"Pourquoi y a-t-il autant de gens sans travail alors qu'au même moment il y a de nombreuses offres d'emplois? Comment la politique économique influence-t-elle le chômage? Les lauréats de cette année ont développé une théorie qui peut être utilisée pour répondre à ces questions", explique le comité Nobel dans un communiqué.
La théorie économique classique part du principe que le prix est le facteur d'ajustement entre l'offre et la demande qui sont censées se rencontrer instantanément et sans aucune difficulté. Mais, constate le comité Nobel, "cela n'arrive pas dans la vraie vie".
Les trois chercheurs ont ainsi analysé les frictions qui entravent la rencontre entre offreurs et demandeurs. Leurs travaux démontrent notamment, selon le comité, que "plus les allocations chômage sont importantes, plus le taux de chômage est élevé et la durée de recherche est longue". "Cette théorie est également applicable aux marchés autres que celui de l'emploi", précise le comité.
Un trio renommé
Peter Diamond, 70 ans, est né à New-York et il est professeur au prestigieux MIT (Institut de Technologie du Massachusetts), Dale Mortensen, 71 ans, né à Enterprise (Etats-Unis), enseigne à la Northwestern University dans l'Illinois (USA) tandis que Christopher Pissarides, 62 ans, né à Nicosie (Chypre), enseigne à la London School of Economics (Grande-Bretagne).
Peter Diamond est salué pour avoir analysé dès 1971 "les bases de fonctionnement de tels marchés" rigides. Il montre que les vendeurs ajustent leurs prix en prenant en compte les difficultés des acheteurs dans leurs recherches. Dale Mortensen et Christopher Pissarides ont eux développé la théorie et l'ont adaptée au marché du travail, précise le comité.
"J'ai eu une réaction de surprise et de bonheur", a dit le natif de Nicosie par téléphone lors d'une conférence de presse suivant l'annonce des prix. "On croit que cela ne peut pas vous arriver jusqu'au moment où cela vous arrive pour de vrai".
D'autres débouchés
Les recherches de ce trio, développées dans les années 70 et 80, ne s'arrêtent pas à l'emploi et trouvent aussi des illustrations dans d'autres branches, comme l'immobilier. Elles permettent de mieux comprendre "pourquoi le nombre de logements en vente, la durée nécessaire à trouver un acheteur et le temps pour que les parties se mettent d'accord sur le prix varient selon les périodes", souligne le comité Nobel.
La théorie monétaire, l'économie publique ou financière ou encore l'économie de la famille, ont également profité de leurs apports.
Cette récompense conforte encore la domination des Américains sur la discipline, avec désormais 46 lauréats sur 87 en Economie. Il faut remonter à 1999 pour voir un Nobel économique vierge de bannière étoilée.
afp/boi
Un prix pas prévu par Alfred Nobel
Officiellement dénommé "prix de la Banque de Suède en sciences économiques en mémoire d'Alfred Nobel", le Nobel d'économie, le seul non prévu dans le testament du philanthrope suédois, est le dernier prix à être décerné pour la saison 2010.
Attribué depuis 1969 et financé par la banque centrale suédoise, il fonctionne néanmoins comme les autres prix avec un comité et une dotation de 10 millions de couronnes (1,1 million d'euros).
Une reprise "douloureuse" de l'emploi
Peter Diamond et Dale Mortensen ont prédit lundi une reprise lente et "douloureuse" aux Etats-Unis, notamment sur le front de l'emploi, lors de leurs premières remarques après l'annonce de leur récompense.
Peter Diamond a toutefois noté que l'économie "sait très bien s'adapter. Travailleurs et employeurs s'adaptent à ce qui marche pour que l'économie fonctionne".
Sur la même note, Dale Mortensen a jugé que le retour du taux de chômage à la normale allait prendre "un moment", du moins tant que les entreprises auront du mal à obtenir des crédits et que la confiance des consommateurs restera peu élevée.