventions illégales

De fait, le rapport de 1000 pages
du gendarme du commerce mondial établit que certaines aides européennes au
développement de la gamme des A300 "constituent des subventions à l'exportation",
interdites par l'OMC.

Plus précisément, l'Organe de
règlement des différends (ORD) qui a mis plus de cinq ans à traiter le dossier
le plus lourd et le plus complexe de son histoire, établit que "les
subventions allemandes, espagnoles et britanniques d'avances remboursables pour
l'A380 sont des subventions subordonnées aux résultats à l'exportation" et
constituent en conséquence "des subventions à l'exportation prohibées"
dans le cadre de l'OMC.

Industrie américaine désavantagée

L'ORD estime par ailleurs que
certaines de ces aides européennes ont eu des effets négatifs sur l'industrie
américaine, en détournant "des importations d'un produit similaire aux
Etats-Unis".

Toutes les conclusions sur la
plainte déposée par les Américains le 6 octobre 2004 ne sont toutefois pas
négatives pour l'UE qui sort blanchie sur l'A350, son futur long-courrier
destiné à rivaliser le Boeing 787. Selon l'ORD, les Etats-Unis n'ont pas réussi
à établir l'existence d'une subvention pour le lancement de cet avion. Un point
jugé crucial par Airbus qui compte beaucoup sur ce jumbo pour doper ses
commandes.

De plus, il n'a pas été établi
que les subventions européennes avaient causé "un dommage à une branche de
production nationale" américaine.

afp/cab

Publié Modifié

Pas d'effet pécuniaire immédiat

En tant que telle, la condamnation de l'OMC n'a pas d'effet pécuniaire immédiat pour le perdant contrairement à ce qu'a laissé entendre Boeing peu après le verdict.

L'avionneur américain a assuré qu'"Airbus doit rembourser les 4 milliards de dollars d'aides illégales reçues pour le programme A380 ou restructurer le financement de l'A380 conformément aux conditions en vigueur sur le marché".

La décision de l'OMC implique en revanche que le perdant se mette en conformité avec les règles de l'organisation "dans les plus brefs délais", soit 90 jours.

Dans le cas contraire, des mesures de rétorsion complexes peuvent être mises en place, ce qui peut prendre des années.

Vers un match nul?

Les deux parties ont 60 jours pour faire appel.

L'UE a laissé la question en suspens, assurant qu'elle n'avait "pas encore" pris de décision.

Le commissaire européen au Commerce, Karel De Gucht, s'est montré plus clair en indiquant qu'il fallait attendre à présent le jugement de l'OMC sur la plainte déposée en retour par l'UE contre les subventions publiques dont bénéficie Boeing aux Etats-Unis, "pour se faire une idée complète du contentieux".

Beaucoup d'experts attendent au final un match nul entre les deux avionneurs les contraignant à trouver un accord, devenu d'autant plus crucial que la concurrence s'affirme, en particulier du côté chinois.