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Too big to fail: les recommandations tombent

Les deux grandes banques sont les principales concernées par la problématique du "too big to fail".
Les deux grandes banques sont les principales concernées par la problématique du "too big to fail".
 L'UBS et le Credit Suisse vont devoir solidement étoffer leur base de capitaux afin de faire face à une éventuelle crise. La commission d'experts en charge du dossier des sociétés trop grandes pour faire faillite préconise notamment un tour de vis en matière de fonds propres.

Le rapport a été accepté de manière unanime après une douzaine de séances, a précisé lundi Peter Siegenthaler, président de la commission d'experts "too big to fail" (entreprises trop grandes pour faire faillite) mandatée en novembre 2009 par le Conseil fédéral.

Ces mesures, qu'il a qualifiées de "compromis", doivent permettre de "davantage protéger le contribuable" lors d'une prochaine crise.

Les quatre points principaux - ils touchent les fonds propres, l'organisation, les liquidités et la répartition des risques forment un "tout qui ne peut être dissocié", a souligné Peter Siegenthaler.

Les deux grandes banques helvétiques, représentées au sein de la commission, devront notamment porter d'ici 2018 leur taux de fonds propres à 19% des actifs pondérés en fonction des risques.

Des normes draconiennes

Plus sévères que les prescriptions actuelles, ces propositions sont aussi plus strictes que les minima internationaux de Bâle III. Les normes décidées en septembre par le Comité sur le contrôle bancaire, prévoient un taux de capitaux propres de 10,5%.

A l'heure actuelle, les deux banques doivent disposer d'un taux de fonds propres dépassant 8%, mais cette règle leur laisse une plus grande liberté au niveau de sa mise en oeuvre.

Selon le rapport final de 148 pages remis au gouvernement, l'UBS et le Credit Suisse devront relever à 10% leur taux de fonds propres "durs", soit sous la forme de capital libéré, de réserves ouvertes ou de bénéfices reportés.

Ce ratio est également plus élevé que celui prévu par Bâle III, lequel s'établit à 7%.

Si l'exigence minimale de 4,5% que proposent les experts en matière de fonds propres "durs" est identique à celle de Bâle III, ceux-ci vont plus loin que les régulateurs internationaux au niveau de l'amortisseur supplémentaire qui passe de 2,5 à 5,5%.

Les experts prévoient également que les deux établissements fassent appel en cas de crise à des obligations convertibles en capital-actions.

Il y a urgence

Selon Thomas Jordan, vice-président de la Banque nationale suisse, les exigences globales se chiffrent pour chaque grande banque à 75 milliards de francs, si l'on prend comme hypothèse que le montant d'actifs pondérés en fonction des risques se situe à 400 milliards pour chacune.

Ces impératifs sont sévères mais réalisables, estime pour sa part Peter Siegenthaler. "Car les autorités ont aussi tout avantage à ce que les obligations soient supportables".

Les experts ont insisté lundi sur une mise en vigueur rapide de ces mesures. Pour ce faire, une révision de la Loi sur les banques est nécessaire. La balle est dans le camp politique et, selon Peter Siegenthaler, une proposition devrait se retrouver devant le Parlement en 2011.

Le rapport prévoit que ces règles entrent en vigueur dès 2013, tout comme celles de Bâle III, avec une période de transition allant jusqu'à fin 2018.

Au niveau des mesures organisationnelles, autre mesure-clé avec celle des fonds propres, le comité veut garantir le maintien de fonctions importantes, telles que le trafic des paiements, les opérations de crédit et de dépôt dans le cas où une grande banque se trouverait insolvable.

Credit Suisse et UBS affichent leur confiance

Le Credit Suisse et l'UBS sont "encore très éloignées" des exigences demandées, estime Patrick Raaflaub, vice-président de la commission. Mais à ses yeux, les deux banques devraient être prêtes avant la date butoir.

Réagissant au rapport, le Credit Suisse et l'UBS se sont dites confiantes en leur capacité à s'adapter aux recommandations. Les deux banques s'estiment prêtes à faire face à des normes plus strictes en matière de fonds propres avant 2018.

Le Credit Suisse part du principe qu'il ne devra pas apporter d'importants changements dans ses projets et sa politique de versement de dividende.

L'UBS a elle laissé entendre dans un bref communiqué qu'elle pourra aussi répondre aux nouvelles exigences sans avoir à lever de nouveaux capitaux.

ats/jeh

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Du côté des partis

Le Parti libéral-radical applaudit les mesures proposées.

Il faut toutefois les mettre en oeuvre plus vite que prévu, a dit lundi le conseiller national argovien Philipp Müller, spécialiste en la matière.

Si elles sont reprises telles quelles par le Conseil fédéral, les propositions des experts devraient avoir de bonnes chances devant le Parlement, ajoute le libéral-radical.

Le conseiller national PDC Pirmin Bischof (SO) estime lui que les propositions de la commission sont appropriées.

Il juge toutefois trop longs les délais prévus jusqu'à leur mise en oeuvre.

Il ne faut pas que le Parlement édulcore le paquet de la commission.

L'UDC, comme les autres partis bourgeois, salue les mesures proposées par les experts. Elle en souhaite aussi la mise en oeuvre la plus rapide.

S'agissant de l'organisation de ces sociétés, l'UDC aurait toutefois souhaité des structures plus concrètes et contraignantes.

Les propositions des experts pour résoudre le problème des banques trop grandes pour faire faillite vont certes dans la bonne direction mais elles ne sont pas assez abouties, selon le Parti socialiste.

Le PS regrette notamment la trop grande influence des banques dans le processus.

Les Verts, eux dénoncent un rapport bien trop complaisant qui renonce à poser les bases d'une réglementation efficace pour résoudre le problème des établissements bancaires surdimensionnés.

Selon eux également, la commission d'experts était malheureusement trop soumise à l'influence des milieux bancaires.

Ce n'est qu'en réduisant directement ou indirectement la taille des grandes banques que la Suisse s'affranchira de sa dépendance envers elles, martèlent-ils.

Les banquiers veulent exporter les règles helvétiques

La Suisse joue un rôle de précurseur à l'échelle internationale dans le domaine des directives en matière de fonds propres pour les banques, estime l'Association suisse des banquiers (ASB).

Elle appelle toutefois les politiciens à tenir compter de l'évolution internationale dans leur mise en oeuvre.

L'association faîtière des banques suisses attend des autorités qu'elles oeuvrent aussi à l'adoption de règles strictes par les organes internationaux.

Cela permettrait d'éviter des répercussions négatives au niveau de la concurrence pour l'UBS et le Credit Suisse.

"Très strictes et complètes", les mesures préconisées par les experts posent des exigences futures élevées en matière de fonds propres, note l'ASB.

"Elles vont néanmoins considérablement renforcer la stabilité du système financier et résoudre le problème de la garantie implicite de l'Etat pour sauver les grandes banques".

L'ASB salue en outre le fait que les mesures proposées concernent uniquement les deux grands établissements, tout comme l'absence d'intervention au niveau de leurs modèles d'affaires.

Le maintien du modèle avéré de banque universelle garantit l'attrait de la place financière suisse.