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L'USS s'inquiète de la force du franc suisse

Un taux de change euro-franc oscillant entre 1,45 et 1,50 franc serait approprié, selon l'USS.
Un taux de change euro-franc oscillant entre 1,45 et 1,50 franc serait approprié, selon l'USS.
L'Union syndicale suisse s'alarme de la force du franc qui, selon elle, menace gravement l'économie suisse dans son ensemble et l'industrie d'exportation en particulier. Elle réclame une intervention musclée de la Banque nationale suisse pour combattre la spéculation.

"Avec un taux de change de l'euro constamment inférieur à 1,30 franc, la situation devient dramatique", a déclaré mercredi devant les médias à Berne le président de l'USS Paul Rechsteiner.

"Désormais, la préoccupation est généralisée chez les entrepreneurs", a-t-il ajouté, rappelant que l'Union européenne absorbait 60% des exportations helvétiques.

Multiplication des délocalisations

Selon l'USS, la conséquence de cette évolution est la multiplication des délocalisations de sociétés suisses dans l'UE. Ce à quoi s'ajoutent des abus de plus en plus fréquents. Comme par exemple des entreprises qui veulent rémunérer leur personnel en euros ou engager des frontaliers à des salaires inférieurs. Des cas qui violent clairement les mesures d'accompagnement des accords bilatéraux, a relevé Paul Rechsteiner.

Si la cherté du franc persiste face à l'euro, mais aussi face aux autres devises comme le dollar ou la livre, à l'exception du yen, qui fait aussi l'objet de valeur refuge, c'est toute l'économie qui en pâtira. Avec à la clé de très nombreuses pertes d'emplois, voire la menace d'une déflation, a-t-il averti.

Le franc, pondéré des échanges commerciaux, s'est apprécié de presque 10% depuis le début de l'année 2009, a renchéri pour sa part Daniel Lampart, chef économiste à l'USS. Or une appréciation durable de la devise helvétique par rapport aux autres monnaies fera notamment baisser le produit intérieur brut de 2,5 à 4%, a-t-il estimé.

Les remèdes de l'USS

Pour contrer cette évolution alarmante, il revient à la Banque nationale suisse "de prendre le taureau par les cornes". La banque centrale a agi de façon déterminée lors de la crise financière, il faut désormais qu'elle fasse preuve d'autant de résolution pour freiner cette hausse spéculative.

Outre une intervention directe de la BNS sur le marché des devises, l'USS préconise trois autres mesures: l'introduction d'un impôt sur les transactions financières, des interventions régulatrices auprès des banques et des taux de change spéciaux pour les entreprises exportatrices.

Selon Daniel Lampart, un taux de change euro-franc oscillant dans une fourchette comprise entre 1,45 et 1,50 franc serait "approprié". Or, la monnaie unique européenne reste toujours fermement ancrée sous 1,30 franc, un seuil franchi pour la première fois à fin août.

ats/boi

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L'attitude discutable de certaines entreprises

Les syndicats ont parallèlement dénoncé l'attitude de certains employeurs suite à la surévaluation du franc. Certaines entreprises adoptent des pratiques discutables et pas toujours légales, notamment en cherchant à répercuter sur le personnel l'impact négatif des cours de change par du dumping salarial.

De telles méthodes concernent tout particulièrement les régions frontalières, a relevé mercredi à Berne Renzo Ambrosetti, coprésident du syndicat Unia.

Pour souligner son propos, il cite trois exemples: celui de la société de logistique Stöcklin à Dornach (SO), qui a réduit de 6% le salaire de ses 120 frontaliers en invoquant un cours de change défavorable. Conséquence pour les employés, 300 francs par mois de salaire en moins voire davantage.

Cette décision contrevient clairement à la CTT signée par l'entreprise. Unia a informé l'Union patronale suisse et une commission paritaire a été convoquée.

Autre exemple, celui de l'imprimerie argovienne Karl Augustin, qui justifie son nouveau mode de rémunération en euros par la détérioration du taux de change. Appliquant un cours de conversion arbitraire, l'employeur biffe ainsi un bénéfice de conversion de l'ordre de 10% du salaire dû, selon Unia.

Enfin, dans l'industrie horlogère où il n'y a pas de CCT déclarée de force obligatoire et où les frontaliers sont nombreux, le syndicat estime que le salaire médian a déjà diminué d'au moins 1% cette année, soit le recul le plus sévère enregistré depuis plus de 15 ans.